Ma vie d’expat en Corée du Sud
Le témoignage d’Ulysse, fraîchement
expatrié : « Se réveiller le matin et se dire : je vis dans un nouveau
pays à 10 000 km de chez moi, je réalise un de mes rêves. »
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Une petite présentation ?
Je
m’appelle Ulysse, j’ai 24 ans, je suis né et j’ai grandi à Paris. Je suis parti
habiter en Corée du Sud (Séoul) en octobre 2015.
Que faites-vous comme métier dans ce pays ?
Pouvez-vous raconter brièvement votre parcours professionnel ?
Je suis
chargé de projet en affaires scientifiques pour une entreprise coréenne leader
dans le secteur des cosmétiques.
Après
mon Bac scientifique, j’ai choisi de m’orienter vers une classe prépa BCPST
(Biologie, Chimie, Physique, Sciences de la Terre) car j’avais une sensibilité
pour la botanique et la nature. Cela m’a conduit après concours à entrer dans
une grande école d’agronomie à Toulouse (ENSAT).
J’y ai
étudié plus en détail les sciences de la vie et de l’ingénieur, en particulier
la valorisation des plantes dans l’alimentaire et la santé/beauté, c’était
passionnant. J’ai eu la chance d’effectuer une première mobilité à l’étranger
de 7 mois (Érasmus en Grèce et stage en Italie). En stage de fin d’études, je
me suis orienté vers le secteur R&D du leader des cosmétiques français par
attrait pour le monde de la beauté et son savoir-faire très français. Cela
m’ayant plu, j’ai effectué un master complémentaire d’un an en conception et
management/marketing des cosmétiques à Lyon, en apprentissage dans la même
entreprise sur un poste de coordination de projets, toujours en R&D.
À la fin
de mon apprentissage, je me suis dit qu’avec un niveau Bac+6, avec une double
compétence scientifique et management, l’étranger me manquait. J’avais beaucoup
entendu parler de la Corée et sa position de laboratoire d’innovation dans mon
domaine, et l’Asie m’attirait car c’est un territoire lointain, inconnu et
plein de challenges. Et un groupe local dont l’univers m’a fait rêver a tout
particulièrement attiré mon attention.
Par
chance et hasard, hors des voies conventionnelles, j’ai réseauté sur LinkedIn
et trouvé une personne de cette entreprise avec laquelle j’ai discuté et qui,
de mails en entretiens skype, m’y a fait entrer en novembre 2015.
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Pourquoi être parti ?
Je pense
que plusieurs raisons peuvent expliquer mon départ.
Tout
d’abord, il y a eu cette période de « French blues » (blues du
retour) en rentrant de mes 7 mois à l’étranger en 2ème année d’école
d’ingénieur. Cela touche tout Érasmus qui se respecte et disparaît avec le
temps, mais avec moi ce sentiment est toujours resté en filigrane dans mon cœur
: je devais repartir un jour. Avec un tel prénom, je devais être prédestiné à
beaucoup voyager et c’est le cas : en weekend et en vacances, j’étais déjà
toujours à droite et à gauche, alors au-delà du simple semestre d’études,
l’expatriation me faisait rêver, pour sûr !
Une
autre raison que j’ai retrouvée dans beaucoup de témoignages sur Contrepoints est également le fait que je ne
me retrouve plus dans la France d’aujourd’hui et ses valeurs. J’aime mon pays
et ma vie de Parisien, j’ai mes habitudes, des rues où je flâne avec plaisir,
les cafés, les restaurants avec mes amis et ma famille dont je suis très
proche… mais notre situation politico-sociale actuelle et les courants de
pensée qui s’y sont développés ne m’y font plus sentir comme chez moi. Je ne
m’y projette pas.
Enfin,
je ne me voyais pas rester dans ma zone de confort, à chercher le CDI au plus
vite pour m’établir quelque part, puis voir les années passer tranquillement de
cette façon. Non, je voulais profiter d’être jeune et motivé pour m’offrir un
nouveau challenge, car comme beaucoup le disent «
c’est le meilleur âge pour le faire, sinon tu le regretteras ».
Quitte à
en effet partir pour mieux revenir, je me suis dit que la vie est courte, le
monde est grand et donc que je devais certainement tenter ma chance ailleurs
Pourquoi ce pays ?
Tout
d’abord, d’un point de vue professionnel comme explicité ci-avant, l’Asie offre
davantage d’opportunités, d’innovations et de challenge que la France dans mon
domaine (et certainement dans d’autres).
Puis
concrètement, plutôt méditerranéen de nature (j’adore voyager en Italie, en
Turquie et en Grèce où j’ai des origines), je ne connaissais rien du tout à la
Corée du Sud avant mon départ, à part les mots Samsung ou LG ; je ne
connaissais même personne sur place, à part une connaissance locale de mon
ancien stage. Entre la Chine et le Japon très célèbres, c’est un pays bien
méconnu de tous.
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Mais
s’installer en Asie, découvrir une nouvelle ville et un nouveau pays si
différents et empreints d’exotisme, repartir de zéro, rencontrer de nouvelles
personnes, construire sa propre vie, tout ceci était trop excitant et déjà
mûrement réfléchi au moment du choix.
Je
savais que cela allait m’apporter beaucoup sur le plan professionnel et
personnel, une ouverture d’esprit et une aventure à l’autre bout du monde qu’il
fallait saisir maintenant.
Avez-vous eu des doutes ? Comment les avez-vous gérés
?
Bien sûr
! Rien qu’en échangeant avec ma contact sur LinkedIn, je me suis dit « Ulysse, tu postules pour un groupe que tu ne
connais pas dans un pays lointain dont tu n’as aucune idée, qu’es-tu en train
de faire ?… ». Quand j’ai annoncé fièrement que j’étais pris pour un
poste à l’étranger (projet dont je parlais régulièrement à tout le monde depuis
2 ans), ma famille et mes amis n’ont pas caché leur surprise à l’annonce que
l’heureux pays qui m’accueillerait serait… la Corée du Sud !
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Certains
m’ont dit « Pourquoi tu pars là-bas ? Tu ne
connais pas ce pays et personne sur place », « Les conditions de travail sont très dures et la mentalité si
différente, tu ne tiendras jamais ». Mais aussi beaucoup
d’encouragements et de soutien de la part de mes amis qui m’ont dit que cela me
correspondait parfaitement, et que c’était une belle occasion à ne pas manquer.
En effet, j‘avais aussi des offres pour la France avec des postes intéressants,
mais j’ai gardé le cap et j’ai accepté de partir. Quelle sensation au moment de
l’acceptation du contrat… et dans l’avion sur la piste de décollage !
Parlez-nous de votre quotidien : comment s’organise
une journée, en quoi est-ce différent de la France, de ce que vous connaissiez
?
Comme
beaucoup d’autres lecteurs le confirmeront, la vie en Asie est si différente de
la nôtre, mais si enrichissante. La Corée est un pays méconnu mais plein de
richesses, de traditions et de secrets, à mon sens autant que la Chine ou le
Japon. Séoul est une capitale « typiquement » asiatique (12 millions de
Seoulites), aux boulevards bardés de néons et de boutiques de cosmétiques aux
idoles de drama qui en font la pub, où déboulent jeunes Coréens sortant du
travail et Coréennes apprêtées pour leur soirée, des ruelles traditionnelles où
s’entassent les vieux marchés ‘street food’ et les restaurants, des somptueux
palais millénaires aux quartiers étudiants branchés où l’on sort dans les bars
jusqu’au bout de la nuit pour voir le lever de soleil sur les montagnes et la
rivière Han. Une mégapole électrique, tentaculaire, pleine de vie, tournant à
une vitesse folle dans cette puissante économie qui ne cesse de monter (on
parle de K-wave).
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À mon
arrivée, outre le jetlag, certaines choses n’ont pas été évidentes, notamment
tout ce qui est banques, assurances, contrat de travail, taxes et impôts,
obtenir mon visa et ma carte de résident… les Coréens ne parlent pas bien
l’anglais et ne sont pas habitués à voir beaucoup d’étrangers venir travailler
chez eux. Certaines de mes tribulations ont été un peu difficiles, mais
maintenant je suis bien installé.
Mes
journées de travail en semaine sont du même rythme qu’en France (alors que dans
bien des conglomérats coréens on travaille jusqu’à 23h weekends inclus sous une
très forte pression), et les missions très intéressantes car il y a de nouveaux
consommateurs et de nouveaux modes de vie. Je m’y retrouve tout à fait en
termes de compétences et de salaire.
Le
principal ‘gap’ a été la culture bien sûr : s’incliner pour saluer, plus ou
moins selon l’âge et la position hiérarchique de l’interlocuteur, arriver plus
tôt que son chef au travail, ne jamais se vanter et toujours être modeste si
l’on nous fait un compliment, se raser de près avant d’aller au travail,
respecter certains codes et bien sûr outre communiquer en anglais… apprendre la
langue, qui même si elle est basée sur un alphabet n’est pas facile !
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Les
week-ends, épicurien comme en Europe, je pars souvent à Séoul déjeuner dans un
nouvel endroit, me rendre à des expositions, aller prendre le thé dans un salon
traditionnel, faire un karaoké ou sortir dans les bars. Je ne connaissais
qu’une personne à mon arrivée et j’ai réussi à me faire maintenant plusieurs
amis. En effet, malgré leur réserve et leur défiance de prime abord (et aussi
la barrière très forte de la langue), les Coréens sont des personnes sincères
et fiables avec lesquelles j’ai beaucoup de plaisir à sortir et à échanger.
Enfin, la position centrale de Séoul en fait un hub de choix pour explorer
l’Asie. J’ai déjà visité les Philippines et Shanghai ; Taiwan ou la Thaïlande
sont sur ma checklist de futurs voyages.
Un bilan aujourd’hui : que vous a apporté
l’expatriation ?
Cela ne
fait que 5 mois, mais cela m’a beaucoup apporté d’un point de vue professionnel
et personnel. Au niveau du travail, j’ai appris de nouvelles méthodes, manières
de penser, de travailler en équipe, d’interagir et de communiquer, en
comprenant le consommateur asiatique et ses besoins notamment pour adapter la
stratégie de l’entreprise. Mon point de vue occidental permet de donner un avis
un peu différent sur bien des sujets, et en contrepartie j’apprends beaucoup de
mon équipe. Cela me confère un peu une double compétence ‘Orient/Occident’.
D’un
point de vue personnel cela a dépassé mes attentes : s’immerger, explorer,
connaître l’histoire du pays, prendre le temps car l’on n’est pas/plus un
simple touriste, rencontrer des locaux, échanger et apprendre d’eux… ce n’est
certes encore que le début mais je ne m’en lasse pas..
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Ma
famille et mes amis me manquent c’est sûr, et je leur manque aussi. Parfois
j’aimerais revenir un week-end à Paris, ou une dizaine de jours (surtout pour
la nourriture aussi !)… mais je n’ai pas le mal du pays au point de vouloir
revenir vivre en France. J’espère rester ici au moins 2 ans si ce n’est plus,
avant de peut-être partir pour un autre pays, qui sait ? C’est aussi cette
sensation qui est fabuleuse, de se réveiller le matin et se dire « Je vis dans un nouveau pays à 10000 km de chez moi,
je réalise un de mes rêves ».
Est-ce que vous vous sentez encore Français ? Pourquoi
?
Évidemment.
Avec ce genre d’expériences, on se dit qu’on peut devenir citoyen du monde, un
peu Grec, un peu Coréen… j’aime prendre le meilleur de chaque endroit mais je
reste très Français dans le fond. Tous mes amis coréens me le disent. Eux qui
sont très pressés et occupés me voient prendre mon temps, aimer faire du
shopping, leur parler des cafés de Paris, me plaindre d’un plat local trop
épicé ou arriver en retard à un rendez-vous « bien habillé » mais
avec une barbe de 3 jours… comme ils me disent : «
You are so French ! »
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Autre chose à dire ?
Croire
en ses rêves n’est pas valable que dans les contes de fées et les dessins
animés. Je ne suis pas diplômé d’Harvard et pas millionnaire, mais un junior
comme beaucoup de lecteurs, et j’ai pourtant réussi à accomplir ce départ à
l’étranger juste en y croyant. Je ne pense pas qu’avec juste 5 mois de recul ce
soit un exemple parfait, mais si on veut partir il faut le faire maintenant.
Réseauter dans une optique de « painless networking » (ne pas
sous-estimer LinkedIn) et se lancer, le jeu en vaut la chandelle !
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Source contrepoints.org
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