L’Etat inutile…
J’ai
demandé à un ami résidant en Chine comment fonctionne leur système postal. Sa
réponse a été éclairante. Il existe un système public de courrier, la Poste de
Chine. C’est une immense bureaucratie officielle qui transporte le courrier de
façon très traditionnelle. Elle est née dans les années 1870.
Mais
aujourd’hui, pratiquement plus personne ne l’utilise pour quoi que ce soit.
Elle est bien présente. Ses camions circulent. Ses agences postales se trouvent
ici et là, et ses bureaucrates musardent à gauche et à droite. Mais quasiment
tout le monde, des particuliers aux entreprises, utilise à la place des
services postaux privés. Il y en a des douzaines, voire des centaines, tous
spécialisés dans une chose ou l’autre. Il s’en crée de nouveaux toutes les
semaines.
Pourquoi
les gens les utilisent ? Ces services privés proposent le suivi de vos lettres
et colis. Ils sont rapides. Ils relèvent votre courrier n’importe où et presque
instantanément. Ils sont si compétitifs que leurs prix baissent
continuellement. C’est un marché en plein boom, qui ridiculise totalement le
service du gouvernement, par contraste.
Ces
entrepreneurs, qui ont innové en dépit des monopoles et des réglementations,
ont accru les opportunités, la prospérité et la liberté de leurs clients. Les
gens ne sont plus prisonniers des choix que leur accorde leur gouvernement. Ils
peuvent quitter le système pour se trouver de nouvelles façons plus appropriées
de vivre. C’est là l’essentiel de ce que signifie être libre.
Pourtant
le gouvernement chinois persiste de son côté, de moins en moins pertinent.
Combien de temps va-t-il maintenir cette pure apparence ? Probablement un bon
moment, voire plus. Mais ses services seront de plus en plus obsolètes,
inadéquats, inadaptables, inefficients et très largement oubliés des citoyens
chinois, et donc en permanence menacés de disparition.
Aux USA,
un phénomène similaire est en cours. Le Service Postal ne cesse de réduire son
activité. Il ferme des agences. Il réduit son offre. De temps en temps il
délègue à des services privés, d’autres fois il les écrase de son monopole
légal – tous les moyens lui sont bons pour prolonger son existence un jour de
plus.
Les
secteurs privé et public continuent de coexister. Mais lequel a la faveur de
l’Histoire ? Les services qui améliorent les conditions de vie demeurent, et
les autres s’épuisent, s’étiolent et meurent, même quand ils sont financés par
l’État.
Le
gouvernement peut maintenir longtemps en activité un service inutile, mais pas
indéfiniment. Le progrès technique est une force irrépressible. Le gouvernement
peut ralentir ses effets mais pas l’arrêter complètement. Le secteur privé
devient de plus en plus remarquable tandis que les services de l’État – partout
dans le monde – ne cessent de se dégrader.
Cette
tendance se répand partout. Elle affecte les transports de masse, là où les
initiatives privées dévorent petit à petit l’État et ses monopoles. Elle
affecte les télécoms, où en l’espace de quelques décennies nous sommes passés
de boîtiers accrochés au mur et loués à l’État, à ces fabuleux dépôts de savoir
accessibles n’importe quand, dans votre poche.
Elle
affecte aussi l’éducation (dans ce domaine, l’instruction publique est presque
toujours un pis-aller), les retraites (reste-t-il quelqu’un de moins de 50 ans
pour croire encore qu’il touchera une retraite publique décente ?), les
assurances santé (où monopole public rime avec scandale public et déficit
public), et la sécurité (où l’État lui-même fait appel à des services privés).
Dans
tous les aspects de la vie, cette tendance se fait de plus en plus évidente et
intense, grâce à la révolution numérique qui repousse les frontières de ce que
les entrepreneurs peuvent accomplir, bien au-delà de ce que l’État parvient à
faire. Ces innovations nouvelles ont pris une place essentielle dans nos vies.
Ainsi,
grâce au marché des applis, nous avons accès à des univers entiers de musique,
nous pouvons tracer nos rythmes de sommeil, apprendre à jouer d’un instrument
de musique, trouver notre chemin dans n’importe quelle ville, depuis un
smartphone. Grâce aux réseaux sociaux nous pouvons aisément vendre des objets,
mettre en location une pièce, appeler un chauffeur, suivre des cours avec les
meilleurs enseignants – ou à l’inverse acheter des objets, louer une chambre,
se faire payer pour un trajet, ou enseigner. Les outils pour faire tout ça sont
accessibles à tout le monde, et permettent de contourner les gouvernements.
Il
existe un chemin vers la liberté, plus efficace que toute l’action politique
possible. Partout dans le monde, les gens souffrent du poids d’une
administration centralisée, de ses réglementations, ses taxes et impôts, ses
barrières aux échanges et à l’entraide, ses monopoles sur l’instruction, son
système bancaire, et tant d’autres aspects. Les gens réclament plus d’espace
pour vivre, créer et servir. Mais comment aller d’ici à là ? L’innovation est
la voie productive qui est en train de faire toute la différence.
Prenons
un peu de recul et posons-nous une question fondamentale sur l’État. Pourquoi
l’État fournit-il le moindre service ? Pourquoi l’élite politique et les agents
de la bureaucratie ne se contentent-ils pas juste de prendre notre argent pour
vivre à nos frais toute leur vie ? Pourquoi prennent-ils la peine de paraître
faire quoi que ce soit pour nous, comme maintenir la paix, protéger
l’environnement, punir les criminels et nous freiner dans nos élans
auto-destructeurs ?
L’État
s’économiserait à ne rien faire de tout ça. Au lieu de prendre le risque de
prétendre faire des choses pour nous, pour la gloire, il pourrait simplement
fonctionner comme un pur parasite de la société civile.
Mais il
y a un problème avec cela : les États ont besoin du soutien du
peuple, même implicitement. Aucun gouvernement ne peut régner uniquement par la
force. Le contrôle dépend absolument de la conquête des esprits et des cœurs.
Seul l’engagement culturel profond envers la raison du plus nombreux garantit
la stabilité de l’État et prévient l’insurrection et la révolution. C’est la
raison fondamentale pour laquelle le gouvernement étend sans cesse la liste des
choses par lesquelles il se gonfle de grandeur.
Mais
voyez aussi ce qu’il se passe lorsque la grandeur s’essouffle, quand les
mesures de sécurité, les systèmes bancaires et monétaires, les systèmes
éducatifs, de réglementation, de retraite, de protection de l’environnement et
les bureaucraties du travail sous-performent très visiblement par rapport à
leurs alternatives privées. Naturellement et logiquement, les gens se mettent
alors à s’éloigner de ce qui ne fonctionne pas, au bénéfice de ce qui marche,
purement par la poursuite de leurs intérêts.
Ils
peuvent bien bâtir un État. Mais ils ne peuvent pas forcer les gens à
l’utiliser, surtout s’il existe des alternatives préférables. Il y a
aujourd’hui des milliers voire des millions de façons de quitter le Léviathan.
Ces solutions sont partout, des voitures avec chauffeur d’Uber au Bitcoin en
passant par l’école libre, les services médicaux privés et les pharmacies en
ligne ou encore les parcs naturels privés.
Citez
n’importe quel service prétendument essentiel que l’État a fourni au XXème
siècle et vous pourrez en trouver un moins cher, plus efficace, plus innovant
et plus disponible parmi les alternatives du secteur privé. Il n’y a rien que
les États font, que le marché libre ne peut pas mieux faire. C’est ce que
démontre chaque jour davantage la trajectoire technologique actuelle.
Cela
engendre l’instabilité politique. Un changement de paradigme. L’obsolescence du
secteur public. La futilité croissante du pouvoir. De moins en moins de
pertinence, et donc de moins en moins de loyauté, pour la structure coercitive
de l’autorité, remplacée par la dépendance culturelle, économique et sociale
envers les systèmes que la société civile se crée pour ses propres besoins. La
tolérance envers les taxes, la sujétion, la surveillance de masse, la
réglementation et la guerre a entamé son déclin. A long terme tout cela mourra
faute de soutien populaire. Voici l’histoire de la prévalence de la liberté
humaine contre la tyrannie, qui pourrait bien s’inscrire dans notre
court-terme.
C’est la
voie pacifique vers la réforme. Une voie incertaine, certes, mais on voit dans
le monde d’aujourd’hui que c’est cette voie qui répond le mieux aux besoins
humains et aussi celle qui menace le plus sérieusement nos élites politiques.
La classe dirigeante ne se laissera pas rejeter sans combattre, mais de plus en
plus, les peuples qu’elle affronte sont ceux qui découvrent déjà qu’il y a bien
mieux que d’essayer de vivre aux dépens des autres.
c'est vrai que la poste d'état à paris n'est guère nécessaire, mais pour la mamie au fin fond de la creuse ou le paysan de l'ariège, c'est parfois vital
RépondreSupprimermonique grenoble