Ma vie d’expat’ à Boston, USA
Le témoignage de Benjamin :
« La mentalité du diplôme, contrairement à la France, est peu présente.
Seules l’expérience et vos capacités personnelles comptent. En France, je
n’avais aucun avenir. »
Boston’s Waterfront by malone545(CC BY-NC-ND 2.0)
Une petite présentation ?
Je
m’appelle Benjamin, j’ai 29 ans et je suis originaire de Lorraine, plus
précisément de la région de Longwy (pandémonium socialiste situé en
Meurthe-et-Moselle). Je suis marié à une Américaine et nous avons un fils de
vingt-et-un mois. Nous sommes arrivés aux États-Unis fin janvier 2016. Après
avoir vécu pendant un mois dans le Maryland (ma femme est originaire de la
banlieue de Washington DC), nous nous sommes installés dans la région de Boston
(Massachusetts). L’expatriation est très récente, raison pour laquelle je
propose mon témoignage d’expatrié novice.
Que faites-vous comme métier dans ce pays ?
Pouvez-vous raconter brièvement votre parcours professionnel ?
Je vais
commencer début avril mon premier travail aux US en tant qu’Assistant Manager
dans une banque américaine à Boston, dans le quartier de Downtown.
Mon
parcours est assez atypique si je puis dire ! Après avoir obtenu une
Licence d’Histoire, je me suis rendu compte que cela ne m’aurait mené à rien et
j’ai rebondi en m’inscrivant dans un Master professionnel général à
l’Université de Metz dans lequel je me suis spécialisé en Finance
Internationale.
J’ai,
par la suite, travaillé pendant six années au Luxembourg en Back et
Middle-Office. Résident en France, je franchissais la frontière tous les jours.
Au Luxembourg, je me suis mis exclusivement au service d’entreprises
anglo-saxonnes dans lesquelles la mentalité du diplôme, contrairement à la
France, est peu présente. Seules l’expérience et vos capacités personnelles
comptent. J’ai retrouvé cette approche aux États-Unis. En France, je n’avais
aucun avenir.
Pourquoi être parti ? Pourquoi ce pays ?
Je tiens
à souligner que j’ai passé les trois premières années de ma vie au Maroc, puis
toute mon enfance à Mayotte. Je dois avoir en moi ce qu’on appelle le
« gène de l’aventure » ! Pourtant, les États-Unis constituent ma
première expatriation en tant qu’adulte. La raison vient du fait que
j’accordais plus d’importance aux stages plutôt que d’aller me perdre en
Erasmus dans une fac d’Histoire à Stockholm.
J’ai
quitté la France à un moment où l’atmosphère devenait totalement irrespirable.
La stupidité étatiste n’est pas loin de son paroxysme et l’Union européenne
s’avère être incapable de répondre aux défis posés par la mondialisation et la
géopolitique, tout simplement. Attention ! Loin de moi l’idée d’affirmer
que tout est rose aux États-Unis, bien au contraire ! Le populisme généré
par Sanders et Trump montre que les Américains sont prêts à foncer dans le mur.
Nonobstant cela, les Américains ne se sont pas encore satellisés autour de
l’État pour qu’il résolve leurs problèmes.
Outre
mon envie d’aller voir ailleurs, ma femme a éprouvé le besoin de rentrer après
huit années passées en France. Entre temps, je me suis fait la main sur la
culture américaine. Par exemple, je suis fan de Football Américain et je
m’entends naturellement bien avec les anglophones.
C’est en
toute logique que les États-Unis ont constitué une destination à la fois
affective et naturelle. Nous avons même décidé de pousser l’aventure plus loin.
Plutôt que de nous installer dans le Maryland où nous disposions de nos
repères, nous avons choisi de tenter notre chance à Boston. Autrement, ce n’est
pas drôle !
Si on excepte son penchant pour le socialisme (Sanders
a failli remporter la primaire dans le Massachusetts),
Boston est une ville qui a son charme. Elle est le berceau de la Révolution
américaine. Un véritable melting-pot s’opère entre architecture américaine et
architecture européenne. Un aperçu de ce mélange se trouve à Copley Square où
cohabitent la « John Hancock Tower » et des bâtiments plus anciens
comme la « Trinity Church ». Les routes ne sont pas rectilignes à
l’inverse de la plupart des grandes villes américaines, autre résultat de
l’héritage européen. Je trouve Boston beaucoup moins oppressante que New York,
les gens ne se marchent pas dessus !
Pour
apprécier la ville, il y a le « Freedom Trail » (chemin de la
liberté). Les amoureux de la marche à pied peuvent s’en donner à coeur joie. Il
s’agit d’un parcours tracé de quatre kilomètres qui s’étend du Boston Common
(le plus ancien parc urbain des États-Unis daté du XVIIe siècle) au site de la
bataille de Bunker Hill. Le parcours, qui a pour thème la révolution
américaine, fait passer entre autres par le lieu du massacre de Boston ou
encore par le Old South Meeting House (où fut amorcé le Tea Party).
Guilherme Nicholas_Acorn Street(CC BY 2.0)
Vous êtes marié à une Américaine. L’obtention du visa
a-t-elle été une formalité ?
Oui et
non, dans la mesure où vous devriez obtenir le Visa tout en subissant la
lourdeur administrative qui va avec. Ce n’est jamais facile, bien qu’étant
marié à une Américaine et ayant un enfant citoyen des États-Unis. La première
partie de la démarche concerne la « petition», un formulaire dans lequel
ma femme effectue une demande auprès du gouvernement fédéral pour me faire
venir aux États-Unis. Nous avons dû inclure des preuves de notre relation
(photos de nos deux familles, récit de notre relation, etc…).
Cette
première partie s’achève lorsque l’administration américaine confirme que nous
avons le droit de demander un visa. Cette première partie a duré un mois au
lieux des cinq ou six habituels car mon épouse se trouvait en France et non aux
États-Unis. L’administration est-elle plus rapide pour ses expatriés afin de
les faire revenir plus rapidement pour qu’ils paient leurs impôts ?
Mystère !
Une fois
le dossier accepté, la deuxième partie, beaucoup plus longue, démarre. Nous
avons sollicité un visa d’époux (spouse visa) afin que je sois en mesure de
travailler aux États-Unis. Pour les visas de ce type, le futur immigré doit
trouver un sponsor ayant une preuve de revenu aux États-Unis au dessus d’un
certain seuil. En général, le conjoint américain est le sponsor. Comme les
revenus de ma femme n’étaient pas imposables aux States, nous avons demandé à
une de ses amies de le faire. Finalement, une fois cette paperasse acceptée,
j’ai du prendre un rendez-vous auprès de l’ambassade américaine à Paris afin
d’achever les formalités administratives.
Avant
cela, on m’a prié de me rendre dans un centre médical parisien reconnu par les
autorités américaines pour une prise de sang (pour vérifier que je n’ai pas
contracté la syphilis) ainsi qu’une radio des poumons (pour la tuberculose).
Enfin, avant le rendez-vous à l’ambassade, la visite médicale est obligatoire,
non chez mon généraliste, mais chez un médecin agréé par l’ambassade (service
malaxage des testicules inclus).
Une fois
le visa en poche, il m’a suffit de le présenter aux services de l’immigration à
mon arrivée. Leur tampon a fait office de Green Card temporaire. Le précieux
sésame vert est arrivé par la poste un mois plus tard. J’ai également requis un
numéro de sécurité sociale lors de mes démarches ; elle est la condition
sine qua non pour accéder au marché du travail, en plus du visa adéquat ou de
la green card.
Dans mon
cas, l’avantage du « spouse visa » est que je n’ai (presque) rien eu
à faire. C’est ma femme qui s’est occupée de la gestion des taches
administratives. Ça tombe bien car comme pour Thomas Thévenoud, je souffre de
phobie administrative avérée.
Avez-vous eu des doutes ? Comment les avez-vous gérés
?
Si
trouver un logement ou m’exprimer en Anglais ne m’a relativement posé aucun
problème, mon principal doute s’est porté sur l’emploi. Quand vous avez une
famille et un emploi stable (ma femme et moi étions tous les deux embauchés en
CDI au Luxembourg), il n’est guère facile de tout plaquer pour faire son
baluchon, notamment avec un enfant à charge. Mais pour aller au bout de ses
rêves, il faut savoir prendre des risques ! Si nous n’étions pas partis
maintenant, nous n’aurions certainement jamais réalisé notre projet.
Nous
avons été hébergés pendant un mois et demi chez ma mère, puis pendant quelques
semaines chez mes beaux-parents (au passage, je remercie tout ce petit monde
d’avoir fait preuve de charité privée en nous accueillant). Il m’est déjà
arrivé de regarder mon fils d’un air désolé parce qu’il n’avait pas de chez lui
à proprement parler. Pour faire face à cette incertitude liée à l’emploi, il
suffit de s’accrocher et de ne pas perdre les pédales, croire en ses capacités
et saisir sa chance dès qu’une opportunité se présente. Nous sommes également
un couple solidaire, donc cela a aidé également. Ma femme et sa
positive-attitude à l’Américaine m’ont aidé à surmonter mes doutes. Bien que
cette transition n’ait pas été facile, nous avons vécu de notre épargne personnelle
pendant deux mois et non des allocations. Le libéral que je suis en tient une
certaine fierté !
Enfin,
le facteur chance a joué. Mon épouse s’est vu offrir un emploi deux semaines
après notre arrivée. Quant à moi, la réponse positive est tombée au bout de six
semaines.
Comme
disait Oscar Wilde, « il vaut mieux avoir des remords que des
regrets ». On ne vit qu’une fois.
Wally Gobetz_Boston Freedom Trail_Old State House(CC
BY-NC-ND 2.0)
Parlez-nous de votre quotidien : quelles différences
avec la France vous ont le plus marqué ?
Des différences assez classiques si je puis dire dont
certaines s’avèreraient suffisantes pour que notre Filoche national
fasse une attaque.
Quel
bonheur de pouvoir faire ses courses ou se balader dans un centre commercial le
dimanche ! Les « pharmacy/essentials », qui font office de
pharmacie et de supermarché, sont souvent ouvertes 24h/24. La deuxième
différence classique notoire est le système des pourboires. Dans les
restaurants, vous payez l’addition plus 20% de celle-ci pour le service
(réparti entre serveur, barman, cuisine et plonge). C’est un système que
j’affectionne, bien qu’il puisse paraître désarçonnant au premier abord. Le
serveur s’avère être votre allié car vous êtes son premier fournisseur de
ressource. Le pourboire s’applique également dans d’autres situations.
Néanmoins, en cas de doute, nous requérons l’aide de mon beau-père.
La messe
chrétienne du dimanche fait parti des mœurs aux États-Unis. Il n’est pas rare
de trouver plus d’une église dans un village, en fonction du type de service
religieux délivré (et selon la branche religieuse). L’Église fait office de
repère social (pas l’unique), et bien souvent les gens se retrouvent après la
messe pendant ce qu’on appelle le « coffee hour », une sorte de
troisième mi-temps chrétienne sans alcool. Chaque église dispose de son propre
code. Des femmes peuvent diriger la messe (elle sont pasteur ou ministre du
culte), d’autres acceptent de marier les homosexuels, etc… Bien que
non-croyant, j’ai déjà assisté à des messes et croyez-moi, il y a de
l’animation ! Nous sommes bien loin des curés made in France.
Je
terminerai cette liste un peu succincte par le logement. La plupart des
appartements ont l’air conditionné et le gros électro-ménager est déjà mis à
disposition du locataire. Et avec de la chance, l’immeuble aura même sa propre
salle de fitness.
Ah !
et pour l’anecdote, certaines stations services du Massachusetts ont encore des
pompistes qui font le plein et qui lavent les vitres des voitures.
Est-ce que vous vous sentez encore Français ?
Pourquoi ?
Après
deux mois d’expatriation seulement, je ne pense avoir eu assez de temps pour
m’aliéner ma propre culture, bien que j’ai pu intégrer certains éléments de la
culture américaine par le biais de ma femme et de son entourage. Je ne fais pas
de l’obtention de la citoyenneté américaine le Graal Ultime. Je souhaite rester
le Français intégré à la famille américaine. J’ai la chance de vivre avec une
Américaine, de connaître sa famille et ses amis et donc de me familiariser avec
l’ « American Way of Life » plus rapidement. J’hésite encore à
contacter des associations françaises. Le communautarisme, c’est vraiment très
peu pour moi.
Autre chose à dire ?
Pour
celles et ceux qui travaillent dans la finance et qui chercheraient à embellir
leur CV aux États-Unis, il faut savoir que Boston est l’un des principaux
centres financiers américains, bien que la ville soit moins développée dans ce
domaine que sa grande rivale New York. La Finance s’y est développée depuis les
années 70 et on retrouve des grands noms connus de la finance, tels que JP
Morgan, State Street ou PWC, pour ne citer qu’eux.
Michael Linden_Washington statue_Boston Public
Garden(CC BY-NC 2.0)
Source contrepoints.org
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