mercredi 1 juillet 2020

Infos santé : Sport et Santé-Pubalgie et douleurs des adducteurs


Pubalgie et douleurs des adducteurs

Vous avez mal entre les cuisses ou en bas du ventre : c’est peut-être une pubalgie ! Les frappes et les appuis au foot favorisent cette lésion. Les kilomètres de course aussi. Voici les explications pour mieux comprendre, soigner et éviter cette blessure !

Docteur Stéphane CASCUA, médecin du sport.

Le mot pubalgie signifie “douleur du pubis”. Le pubis est la petite articulation située quelques centimètres sous le nombril. Elle réalise la jonction à l’avant des deux os du bassin. A ce niveau s’accrochent les muscles adducteurs qui partent vers le bas. Sur la portion haute du pubis, ce sont les abdominaux qui s’insèrent. Ces derniers entourent tout l’abdomen. En jouant au foot, vous sollicitez particulièrement  vos adducteurs. Ils se contractent et se raccourcissent pour tirer de l’intérieur du pied. Ils travaillent aussi inlassablement lors de la conduite de balle pour ramener le ballon dans l’axe de la course. Les adducteurs du footballeur sont puissants et raides ! De l’autre côté du pubis, les abdominaux agissent plus discrètement : ils stabilisent le bassin. Ils permettent aux muscles de la cuisse de s’amarrer solidement avant d’entrer en action. L’équilibre est subtil et fragile. Si les adducteurs tractent trop fortement sur le bassin, la petite corde qui les relie à l’os se met à souffrir et c’est la “tendinite”. Si ces muscles se contractent trop violemment, ils risquent de se “claquer”. Ils peuvent aussi cisailler l’articulation du pubis. Parfois, en tentant de résister, les abdominaux se déchirent. Vous comprenez pourquoi, la pubalgie est une blessure complexe associant des lésions des adducteurs et des abdominaux ainsi qu’une souffrance de l’articulation du pubis.


 Illustration : Mathieu PINET

  • Comment reconnaître la pubalgie ?
Vous êtes plus sensible à la pubalgie si vous avez de grosses cuisses, le dos cambré et les abdominaux relâchés. Dans  ces conditions le tube digestif pèse sur la paroi du ventre et sur l’avant du bassin. De plus, les puissants muscles de vos jambes tirent sur le pubis.  Vous souffrez entre les cuisses ou en bas de l’abdomen après l’entraînement. Rapidement, vous avez mal pendant l’activité lors des changements de direction ou des tirs. Parfois, vous êtes gênés dans la vie quotidienne, en vous retournant dans votre lit par exemple. En toussant aussi vous ressentez une douleur car la pression augmente dans votre ventre. Ce symptôme caractérise une blessure des abdominaux, toujours plus difficile à guérir que la simple tendinite des adducteurs.

DES DOULEURS A LA TOUX CARACTÉRISENT UNE LÉSION DES ABDOMINAUX PLUS DIFFICILE A GUÉRIR QU’UNE TENDINITE DES ADDUCTEURS

Votre médecin du sport retrouve une souffrance des adducteurs et des abdominaux au cours des tests de contractions ou d’étirements. Comme l’articulation du pubis, ils sont sensibles lorsqu’on appui dessus. Parfois la paroi du ventre est suffisamment lâche et déchirée pour que le sac contenant le tube digestif descende vers le testicule : c’est la hernie inguinale.

  • Faut-il faire des examens ?
Les radios sont parfois utiles pour bien observer les os du bassin. Elles permettent d’éviter la confusion entre une pubalgie et une usure de la hanche. Souvent, elles mettent en évidence des lésions du pubis. De chaque côté de cette articulation, l’os est grignoté, rongé, percé de petits trous comme du gruyère. Quelques fois, il réagit en construisant de grosses pointes osseuses, comme des becs de perroquets. L’échographie voit bien les tissus mous, comme les muscles, les tendons ou les bébés dans le ventre de la maman. Ainsi, cette exploration peut aider à visualiser d’éventuelles tendinites ou claquages des adducteurs. Elle permet aussi de mettre en évidence, une déchirure de la portion basse de la paroi abdominale. En vous demandant de tousser, l’échographiste voit parfois la hernie inguinale sortir à travers l’orifice dilacéré et élargi. L’IRM montre parfois un œdème sur le côté du pubis caractéristique d’une inflammation osseuse. Cette souffrance apparaît avant que le «grignotage» ne soit visible sur la radio.

  • Comment soigner une pubalgie ?
Exception qui confirme la règle : le repos complet est parfois utile. Il peut durer quelques jours ou quelques semaines. En effet, le pubis se situe à un carrefour mécanique du corps humain et cette zone est sollicitée à la moindre activité. Seul le vélo peut être pratiqué ou repris rapidement : le bassin, en appui sur la selle, est relativement stable et la position penché en avant détend les abdominaux. En revanche le simple footing, en alternant les appuis sur les jambes droite et gauche, provoque un cisaillement du pubis et gêne la cicatrisation. D’ailleurs, les coureurs de fond accumulant les kilomètres souffrent parfois de pubalgie. Les médicaments anti-inflammatoires et décontracturants musculaires diminuent l’irritation et les tiraillements locaux, ils contribuent à votre soulagement. A l’issu de cette première phase, le kiné entre en action. La rééducation débute très doucement. Elle cherche à assouplir les adducteurs et guider leur cicatrisation. Il est également nécessaire de renforcer les abdominaux qui entourent le ventre pour mieux maintenir le bassin. Mais attention il ne faut pas aggraver les déchirures localisées à l’extrémité de ces muscles ! C’est alors que le talent et la compétence du kinésithérapeute jouent un rôle essentiel. Il connaît les exercices les mieux adaptés et il sait en doser la difficulté. Souvent, lorsque le pubis fonctionne mal l’articulation placée à l’arrière du bassin, la sacro-iliaque, souffre également. C’est à ce niveau que la colonne vertébrale prend appui. Vous comprenez pourquoi, il est parfois utile d’effectuer quelques manipulations pour que cette zone retrouve une plus grande harmonie de mouvement. Si l’articulation du pubis est très inflammée, une infiltration est possible. Lorsque les douleurs s’amenuisent, une reprise très progressive est envisageable : d’abord le jogging dans l’axe puis les déplacements latéraux. Enfin, on peut renouer avec le ballon en douceur. Conduite de balle puis passes courtes et longues et enfin frappes de plus en plus puissantes sont au programme. Lors des brusques accélérations, les abdominaux doivent se contracter puissamment pour fixer le bassin et créer un point d’appui pour les muscles des cuisses. Les sprints autrefois douloureux doivent être repris très progressivement. Si tout se passe bien, le retour à l’entraînement collectif est possible. Selon la gravité des lésions, le footballeur aura été absent des terrains de quelques jours à plusieurs mois !

  • Une intervention chirurgicale est-elle nécessaire ?
Si la douleur persiste après 3 à 6 mois d’arrêt sportif et de rééducation, il est d’usage de proposer une opération. Ce délai est parfois raccourcit chez les sportifs de haut niveau dont les échéances approchent ! L’intervention consiste le plus souvent à réparer et à renforcer la paroi du ventre. L’orifice situé sous les abdominaux est partiellement suturé et refermé. Cette technique est comparable à celle utilisée pour traiter les hernies inguinales. Selon l’ampleur des lésions et la technique utilisée, le délai d’indisponibilité oscille entre 6 semaines et 3 à 4 mois. Certains chirurgiens proposent de renforcer le pourtour du canal à l’aide d’une plaque synthétique. Selon certaines études, ce matériel perturberait parfois le passage des spermatozoïdes du testicule vers la verge. En cas de dégradation massive des adducteurs, certains chirurgiens suggèrent d’associer une détente des adducteurs. Ils les coupent, les laissent glisser et les raccrochent un peu plus bas. Cette fois, les suites sont plus longues et parfois plus difficiles.

  • Il faut surtout éviter la pubalgie !
Le traitement de cette blessure est long et pénible ! Une bonne prévention est cruciale. La programmation de l’entraînement doit être soigneuse. A l’issu de l’intersaison ou de la trêve, les reprises trop intenses remplissent les cabinets médicaux ! Tout au long de l’année une préparation physique généralisée s’impose. Elle comporte un renforcement progressif des abdominaux entourant le ventre. Les “obliques” sont essentiels pour maintenir le bassin et fournir un point d’appui aux puissants muscles des jambes. Attention, trop d “abdos” effectués en gonflant le ventre déchire la paroi et provoque des pubalgies. Bien sûr il faut assouplir les adducteurs et tous les autres muscles des cuisses. Moins raides, ils tirent moins sur le bassin et réduisent les cisaillements au niveau du pubis. Au début de chaque entraînement, un échauffement progressif et prolongé est impératif. Il inclut systématiquement des étirements dynamiques de type balanciers, des déplacements latéraux et un travail avec ballon d’intensité croissante. C’est ainsi que vous éviterez cette blessure qui peut gâcher toute une saison ou sonner le glas d’une carrière !

  • Les coureurs aussi souffrent de pubalgie
L’alternance d’appui sur la jambe droite puis sur la jambe gauche cisaille le pubis. La stabilisation du bassin impose une contraction permanente des abdominaux. L’agressivité du geste se conçoit aussi en regardant le sportif de profil. La jambe avant et arrière tire le pubis en sens opposé. En courant les adducteurs ont un mouvement de balancier centré sur le bassin. Quand la cuisse est en arrière, il la ramène vers l’avant et inversement. Si vous courez beaucoup, une préparation physique est nécessaire. Pour renforcer intelligemment votre ventre, optez pour un gainage traditionnel, référez-vous aux «exercices d’abdominaux en hypopression» décrit dans l’ouvrage de Bernadette DE GASQUET «Abdominaux, arrêtez le massacre ». A distance des séances difficiles, idéalement après les footings de «récupération active», faites des assouplissements. Grâce à des postures prolongées, étirez vos adducteurs mais aussi les muscles situés en arrière et en avant de la cuisse, les ischiojambiers, le quadriceps et le psoas.

  • Les bons abdos contre la pubalgie du footeux
La pubalgie du sportif est à l’homme ce que l’incontinence urinaire d’effort est à la femme : une conséquence de l’hyperpression abdominale. Inspirons-nous de l’ouvrage de Bernadette DE GASQUET, «Abdominaux, arrêtez le massacre», pour concevoir de bons exercices en hypopression. Sollicitant des chaînes musculaires spécifiques du football, ils renforcent les abdominaux sans les déchirer. Ils stabilisent le bassin pour éviter un cisaillement du pubis et favoriser un ancrage solide aux muscles des cuisses. Ainsi, vous réduisez le risque de pubalgie et vous améliorez votre geste technique.
Tous ces mouvements sont réalisés en soufflant afin de remonter le diaphragme, le muscle séparant le ventre du thorax. Ainsi, vous « faites de la place » dans l’abdomen et vous réduisez la pression. Commencez toujours par rentrer le bas du ventre, sous le nombril, pour protéger la partie inférieure de la paroi abdominale. Pensez à vous grandir, à éloigner les pieds de la tête.

  • Exercice 1 : La passe
Allongé sur le dos, ouvrez le genou droit. Décollez légèrement le talon gauche puis le droit. Ecrasez le coude droit sur le sol, montez le gauche. Soulevez un tout petit peu la tête en regardant dans la direction de la passe. Faites 10 à 15 mouvements en soufflant. Changez de côté.


 Illustration : Mathieu PINET

  • Exercice 2 : Le sprint
Allongé sur le bord du lit. Genou droit fléchi, Talon gauche au sol. Soulevez le très légèrement. Ecrasez le coude droit sur le lit, montez le gauche. Soulevez un tout petit peu la tête en regardant vers le haut. Faites 10 à 15 mouvements en soufflant. Changez de côté.


 Illustration : Mathieu PINET

  • Exercice 3 : L’appui
Allongé sur le côté droit, bassin au bord de votre lit. Montez les jambes légèrement écartées à l’horizontale. Ecrasez le coude droit sur le matelas, montez le gauche. Soulevez un tout petit peu la tête en regardant vers la gauche. Faites 10 à 15 mouvements en soufflant. Changez de côté.


 Illustration : Mathieu PINET





Source SantéSportMag

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