Tendinite d’Achille,
auto-rééducation
De nombreux exercices stimulent et guident la
cicatrisation de votre tendon. Une activité sportive adaptée doit être
poursuivie. Suivez ces conseils pour compléter votre
kinésithérapie, gagner du temps et reprendre plus vite.
Avec la collaboration de Grégory DELENTE,
kinésithérapeute du sport.
Le
tendon d’Achille est une cordelette fibreuse reliant le muscle du mollet à l’os
du talon. Il transmet la force de contraction et permet l’extension de la
cheville, indispensable à la propulsion. Il encaisse aussi les contraintes de
freinage lorsque vous vous réceptionnez d’un saut ou même d’une foulée. Dans
ces conditions, l’os du talon descend alors que le muscle du mollet tire vers
le haut ; votre tendon d’Achille est écartelé. Si la sollicitation est
excessive, il peut se produire des mini-ruptures au sein des fibres
tendineuses. C’est la tendinite.
- 1. Au tout début, luttez contre l’inflammation.
Après un
gros match de tennis, une grande randonnée ou une longue sortie de course à
pied, votre tendon est rouge et gonflé. L’inflammation est belle et bien
présente. Parfois même, c’est la membrane qui l’entoure qui est irritée, on
parle de «péritendinite». Dans ces circonstances le repos s’impose quelques
jours. Des talonnettes dans vos chaussures sont les bienvenues pour détendre
vos tendons. La glace est conseillée. Le froid ferme les vaisseaux, limite le
passage de liquide inflammatoire et de globules blancs venus du sang.
Protégée d’une chaussette, posez l’arrière de votre cheville et
votre tendon sur un sac de glace. Conservez la position 30 minutes à 1 heure.
Illustration : Mathieu PINET
- 2. Guidez la cicatrisation.
Après le
nettoyage des petites fibres cassées par une inflammation maîtrisée, il faut
orienter les nouvelles fibres dans l’axe des contraintes. Le repos excessif
serait à l’origine d’une cicatrice anarchique et fragile. Néanmoins, afin de ne
pas provoquer de récidive, la sollicitation doit être progressive ! La
transmission de contraction, modérée et sans freinage, est bénéfique. La brasse
est conseillée car elle mobilise la cheville en douceur. Il faut juste éviter
de pousser sur le bord du bassin lors du demi-tour. Le vélo aussi se
prête à ce travail croissant. Moulinez sur petit braquet. Augmentez peu à
peu les résistances. Ne vous mettez pas encore en danseuse.
Etirez doucement votre tendon afin de guider l’orientation des
nouvelles fibres tendineuses. Assis par terre, genou plus ou moins tendu,
attrapez votre pointe de pied et amenez la vers votre visage.
Illustration : Mathieu PINET
Posez les 2 mains sur un mur, fléchissez doucement les coudes en
gardant les talons au sol. Restez en position 30 secondes. Augmentez la tension
10 secondes. Rejoignez la position initiale lentement. Renouveler l’opération 2
à 4 fois par jour.
Illustration : Mathieu PINET
- 3. «Mécanisez» la cicatrice anarchique.
Souvent,
au cours de l’évolution, notamment si le repos a été excessif, il se constitue
un magma fibreux. Il est perçu comme un épaississement localisé du tendon. De
temps à autre, la zone brisée s’entoure de nouvelles fibres. Il reste un petit
vide central ; il se constitue un petit kyste rigide appelé «nodule». Ces
réparations anormales ou excessives ne sont pas efficaces pour assumer les
contraintes mécaniques. Il faut les assouplir … et même le «casser» puis
ré-aligner les fibres.
Même en
l’absence de cicatrice anarchique, il faut ré-entraîner votre tendon. Afin
d’éviter la récidive, il doit progressivement retrouver les qualités mécaniques
nécessaires pour encaisser les sollicitations de la disciplines qui vous tient
à cœur. Étirements et exercices de freinage plus intensifs sont
indispensables.
Croisez les jambes, posez votre cheville blessée sur le genou
opposé. Attrapez votre pointe de pied pour mettre votre tendon en tension. Avec
votre main disponible, frottez votre tendon perpendiculairement à son axe,
juste à l’endroit douloureux. Ça fait mal ! C’est bon signe !
Insistez 6 à 10 minutes, tous les jours ou un jour sur deux.
Illustration : Mathieu PINET
Enchainez
avec des étirements et du freinage pour aligner les fibres assouplies. Un
mouvement lent se révèle très efficace pour «mécaniser» les cicatrices sans se
montrer agressif.
Placez vos pointes de pieds sur une marche. Montez les deux
talons. Descendez lentement. D’abord sur vos 2 jambes puis sur 1 jambe.
Abaissez de plus en plus les talons.
Illustration : Mathieu PINET
Parfois
c’est un peu douloureux ! Pas de drame ! STANISH est le médecin qui a
réalisé l’étude qui fait désormais référence concernant le « concept de
freinage mécanisant ». Il a conclu son article par : «no pain, no
gain» (pas de douleur, pas de bénéfice). Néanmoins, n’abusez pas de ce concept
provocateur.
Continuez
à pédaler. Passez souvent en danseuse. Écrasez les pédales. Faites de
l’elliptique. Votre geste se rapproche peu à peu de celui de la course à pied.
Travaillez aussi sur stepper, mettez de plus en plus les talons dans le vide. A
la piscine, sautez dans l’eau. Allégé de la poussée d’Archimède, votre tendon
renoue avec la réception de saut. Marchez, marchez plus vite. Marchez en côte,
notamment sur tapis pour bien doser les contraintes mécaniques. Terminez en
trottinant quelques minutes.
- Reprenez l’entraînement spécifique.
Vous
pratiquez la course à pied «de rééducation». Travaillez votre condition
physique à vélo, sur elliptique ou sur stepper. Commencez votre séance en
marchant. Marchez plus vite. Trottinez. Joggez. Courez si la douleur a
disparue après 5 à 10 minutes. Au cas où la douleur réapparaitrait après
l’effort, vous en auriez un peu trop fait. Réduisez la dose la fois
suivante. A la maison, redonnez un peu de coordination à cette cheville ménagée
ces derniers temps. Fléchi sur une jambe, maintenez l’équilibre. Commencez
devant la glace sur un sol stable, terminez les yeux fermés, le pied sur un
matelas !
A ce stade, votre activité sportive savamment dosée et
subtilement croissante constitue l’essentiel de votre «rééducation tendineuse».
Néanmoins, poursuivez les auto-massages et les exercices de freinage lent.
Attention ! Ces derniers doivent être pratiqués après le sport !
Avant, il risquerait d’allonger le tendon en altérant son élasticité. Il en
serait fragilisé. A l’échauffement contentez-vous de commencer très
progressivement.
Si votre
médecin vous a prescrit des semelles, portez-les dès vos premiers footings.
Vous pouvez également renouer avec la course en portant des talonnettes (…des 2
cotés pour ne pas souffrir du dos !). Pour reprendre les sauts et les
appuis sur pointe plus toniques mieux vaut une orthèse soulageant le tendon. A
la manière d’un strapping, ses haubans élastiques postérieurs gainent le tendon
et réduisent sa mise en tension.
« La
course et les sports incluant des sauts peuvent être repris sous la protection
d’une orthèse soulageant le tendon »
Dès que
vous parvenez à courir 30 à 45 minutes tranquillement, augmentez peu à peu la
vitesse. Passez au seuil de l’essoufflement léger 5, 10 puis 15 minutes. Cette
étape validée, reprenez le travail fractionné. Au début accélérez et freinez
progressivement. Peu à peu, intégrez du travail d’appui et des variations
d’allures plus franches et plus sèches. Si tout cela se passe bien, vous pouvez
pousser jusqu’à vitesse maximum. Le sprint brutal est programmé quelques jours
plus tard. Il vous reste à réintroduire les sauts … de plus en plus haut, de
plus en plus loin. Bien évidemment, ces séances autorisent l’utilisation d’un
ballon ou d’une raquette. Ce travail plus tonique se prête bien à la reprise
des éducatifs dans le sport que vous aimez tant ! Vous n’avez pas
mal, renouez avec les entraînements. Quand vous avez retrouvé vos sensations,
envisagez la compétition.
- "Quand vais-je reprendre?"
Votre
question est louable et justifiée ! Voici la meilleure réponse :
«C’est votre tendon qui va nous le dire !». En effet, tout dépend de
l’ampleur et de l’ancienneté des lésions. Suivez les étapes proposées. Ne
passez à la suivante que lorsque vous avez «validée» sans douleur la
précédente. Consultez votre médecin du sport. Faites votre kinésithérapie. En
pratique, un petit surmenage tendineux ayant provoqué un peu d’inflammation
peut guérir en 7 à 10 jours. Une vieille lésion fibreuse avec des «nodules»
peut mettre 2 à 3 mois à disparaître. Parfois même, une intervention
chirurgicale est nécessaire. La bonne nouvelle : ces conseils
d’auto-rééducation constituent également un programme sportif ! En fait,
vous ne vous arrêtez pas, vous gardez la forme !
- Tendinite ou tendinopathie: une rééducation différente
«Tendinite»
signifie «inflammation du tendon » comme « appendicite »,
«inflammation de l’appendice». «Tendinopathie» veut dire «maladie du tendon».
Ce n’est pas la même chose ! En effet, l’inflammation, l’irritation du
tendon ne se produit qu’au stade initial de la blessure. Les globules blancs
arrivent pour nettoyer les lésions tissulaires. Parfois, le processus s’emballe
et devient autodestructeur. Il faut tenter de le limiter avec des techniques
anti-inflammatoires. Rapidement, des cicatrices anarchiques se constituent,
elles sont rigides, fibreuses, fragiles et cassantes comme des gerçures ou des
balafres cutanées. C’est la tendinopathie. Cette fois, il faut stimuler les
phénomènes de remodelage tissulaire. Voilà qui passe par la réactivation de
l’inflammation ! D’autres méthodes doivent être utilisées !
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