La lésion musculaire
La lésion « musculaire » est omniprésente chez le
sportif. Les lésions intrinsèques, c’est-à-dire propres à la structure du
muscle, représentent 30 % des lésions sportives. Les comprendre, les prévenir
et les traiter deviennent une nécessité.
Par Nicolas FAURE, kinésithérapeute
Plusieurs
classifications de lésions dites « musculaires » ont vu le jour avec
l’utilisation des termes « élongation », « claquage » et « déchirure ». La
définition des lésions « musculaires » a évolué en passant de l’atteinte pure
de la fibre musculaire à un décollement de celle-ci, avec son tissu
aponévrotique. Le tissu aponévrotique est une structure dense et fibreuse. Il
permet d’organiser l’architecture du muscle, comme un tissu de soutien. Par
comparaison avec une feuille d’arbre : les fibres musculaires seraient la
partie verte de la feuille, et les nervures seraient les cloisons
aponévrotiques où se rattachent les fibres. Ainsi on est passé de la lésion «
musculaire » à la lésion musculo-aponévrotique (LMA).
- Qu’ont permis les progrès en imagerie médicale ?
La conception du
muscle en lui-même a évolué grâce aux avancées en échographie et en IRM.
Dorénavant, les recherches s’intéressent à la fibre musculaire et aux
structures conjonctives (cloisons aponévrotiques centrales ou périphériques)
ainsi qu’au lien qui les unit : les protéines de liaison. Les protéines de
liaison sont des molécules de taille importante qui constituent le point
d’attache entre le muscle et l’aponévrose. À ce jour, les lésions se situent
dans trois localisations : la lésion musculoaponévrotique centrale ou celle
périphérique dans le cas où la fibre musculaire se détache de sa cloison
centrale ou périphérique, et la lésion myotendineuse qui atteint la fibre et le
tendon.
- Quels sont les mécanismes responsables de la lésion musculoaponévrotique ?
Deux mécanismes dans
la lésion musculoaponévrotique sont reconnus : l’overstretching et le travail
excentrique. Le mouvement d’overstretching constitue un étirement maximal et
rapide du muscle. Dans le cas d’une lésion, l’étirement dépasse les capacités d’allongement
du muscle. On parle de capacité viscoélastique. Un muscle ne peut pas
s’allonger au-delà de sa capacité, sinon il « casse ». Le point de rupture se
situe au point d’intimité myoaponévrotique. Le travail excentrique est un
mouvement de freinage dans lequel une contraction est effectuée en même temps
qu’un étirement progressif. Ce geste vient déclencher un cycle de
destruction/construction des protéines de liaison. Prenons l’exemple de la
lésion des ischio-jambiers chez le sprinteur : le mécanisme lésionnel n’est pas
l’étirement maximal des ischio-jambiers mais leur contraction musculaire
intense en excentrique durant l’effort.
- Que faire après une lésion myoaponévrotique ?
Durant les deux
premiers jours, vous devez mettre en place le protocole RICE : repos, froid
(Ice), compression, élévation. Le froid s’applique par l’intermédiaire d’un
pack, d’une vessie de glace ou bien d’une poche de petits pois congelés. Entre
la peau et le froid, n’oubliez pas d’interposer un linge pour ne pas vous
brûler l’épiderme. Puis laissez agir 10-15 minutes ! Passé ce délai, la
température locale ne diminue plus de manière significative. Vous pouvez
enlever la glace. L’utilisation du froid est à renouveler plusieurs fois dans
la journée. La cryothérapie gazeuse n’est pas recommandée dans le cas d’une
lésion musculo-aponévrotique parce que l’hypothermie vient léser les cellules
satellites ou « de MAURO », ces dernières étant à l’origine de la
reconstruction de la fibre musculaire. Après une lésion musculo-aponévrotique,
pensez aussi à comprimer la zone lésée à l’aide de bandes, afin de limiter
l’étendue de l’inflammation. Ne pressez pas trop fort pour ne pas diminuer la
vascularisation sur la zone lésée ! Sinon, vous risquez d’entraîner un retard
de cicatrisation. Enfin, toute compression est à proscrire la nuit ! Le sommeil
joue un rôle dans la cicatrisation musculaire. À l’heure actuelle, des études
montrent l’intérêt de certaines hormones de croissance dans la multiplication
des cellules « mères » des nouvelles fibres musculaires : les cellules
satellites. Il se trouve que ces hormones circulent en plus grande quantité
dans la phase de sommeil profond de 23h à 2h du matin et de 12h à 15 h. Ainsi,
optimiser ce phénomène, consiste à se coucher avant minuit et à faire de
courtes siestes la journée. Pour lutter contre la douleur, vous pouvez utiliser
des antalgiques. En revanche, les anti-inflammatoires non stéroïdiens
interviendraient de façon délétère dans la cicatrisation. Dans les heures
suivant la lésion, un nettoyage des éléments nécrosés est assuré par des
cellules inflammatoires nommées « macrophages ». La qualité de la cicatrisation
musculaire est dépendante de la mise en jeu de cette réaction inflammatoire.
Gardez en tête que vasculariser et mobiliser sont les éléments clés d’une bonne
cicatrisation musculaire ! La première semaine, vous devrez irriguer
abondamment la zone lésée par des massages, de l’électrothérapie (courant par
capillarisation) et des contractions musculaires infra-douloureuses. La
mobilisation précoce permet de favoriser la résorption de l’œdème, une
prolifération de capillaires sanguins et une organisation parallèle des
nouvelles fibres musculaires. Mobiliser précocement permet ainsi d’obtenir une
cicatrice musculaire de bonne qualité ! Une mobilisation, passive dans un
premier temps, évoluera vers un travail actif, avec la reprise du vélo le
quatrième jour et de jogging aux alentours du dixième jour. Dès le troisième
jour, vous ajouterez une mobilisation active en traction, par le travail
excentrique. Ce dernier est un travail freinateur. Lors d’un shoot au football,
les muscles ischio-jambiers, situés en arrière de la cuisse, viennent freiner
l’extension du genou pour protéger l’articulation. Les ischio-jambiers
permettent ainsi de fléchir le genou et d’emmener la hanche en extension. Des
études affirment que le régime de contraction excentrique localisé autour de la
lésion agit sur les protéines de liaison. En travaillant de cette manière, vous
détruirez ces protéines de liaison afin de reconstruire ces mêmes molécules en
qualité et quantité plus importantes. Vous augmenterez ainsi la
résistance des points d’attaches entre la fibre musculaire et l’aponévrose.
L’autre argument en faveur du travail excentrique est le recul du point de
rupture viscoélastique, c’est-à-dire que le muscle aura une capacité plus
importante à supporter un étirement maximal. Le renforcement excentrique
s’organisera dès le troisième jour avec une séance par jour pendant trois
jours, pour ensuite passer à une séance tous les 2-3 jours. Sur une lésion
myoaponévrotique, vous devrez être attentif au respect de la non-douleur
pendant et après le travail excentrique. Les séances débuteront à vitesse lente
avec des charges progressives, pour finir avec des charges plus lourdes à
vitesse rapide. Actuellement, des études récentes sur le taux de blessure
musculaire dans des clubs de football, montrent le bénéfice du travail excentrique
en pré-saison. « Mieux vaut prévenir que guérir ! »
- Le travail excentrique intervient à 3 niveaux sur la structure myoaponévrotique :
-Sur la fibre
musculaire directement, en augmentant le nombre de sarcomères. Le sarcomère est
le tissu contractile du muscle.
- Sur le tissu
aponévrotique. Le travail excentrique vient augmenter la résistance à
l’étirement de ce tissu.
- Sur la jonction
myoaponévrotique. Cette jonction correspond aux protéines de liaison. Elles
sont produites en quantité plus importante et de meilleure qualité, ce qui rend
la jonction myoaponévrotique plus forte. Dû à ces trois actions, le travail
excentrique peut provoquer l’apparition de douleurs musculaires d’apparition
retardée. Elles sont présentes lorsque le travail excentrique est trop fort ou
fait de manière trop prolongée. Les douleurs musculaires sont maximales au bout
de 48h. La symptomatologie est décrite par une raideur des douleurs et une
diminution de la force. Elles disparaissent spontanément après une semaine.
Source SantéSportMag
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