Robert Capa
Son crédo de photographe : s'approcher toujours plus de ses
sujets. France Culture a retracé le parcours de cet aventurier, cofondateur de
l'agence Magnum, devenu mythique.
Robert Capa durant la bataille de Seégovie, au
printemps 1937. Photo : Gerda Taro
« Si ta photo n'est pas bonne,
c'est que tu n'étais pas assez près »... Ainsi parlait Robert Capa.
Américain d'origine hongroise, l'homme est entré dans l'histoire : avec son
style très personnel et son parcours aussi romanesque qu'un conte moderne, il
fut l'un des pères du photojournalisme. C'est cette épopée-là que retrace
l'émission, à travers récits, musiques d'époque et témoignages — dont celui
d'Henri Cartier-Bresson. Le sujet est riche : on y apprend, par exemple, que
Capa, reporter de terrain mais aussi très mondain, fut le premier artisan de sa
propre légende. Il commença par adopter un pseudonyme digne du cinéma
américain : le regard charbonneux, les cheveux gominés et une allure folle, le
photographe troqua son nom d'Endre Erno Friedmann pour un patronyme proche de
celui du réalisateur Frank Capra — la variante « Capa » qui signifie... «
requin » en hongrois.
Personnalité hors norme. Trajectoire aussi. Le présentateur
Matthieu Garrigou-Lagrange nous en rappelle ici quelques épisodes clés :
manifestations du Front populaire en 1936, guerre d'Espagne la même année...
Un milicien s'effondre devant son objectif, mortellement touché par une balle ;
l'image fait le tour du monde et assoit sa notoriété. Robert Capa part ensuite
couvrir le débarquement sur la plage d'Omaha Beach : 6 juin 1944, six heures
passées sous les bombes et les balles... Il brave sa peur sans la renier — « J'essayai de me convaincre que le débarquement
serait un jeu d'enfant et que tous ces racontars sur le mur imprenable
n'étaient que de la propagande allemande. » Il est le seul à en ramener
des photos. Mais une erreur au laboratoire ne permet de sauver qu'une dizaine
de clichés légèrement flous, légendés «
slightly out of focus » (« un peu flou ») — termes qu'il reprendra plus
tard comme titre de son autobiographie, publiée en 1947.
Si l'émission fait mouche, c'est qu'elle parvient à dépasser le
simple portrait ; elle agit comme un révélateur. A travers les analyses de
divers spécialistes, Matthieu Garrigou-Lagrange s'attache surtout à cerner le
sens d'une vie et d'une œuvre. Que retiendra-t-on de Capa ? Qu'outre son talent
il était profondément joueur. Pas étonnant que ses aventures et son charisme
aient inspiré les romanciers, Ernest Hemingway (Pour
qui sonne le glas), Romain Gary (Les
Racines du ciel), Patrick Modiano (Chien
de printemps) ; ou les cinéastes (il servit de modèle pour le héros de Fenêtre sur cour ou d'Un envoyé très spécial, interprété par Clark Gable).
Aujourd'hui encore, le personnage fascine : Michael
Mann adapte le roman de Susana Fortes En attendant Robert Capa, Yvan Attal se penche sur l'expérience israélienne du
photographe, et Pierce Brosnan produit un
portrait du reporter de guerre qui fonda l'agence Magnum, aux côtés, notamment,
de Cartier-Bresson. Ce dernier disait de lui : « Capa est un aventurier avec une éthique. » Toujours au plus près de l'image... Le 25 mai 1954, en
Indochine, Robert Capa marcha sur une mine. Début du mythe.
Robert Capa et Gerda Taro
Source Carole Lefrançois (Télérama)
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