Le bitcoin
Nous allons détailler
quelques applications potentielles de Bitcoin. Il existe des bienfaits
immédiats comme des transactions plus rapides et plus libres. Nous allons voir
beaucoup plus loin et imaginer un futur à long-terme : contrats intelligents,
propriétés intelligentes et agents autonomes. Je tiens à préciser que la
plupart de ces idées ne sont pas de moi, je les ai reprises à plusieurs
endroits, et mon but est de les diffuser. La plupart émanent de Nick Szabo,
ancien professeur de Droit à Washington University et informaticien, et Mike
Hearn, quit fait partie de l’équipe de développement de Bitcoin, et travaille
chez Google quand il a le temps.
- Micropaiements
Bitcoin permet
d’effectuer des transactions pour des sommes très faibles de l’ordre de la
fraction de centime à très faible coût. Cela permet de monétiser de manière
efficace certaines capacités jusqu’à présent inutilisée. Par exemple, vous
pouvez transformer votre smartphone en hub WiFi et en faire payer l’accès à
tous les occupants de votre wagon de train. Les utilisateurs ne payent que dans
la mesure de ce qu’ils utilisent comme ressources ou bande-passante. Vous
rentabilisez ainsi votre connection au même titre que vous pouvez sous-louer un
appartement.
Les journaux, blogs et
autres publications en ligne peuvent également mettre en place des
micropaiements pour remplacer les business modèles qui ont du mal à percer
comme les abonnements ou les prix de gros. Souvent, une personne veut juste
lire un article à un moment donné, et non pas s’abonner ni payer un droit de 10
€ qui donne accès à cinquante articles. Jusqu’à présent les frais fixes de
transactions étaient trop chers pour vendre à l’unité à des prix raisonnables,
avec Bitcoin c’est désormais possible.
On peut aussi imaginer
de payer l’accès momentané à une voie rapide et non-embouteillée sur
l’autoroute de façon complètement automatisée.
- Médiation de contentieux
Avez-vous déjà eu
besoin de confier de l’argent à un tiers de confiance, par exemple dans le
cadre d’un pari ou d’un prêt?
Avec Bitcoin, il est
possible de créer ce qu’on appelle des transactions 2-parmi-3, où il suffit que
2 personnes parmi les 3 personnes impliquées valident la transaction pour
qu’elle ait lieu, et tout cela sans qu’à aucun moment l’une des personnes ne possède
la somme en jeu. Il devient donc bien moins dangereux de demander à une main
tierce de se porter arbitre d’un contentieux ou d’un pari quand l’on sait que
cette personne ne peut pas s’envoler avec l’argent des deux autres. Comme les
capacités de protection d’argent nécessaires à l’arbitrage sont réduites à zéro
et puisque la réputation des arbitres devient aisément vérifiable, cela
libéralise complètement le marché de l’arbitrage et cette activité n’est plus
réservée à quelques institutions centenaires. Logiquement, le prix de ces
services baisse et tout le monde en profite. (Sauf ces quelques institutions
centenaires…)
- Médiation automatisée
Nous pouvons aller
encore plus loin. Pourquoi ne pas réduire encore plus les coûts et la
possibilité d’erreur humaine ou le risque de détournement ?
Avec Bitcoin il est
possible de créer des transactions qui se déclenchent à retardement. Vous
pourriez donc mettre une somme de côté pour votre enfant qui ne sera débloquée
qu’au moment de ses 18 ans. Plus besoin d’une banque pour cela !
Il est également
possible de créer des transactions qui “écoutent” des
flux de données. Ces flux de données sont appelés des oracles dans le sens où
ils ne mentent jamais. Par exemple nous pouvons imaginer l’automatisation d’un
héritage. Une personne crée une transaction qui comporte la somme à donner en
héritage et son destinataire. Seulement cette transaction n’est pas effectuée
dans l’immédiat. Elle va “écouter” un registre officiel qui annonce les décès.
Dès que le décès de la personne qui a créé la transaction est annoncé, la
transaction est effectuée et l’héritier touche son héritage.
Ou de façon moins
lugubre, nous pouvons imaginer une transaction qui écoute le flux officiel
d’une université et ne se déclenche que lorsque votre enfant a obtenu son
diplôme. Tout cela j’insiste sans avoir à confier votre argent ni à une banque,
ni à qui que ce soit.
Pour les plus joueurs
d’entre nous, cela peut aussi servir pour répartir les gains d’un pari, en
branchant une transaction sur un flux de résultats sportifs.
- Crowdfunding et financement des biens publics
Le crowdfunding peut
être défini comme un contrat. C’est un contrat qui est émis par une personne ou
organisation qui propose de créer par exemple un nouveau produit ou un film si
jamais un certain montant est réuni, généralement associé à une date d’expiration.
N’importe qui peut participer à la hauteur voulue. Si le montant total des
participations n’atteint pas la somme demandée, chacune des participations est
retournée. Ce type de contrat est très difficile à mettre en place dans la
réalité avec les outils de transaction qui nous sont mis à disposition par les
banques. Récemment des startups comme Kickstarter ou KissKissBankBank se sont
bâties sur ce modèle et connaissent un franc succès. Mais elles font payer très
cher le fait de s’occuper de toutes les problématiques de paiement liées aux
crowdfunding.
Or avec Bitcoin il est
très simple de créer un contrat de crowdfunding, sans avoir recours à une
autorité centrale comme Kickstarter pour accumuler les participations et les
donner au créateur du contrat ou les rendre aux contributeurs. Et comme c’est
moins cher on peut le faire pour de tous petits montants, ce qui rend possible
de nouvelles idées comme la traduction ou le résumé de pages web. On peut même
coupler un contrat de crowdfunding avec la médiation automatisée pour proposer
une meilleure garantie aux participants.
Une application très
intéressante de ces contrats est le financement des biens publics, comme une
route, par exemple. Ces contrats peuvent en effet remplacer l’impôt et rendre
les dépenses publiques beaucoup plus transparentes. Il serait amusant de voir combien
de rond-points seraient construits avec ce système.
- Propriété intelligente
Aujourd’hui la
cryptographie est utilisée dans de nombreux endroits pour verrouiller ou
déverrouiller une porte ou un appareil. Les cartes magnétiques dans les bureaux
et les hôtels, ou les clés de voiture sont des exemples. Ces clés ou cartes ne
sont pas très intelligentes et n’ont aucune notion de propriété ou de paiement.
On pourrait imaginer
qu’elles puissent se connecter au réseau Bitcoin afin de pouvoir vérifier ou
transférer la propriété de la voiture. Une vente de voiture se déroulerait donc
de la façon suivante: je vous envoie le montant en Bitcoin, avec une référence
à la voiture incluse dans la transaction. La voiture lit ce changement et ne
répond désormais qu’au récipendiaire de la transaction, via son smartphone
probablement. La grande innovation est donc que le paiement et le transfert de
propriété ne sont plus distinguables. L’un va avec l’autre et il n’y a donc pas
de fraude possible. Vous pouvez même vendre votre voiture à distance, sans
crainte. L’acheteur et le vendeur n’ont pas besoin de se faire confiance.
- Emprunts avec caution
La propriété
intelligente peut être utilisée comme caution pour un emprunt. Imaginons que le
propriétaire d’une voiture veuille emprunter une certaine somme et propose de
mettre sa voiture en caution. Considérons une transaction qui, à une certaine
date limite, vérifie que les remboursements ont été effectués ou non. Si
l’emprunt a été remboursé, la voiture ne change pas de propriétaire. Sinon, la
transaction transfère la propriété de la voiture vers le prêteur. Et si
l’emprunteur est malhonnête et s’en va très loin avec sa voiture, vous me
direz, que vais-je faire d’une voiture qui se trouve à des milliers de
kilomètres? Pas de problème, comme nous l’avons vu juste au-dessus, vous pouvez
la vendre à distance.
- Agents autonomes
Pour finir, quoi de
mieux qu’un peu de science-fiction. Un agent autonome est une machine qui
n’appartient à personne, est capable de payer pour ses propres coûts (énergie,
maintenance, réparations) et vendre des services. Ce n’était pas envisageable
avant Bitcoin car aucune banque n’accepte d’ouvrir un compte en banque au nom
d’une machine.
On peut imaginer des
taxis qui se conduisent tout seuls, ou des drones qui vous livrent une boisson
bien fraîche lorsque vous êtes perdu dans le désert. Ces agents offriraient
leur service sur une place de marché à laquelle les gens se connectent via leur
téléphone ou implant.
Il est important que
ces agents n’appartiennent pas à une entreprise ou organisation centralisée car
sinon les prix des services seront trop élevés. Si un agent ne s’appartient
qu’à lui-même, il peut vendre son service avec une marge nulle car il n’a pas
de désir de profit, c’est une machine après tout. Et tout le monde y gagne.
Qui construira ces
agents? C’est là que les contrats de crowdfunding interviennent. Ce seront des
biens publics. Une personne lève de l’argent via un contrat, construit l’objet
et le laisse ensuite agir de façon autonome.
J’espère que ce petit
effort de projection dans le futur, malgré l’absence de voitures volantes, vous
aura plu et aura stimulé votre curiosité et votre imagination, mais surtout
qu’il aura montré que Bitcoin est bien plus qu’une simple monnaie d’échange ou
valeur refuge.
Source contrepoints.org (Par Stanislas Marion)
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