vendredi 18 janvier 2019

Billets-Cette administration qui vous pourrit la vie


Cette administration qui vous pourrit la vie

Les élites qui sont supposées apporter des solutions ne font que camoufler, perpétuer ou aggraver les problèmes.

Sans surprise depuis un billet de début 2014, les événements nous rapprochant de l’avènement d’une planète de plus en plus orwellienne se sont multipliés.

Chaque semaine de nouvelles lois sclérosantes, abusives, inquisitrices, spoliatrices sont votées par des gouvernements aux abois ou imposées par des technocrates non élus. Notre planète est au bord de l’abîme à cause de l’endettement excessif des États, des risques insensés et tolérés pris par les banques, de l’emprise de la bureaucratie sur le secteur privé, des folies monétaires des banques centrales… et les initiatives des élites qui sont supposées apporter des solutions ne font que camoufler, perpétuer ou aggraver les problèmes.
Inquisition administrative
Comment penser par exemple que l’économie peut se porter mieux alors que le moindre mouvement de capital, la moindre ouverture de compte sont à présent soumis à une véritable inquisition administrative ?

Aujourd’hui de nombreuses banques situées dans des pays européens refusent de transférer des sommes de plusieurs centaines de milliers d’euros (dont l’origine légitime est pourtant facilement vérifiable) vers des comptes déclarés en Suisse car cela pose de trop gros problèmes à leurs services de compliance (s’assurant de la légalité d’un virement). Au point que même des branches d’UBS, une banque Suisse, refusent l’opération.

De même, de nombreuses banques européennes clôturent les comptes de leurs clients, même Français, présentant des indices d’américanité à cause de la loi FATCA. Un résident étranger, même européen, possédant un compte dans une banque européenne se voit obligé de répondre chaque année à une batterie de questions inquisitrices sur son activité.
Une administration déshumanisée
Non contents de bénéficier de moyens humains et financiers en augmentation constante, les armadas d’inquisiteurs de l’administration et leur bras législatif imposent au secteur privé une part croissante du travail de contrôle, faisant de ses acteurs des collaborateurs contraints et gratuits et des délateurs forcés. Paralysant ou handicapant fortement les mouvements des individus ou entreprises par leurs contrôles, ils alourdissent aussi considérablement les coûts des institutions financières et des entreprises auxquelles ils imposent la charge de leur inquisition.

Des impôts et taxes en augmentation exponentielle devraient au moins être justifiés par une amélioration proportionnelle du service aux citoyens. Il n’en est rien, bien au contraire. Plus les années passent plus le fonctionnaire est un être inaccessible, impossible à rencontrer physiquement, de plus en plus difficile à avoir au téléphone. Les répondeurs téléphoniques dont les options ne correspondent pas à votre cas personnel ont envahi le paysage et donnent souvent l’impression de vouloir se débarrasser de vous à la première occasion.
Le comble de l’absurde est atteint dans certains cas : en Angleterre il y a quelques années, alors que je ne parvenais pas à obtenir une personne renseignée au téléphone de HMRC (services fiscaux) pour mon cas particulier, j’ai décidé de me rendre directement à l’une de leurs antennes. Une fois sur place, je me suis retrouvé face à 3 employées qui se tournaient les pouces à l’entrée d’un vaste espace. Lorsque j’ai demandé à parler à quelqu’un, une d’entre elles a écrit un numéro de téléphone sur un bout de papier arraché, en m’indiquant 3 cabines téléphoniques installées sur l’un des murs de l’espace. Surpris, j’ai composé le numéro et atterri au même numéro que j’avais composé une dizaine de fois depuis chez moi. Autrement dit, les services fiscaux anglais gaspillaient l’argent du contribuable en louant des espaces d’accueil bien placés, pour renvoyer les administrés au numéro de téléphone standard disponible sur leur site internet !
Soulager le fonctionnaire et maintenir son statut
Le sentiment est ainsi de plus en plus répandu dans la population que les fonctionnaires n’organisent pas l’administration de manière à faciliter le service des citoyens, comme cela devrait être le cas, mais de manière à protéger à tout prix leur petit travail tranquille. Tout est pensé pour transférer la pression, l’inconfort et la frustration sur l’administré et soulager au mieux le fonctionnaire du désagrément d’avoir à composer avec les ennuyeuses requêtes et problématiques de l’administré.

De même, il devient de plus en plus évident que bien des décisions législatives et politiques ne visent pas à augmenter l’efficacité de l’administration au profit de l’administré, mais à justifier le maintien ou l’augmentation du nombre de fonctionnaires vivant aux dépends de celui-ci. La caste des administrateurs, depuis l’énarque au pouvoir jusqu’au petit fonctionnaire, travaille essentiellement à augmenter ou maintenir ses effectifs à travers :

  • des textes de lois toujours plus alambiqués, générant des usines à gaz administratives et judiciaires
  • des obligations toujours plus nombreuses (propriétaires loueurs, automobilistes, professions diverses…)
  • une propagande digne de la Chine communiste au sujet des paradis et fraudeurs fiscaux justifiant des lois toujours plus inquisitrices, nécessitant toujours plus de fonctionnaires pour les contrôles nécessaires et les services de régularisation,
  • l’exploitation du terrorisme comme prétexte à des contrôles toujours plus drastiques,
  • le non-respect de l’équilibre budgétaire, en conflit frontal avec le maintien du train de vie de l’État.

Nous avons évoqué la loi FATCA, monument Orwellien, mais il y a aussi la Norme d’échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers en matière fiscale de l’OCDE, qui implique que les gouvernements obtiennent une information détaillée de leurs institutions financières et échangent automatiquement cette information avec les autres juridictions sur une base annuelle. Un total de 89 pays se sont compromis à appliquer le standard.
Un coût considérable
Il est bien évident que le coût en moyens humains et informatiques pour traiter et échanger toute cette information sera considérable, et permettra de consolider et vraisemblablement augmenter le nombre de fonctionnaires des ministères concernés. Sans compter le coût des multiples réunions nécessaires pour accoucher de tels accords et standards, et le coût des machins-trucs créés ad hoc. Comme le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales qui compte désormais 125 membres sur un pied d’égalité et est le premier organisme international ayant pour but d’assurer l’application des normes convenues au niveau international de transparence et d’échange de renseignements dans le domaine fiscal. À travers un processus approfondi d’examen par les pairs, le Forum mondial restructuré surveille le fait que ses membres appliquent pleinement la norme de transparence et d’échange de renseignements qu’ils se sont engagés à mettre en œuvre. Il travaille également pour établir des règles du jeu équitables, y compris parmi les pays qui n’ont pas rejoint le Forum mondial.

Pour le secteur privé, au coût du financement de ces machins-trucs et de leurs actions inquisitrices s’ajoute la charge considérable des services internes ou externes assurant aux entreprises d’être en règle avec les nouveaux critères imposés.

Comment ne pas penser que le gain en termes de récupération de taxes suite aux nouveaux contrôles et sanctions est infiniment inférieur au coût et à la perte économique impliqués par cette machinerie orwellienne ?

Mais encore une fois tout prend un sens lorsqu’il est bien compris que pour les élites, peu importe le coût, les dégâts sur les secteurs pourvoyeurs de richesses et d’emploi, les atteintes aux libertés les plus élémentaires… pourvu que le système qui les engraisse et les privilégie se perpétue le plus longtemps possible, étende si possible son emprise et dans le pire des cas ne perde pas de terrain.

L’an dernier BFM business écrivait sans surprendre :
« la France n’a jamais compté autant de fonctionnaires de toute son histoire selon les statistiques les plus récentes de l’Insee, (…) arrêtées à décembre 2013. L’ensemble des trois versants de la fonction publique (État, Hôpitaux et collectivités territoriales) comptaient ainsi 5,6 millions d’employés, soit 1,5% de plus qu’en 2012. En enlevant les contrats aidés, au nombre de 183.500, les effectifs des salariés à la charge des finances publiques s’élevaient à 5,41 millions ce qui était simplement un plus haut historique. » (BFM Business 17/04/15)

En vérifiant les derniers chiffres sur le site de l’INSEE, au cas où il y aurait du mieux fin 2014, nous apprenons qu’ « Au 31 décembre 2014, 5,6 millions de salariés travaillent dans la fonction publique en France. Les effectifs continuent de progresser, mais sur un rythme moindre qu’au cours de 2013. Dans la fonction publique de l’État l’emploi est stable, la hausse des effectifs des établissements publics (+ 2,5 %) compensant la baisse de ceux des ministères (- 0,7 %). Dans les deux autres versants, l’emploi continue de progresser : + 0,9 % dans la fonction publique hospitalière et + 1,5 % dans la fonction publique territoriale. En 2014, le nombre de fonctionnaires augmente dans les trois versants de la fonction publique. »

Il y a du mieux à en croire le texte de l’INSEE, mais dans le sens d’une augmentation des effectifs dans un pays qui bat tous les records de fonctionnaires et de prélèvements du secteur public sur le secteur privé.
Et en Angleterre ?
Essayons l’Angleterre où des efforts réels et très mal vécus par l’opposition ont été entrepris :

en 2012 la coalition menée par Cameron s’est engagée à réduire le nombre des fonctionnaires de 23% au cours de la législature. Entre 2010 et début 2016 leur nombre est tombé de 487 000 a 393 000. Pas mal. Seulement voilà : les fonctionnaires d’État sont une proportion mineure comparé aux autres parties du gouvernement central qui totalisent plus de 2 millions d’effectifs et les gouvernements locaux qui en totalisent presque 2 millions. Dans l’ensemble, ces effectifs ont peu bougé et ont même augmenté dans l’éducation.

Mais il faut surtout remettre les choses en perspective :  comme le rappelait Philip Booth le 29 octobre 2015 dans City AM :

« … la dépense étatique est passée de 10% du PIB au début du XXe siècle à 50% aujourd’hui. 13% des emplois requièrent une forme ou une autre de licence, enregistrement ou certification de la part du gouvernement, une proportion qui a doublée pendant la dernière décennie.  En 1980, il y avait un régulateur pour 11000 personnes travaillant dans le secteur financier. En 2011 il y en avait 1 pour 300 ! À ce rythme il y aura plus de régulateurs que de travailleurs dans 60 ans ! En Écosse, la croissance de l’État régulateur atteint des proportions inquiétantes : à partir de l’année prochaine, chaque enfant Écossais aura un gardien d’État. »

Voilà pour ce bastion du néolibéralisme qu’adorent détester nos gardiens du temple de la cohésion sociale.

Parmi les dernières trouvailles savoureuses des technocrates anglais, l’obligation d’une homologation coûtant 1000 £ pour les masseuses, les obligeant à étudier anatomie et mots anglais, alors que la plupart des masseuses exerçant à Londres sont des Thaïs ou des Chinoises formées dans les meilleures écoles de massage du monde et dont les clients se contrefoutent qu’elles sachent nommer le triceps brachial.

Parlons bien sûr des fonctionnaires europées dont les diktats et privilèges ont fortement contribué au Brexit. Comme l’écrivait le quotiden belge Le Peuple en décembre dernier :

« 10 000 fonctionnaires européens gagnent plus que Charles Michel ou David Cameron ! Cela a fait les titres de la presse britannique… Au moment où, dans tous les pays membres, on cherche à réduire le nombre des fonctionnaires, la bureaucratie européenne a augmenté ses effectifs de 60 % en dix ans. Rien que cette année, le nombre de juges européens, rétribués 18600 euros par mois, a pratiquement doublé.

Les fonctionnaires européens paient des charges sociales et des impôts, mais à l’Europe. L’impôt est calculé sur 90 % du salaire de base. Il ne tient, donc, pas compte, notamment, des 16 % de prime, versés à tous les fonctionnaires européens au titre de l’éloignement de leur pays et le taux d’imposition est très faible. »

Toujours plus de fonctionnaires aux privilèges financés par nos impôts et dont le travail a souvent pour résultat de nous pourrir la vie, comme l’exprime fort bien Simone Wapler :

« Voici le panel de lois et réglementation d’un Européen qui, à peine réveillé mais bien régulé, quitte son lit : 5 directives sur les oreillers, 109 sur le contenu dudit oreiller, 11 sur les réveils matins et 135 sur les tables de chevet, 65 sur la salle de bain, 31 sur les brosses à dents, 172 sur les miroirs, 1 246 sur le pain de son petit-déjeuner et 12 653 sur le lait… Ceci a conduit à un renchérissement de notre vie quotidienne et à une croissance atone. C’est l’Europe aux 10 000 fonctionnaires, mieux payés que le Premier ministre britannique et exonérés d’impôts, que les Britanniques ont rejeté. »

(…) « Partout, le bon peuple se rebiffe contre la technocratie, la bureaucratie, les normes et standards européens qui lui renchérissent la vie… lorsqu’ils ne la lui pourrissent pas.On lui avait vendu un espace libre d’échanges commerciaux sans barrière douanière, un marché commun. Il se réveille avec une réglementation psychorigide, un espace ultra réglementé dont seules quelques multinationales rompues au lobbying et quelques grands groupes capables de payer des armées de juristes sont capable de profiter. »
Et en Amérique Latine ?
Passons en Amérique du Sud et prenons le cas du Brésil en citant Antony P. Mueller, professeur d’économie a l’Université Fédérale de Sergipe (UFS) :

« À la lumière de mes observations sur l’Amérique Latine et le Brésil en particulier, je suis forcé de conclure qu’il y a encore de vastes barrières psychologiques et mentales qui empêchent une prospérité durable. La domination idéologique de l’étatisme, du socialisme et de l’interventionnisme est présente dans toutes les couches de la société Brésilienne – pas seulement au niveau académique mais aussi dans la communauté des affaires.  

La bureaucratie est un cauchemar sans fin. Les impôts sont élevés et peu performants. L’éducation publique est dans un état lamentable. Le système judiciaire est incapable de faire face à une montagne de dossiers non jugés, et en même temps les juges et autres autorités judiciaires jouissent de privilèges exorbitants. Les salaires dans le système judiciaire sont astronomiques comparés au salaire moyen des Brésiliens les plus modestes. 
Le secteur public est en général extrêmement inefficace et constitue un eldorado pour les chasseurs de rentes. Je ne m’attends pas a ce que cela soit résolu dans les années à venir. Je crains que cela ne soit guère différent dans d’autres pays BRIC. Ils sont tous coincés dans le ‘middle income trap’,  car ils sont apparemment incapables de passer d’un système étatiste à un système basé sur le marché libre. »

Socialisme, étatisme et interventionnisme sont les chevaux de Troie des élites ponctionnaires. Aujourd’hui plus que jamais elles servent de prétexte à une progression larvée mais décisive de leur pouvoir de parasitage. Mais pour pouvoir faire avancer leur programme en dépit du peuple, ou quelquefois en se servant de ses émotions, les élites ont besoin de s’affranchir de la démocratie, de rendre les problèmes complexes pour voiler l’évidence de leur scandale, ou de se servir de la peur. Nous allons développer certains de ces points dans la deuxième partie de cet article.

Photo La dictature des ponctionnaires By: Frédéric BISSON – CC BY 2.0

Source contrepoints.org

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