vendredi 21 février 2020

Ma vie d’expat’ en Bulgarie

Ma vie d’expat’ en Bulgarie

Le témoignage de Marc : « La réalité n’a pas du tout correspondu aux prévisions. Elle a été très, très largement supérieure et dans des dimensions que l’on n’aurait jamais pu imaginer. »


Edward Crompton_Sofia Bulgaria(CC BY-SA 2.0)

Tout d’abord je dois commencer par indiquer que j’ai été fortement marqué par le 1er mai 2004. Si vous ne savez pas à quoi correspond cette date, c’est que vous étiez à l’ouest… en Europe de l’ouest, car ce jour-là, 10 pays de la partie est de l’Europe faisaient leur entrée dans l’Union européenne dans une fête gigantesque à l’échelle d’un demi-continent où chacun se sentait uni de Szczecin à Prague en passant par Limassol.

Soirée de tous les malentendus où une ferveur réellement populaire s’exprimait dans le désir légitime de pouvoir vivre juste normalement. Si l’enthousiasme ne retomba pas immédiatement, les premiers doutes apparurent au fil des années et la journée du 1er mai prit avec le recul un sens d’autant plus grotesque que la déception commence à avoir une dimension tsunamiesque. Cette célébration fut le couronnement de la Fête et de la Communication sur le Réel qui lui ne changea que très peu. Pour autant, un esprit apparut ce jour-là et marqua ceux qui le vécurent.


Juan Verni_Sofia(CC BY-ND 2.0)

J’ai retrouvé par la suite cet esprit dans les soirées étudiantes underground improvisées dans des bunkers désaffectés d’Allemagne de l’est et dans les appartements des années 30 des petites villes polonaises qui n’en finissaient plus de se lézarder de décennies de non entretien et de ravalement noirâtre issu de toutes sortes de pollutions, où tout le monde était uni par la bière, le « basic English » et des bribes d’allemand.

C’est lors d’une de ces soirées au fin fond de la Moravie que j’ai rencontré celle qui allait devenir ma femme et qui s’est montrée bien rétive à mes vaines tentatives de lui parler en mauvais tchèque, pour la bonne raison qu’elle était Bulgare.

1 400 km plus à l’ouest, un mariage et quelques années plus tard, nous avions donc une vie d’une banalité affligeante en France : des horaires de travail à rallonge, un temps de trajet domicile travail interminable pour un petit logement hors de prix et surtout des carrières bloquées dans des fonctions subalternes, en dépit de très bons diplômes, dans des structures aussi pléthoriques que désorganisées.

Pourquoi j’ai quitté la France et je me suis expatrié
La décision de quitter la France me prit environ deux ans, car il était clair que recommencer sa vie à zéro à 35 ans équivaut à un départ sans retour. C’est donc armé de nos lettres de démission respectives, de 80 kilos d’excédent de bagage et de l’inébranlable sentiment que « ça va bien se passer » que nous avons débarqué à Sofia, car évidemment nous n’avions aucun plan une fois sur place.

La réalité n’a pas du tout correspondu à ces prévisions grossières. Elle a été très, très largement supérieure et dans des dimensions que l’on n’aurait jamais pu imaginer.

Disons-le tout de suite, émigrer dans un pays où 50 % de la population active a quitté le pays pour des raisons économiques va vous heurter à des questions interminables sur le choix de la Bulgarie, pour finir par un regard persistant d’incompréhension, voire de colère pour les plus jeunes ou pour ceux qui auront sacrifié 10 à 15 ans de leur vie pour envoyer leur enfant « à l’Ouest ». Quitter un pays où « l’on respire des bulles de champagne dans la rue » pour venir ici est globalement assez incompréhensible pour ceux qui n’ont pas vécu à l’étranger.

Il sera alors utile d’utiliser les préjugés locaux pour couper court à toute discussion stérile en précisant être venu par amour, ce qui sera « tellement romantique et tellement français ».

La Bulgarie, paradis pour un entrepreneur ?
Ces considérations mises à part, la Bulgarie est un des meilleurs pays pour créer une entreprise. Des conditions fiscales imbattables avec une flat tax à 10 %, du personnel bien formé et bon marché, et surtout ce qui est le plus important, un coût de la vie faible. En effet, on peut vivre à peu près normalement pendant un an avec 5 000 à 6 000 euros, ce qui fait qu’il est possible de tenir sans client et sans salaire pendant une durée largement plus longue qu’en France, sans avoir à assumer les conséquences d’un emprunt bancaire colossal ou de subventions publiques très consommatrices de temps qui sera perdu pour exercer son vrai métier.

Au final, créer la société aura nécessité 500 euros de frais divers, 2 500 euros de capital dont seulement 100 euros auront été réellement dépensés avant de commencer à gagner de l’argent.

Deux ans plus tard, nous avons 8 salariés, renforcés par 2 à 7 freelance selon les semaines, de beaux bénéfices, des bureaux modernes dernier cri, des projets plein la tête et le sentiment que tout est possible, qu’il suffit juste de lever la main pour attraper la lune.
Un tel résultat n’aurait jamais été possible en France.


Trabant Monument (CC BY-NC-ND 2.0)


Source contrepoints.org

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