Arrêtez d’emmerder les Français
« Arrêtez d’emmerder
les Français ! ». C’est la célèbre injonction que le Président Pompidou lança
un jour, excédé par l’afflux de décrets à signer. Et les choses ne se sont pas
améliorées depuis…
Ce sont 520.000 textes
réglementaires qui sont en vigueur en l’an 2000, nous apprend Thierry
Desjardins dans le livre qu’il édite cette année-là, reprenant en titre cette
formule retentissante de notre ancien président, dénonçant l’excès incroyable
de lois qui régissent notre pays, jusqu’à l’absurde. Lois très souvent «
idiotes », comme l’indique le brillant journaliste en sous-titre de son
ouvrage.
- Retour sur « Le despotisme démocratique »
C’est le titre d’un
extrait de De la démocratie en Amérique
d’Alexis Tocqueville paru en 2009 aux éditions de l’Herne.
Le célèbre philosophe
politique y dressait déjà un panorama visionnaire des dérives auxquelles la
démocratie risquait de mener :
« Il
est évident que la plupart de nos princes ne veulent pas seulement diriger le
peuple tout entier ; on dirait qu’ils se jugent responsables des actions et de
la destinée individuelle de leurs sujets, qu’ils ont entrepris de conduire et
d’éclairer chacun d’eux dans les différents actes de sa vie, et, au besoin, de
le rendre heureux malgré lui-même. De leur côté, les particuliers envisagent de
plus en plus le pouvoir social sous le même jour ; dans tous leurs besoins, ils
l’appellent à leur aide, et ils attachent à tout moment sur lui leurs regards
comme sur un précepteur ou sur un guide ».
« Les
citoyens tombent à chaque instant sous le contrôle de l’administration publique
; ils sont entraînés insensiblement, et comme à leur insu, à lui sacrifier tous
les jours quelques nouvelles parties de leur indépendance individuelle, et ces
mêmes hommes, qui de temps à autres renversent un trône et foulent aux pieds
des rois, se plient de plus en plus, sans résistance, aux moindres volontés
d’un commis (…) Ils auraient voulu être libres pour pouvoir se faire égaux, et,
à mesure que l’égalité s’établissait davantage, à l’aide de la liberté, elle
leur rendait la liberté plus difficile (…) L’État travaille volontiers à leur
bonheur ; mais il veut en être l’unique agent et le seul arbitre ; il pourvoit
à leur sécurité, prévoit et assure leurs besoins, facilite leurs plaisirs,
conduit leurs principales affaires, dirige leur industrie, règle leurs
successions, divise leurs héritages, que ne peut-il leur ôter entièrement le
trouble de penser et la peine de vivre ? (…) il ne brise pas les volontés, mais
il les amollit, les plie et les dirige (…) il éteint, il hébète, et il réduit
enfin chaque nation à n’être plus qu’un troupeau d’animaux timides et
industrieux, dont le gouvernement est le berger ».
- Le constat contemporain de Thierry Desjardins
Qu’en résulte-t-il en
pratique, après désormais un certain temps de pratique officielle de la
démocratie dans notre pays (je n’ose avancer de date et encore moins de
définition) ?
L’État entend régenter
de plus en plus nos vies, se comportant tel un moralisateur (dans le meilleur
des cas), voire un directeur de conscience de chaque citoyen, « un
totalitarisme soft en quelque sorte », nous dit l’hebdomadaire Valeurs
actuelles qui, 9 ans après, se référant également à l’intéressant ouvrage de
Mathieu Laine « La Grande Nurserie », montre à quel point les choses n’ont pas
changé, mais bien plutôt encore empiré.
Ainsi, l’Etat
n’assurerait plus ce pour quoi il était conçu depuis Athènes et Rome, à savoir
se porter simplement garant de l’intérêt général (je reprends ici les idées de
Thierry Desjardins, sans jugement de valeur, en particulier sur cette notion
d’intérêt général dont je ne suis que trop conscient du caractère incertain…).
Un passage de
l’ouvrage de Thierry Desjardins m’avait particulièrement impressionné, lorsque
je l’ai lu : il portait sur les démarches administratives incroyables
qu’il faut effectuer lorsqu’on veut simplement faire construire une maison ou
même en modifier simplement certains éléments mineurs (depuis, j’ai eu
l’occasion de l’observer en pratique autour de moi).
De quoi se poser la
question (sous-titre de la page 85), « La France, dernier pays marxiste ? ».
Réglementation, vie
quotidienne, commerce, entreprise, agriculture, municipalités, liberté
d’expression, … Autant de domaines où la loi étend sa toile, restreignant
chaque jour un peu plus les libertés au détriment du bon sens, la
déresponsabilisation des citoyens faisant son œuvre. Et avec toutes les limites
que cela implique même si, officiellement, il s’agit de vouloir faire notre
bonheur.
Un excellent essai,
comme toujours de la part de Thierry Desjardins, très bien documenté et
invitant à la réflexion. Un regard critique sur ce qui fonde notre vie au
quotidien, comme nos libertés fondamentales si l’on n’y prend garde, en
regardant un peu plus loin.
Une parfaite
illustration de cette somme de « bonnes intentions » ou prétendues
telles au départ et qui parviennent à vous pourrir la vie, la transformant
parfois en enfer.
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