La crise financière et le remède libéral
Plusieurs étatistes
continuent de dire que la déréglementation et le capitalisme (ajoutez le
superlatif négatif du jour) ont causé la crise économique actuelle. Or, il n’en
est rien ; une crise économique de cette envergure ne peut avoir qu’une seule
source : l’État. Avec ses énormes pouvoirs de coercitions, il peut
facilement forcer quiconque à adopter des comportements irrationnels allant à
l’encontre de leur intérêt personnel. John Allison, président du Cato Institute
et ancien PDG de la banque BB&T, a pu voir cette influence destructrice au
cours de sa carrière à la tête de cette grosse banque de la côte Est. Il parle
en long et en large de la crise économique, et propose d’excellentes solutions
pour en éviter une autre, dans son excellent livre The Financial Crisis and the Free Market Cure.
Dans la tradition des
économistes autrichiens, il voit l’économie pour ce qu’elle est vraiment :
une observation du comportement humain. En résumé, les humains tendent à agir
selon ce qui semble être leur meilleur intérêt d’après ce qu’ils voient autour
d’eux – ce qui peut paraître irrationnel avec le recul ne l’était pas quand le
geste fut posé. C’est d’ailleurs cette irrationalité qui engendre des crises
économiques puisque, comme en physique, toute action a sa réaction.
Et une des principales
causes de la crise qui fait encore rage fut l’éclatement de la bulle
immobilière en 2007-2008. Comme toute bulle, son origine peut être tracée vers
des politiques publiques, et elles sont nombreuses. Selon Allison, l’immobilier
est le domaine qui a reçu le plus de subventions depuis le New Deal des années
30.
On voulait ainsi
encourager tout le monde à s’acheter une maison, même si 1) ce n’est pas pour
tout le monde, particulièrement pour les gens qui déménagent souvent et 2) ce
n’est pas un investissement au sens économique du terme, c’est-à-dire qui
permet de produire plus de valeur. Comme une maison ne produit rien une fois
qu’elle est construite, elle est un bien de consommation au même titre qu’une
voiture ou un sac de carottes. Sans compter que plusieurs emplois directs dans
la construction, une fois que la bulle éclate, deviennent obsolètes, ce qui
ajoute à la perte sèche quand la bulle éclate…
Dans les années 1990,
cet encouragement s’est fait (presque littéralement) à la pointe d’un fusil. En
effet, soucieux d’entretenir sa base électorale noire, Clinton a soudainement
décidé d’appliquer certains règlements qui empêchaient la discrimination raciale
dans les prêts bancaires. Pour se faire, il s’est basé sur une étude plus que
douteuse de la Fed (la banque centrale des EU), qui affirmait que les Noirs
étaient discriminés en se voyant refuser un prêt qu’un Blanc avec un même ratio
de dette obtenait.
L’ennui, c’est que le
ratio d’endettement d’une personne est loin d’être le seul facteur pris en
considération. Il y a également la durée des emplois ainsi que le paiement ou
non des dettes. Mais comme la quasi totalité des régulateurs ne connaissent rien
aux prêts, ces « menus » détails étaient sans importance ; les bonnes
intentions ont préséance sur le gros bon sens des banquiers.
Et ce gros bon sens a
fortement été affecté quand Clinton a forcé Fannie Mae et Freddie Mac, deux
agences gouvernementales qui garantissent les hypothèques, à avoir jusqu’à 50%
de prêts hypothécaires offerts aux gens à faible revenu qui ne peuvent normalement
obtenir d’hypothèques (les fameux « subprimes »).
En d’autres termes, au nom d’une politique « charitable » de vouloir
voir plus de gens posséder une maison, l’administration Clinton (Bush, son
successeur, n’a pas pu changer ces règles), a causé en partie le gonflement de
la bulle immobilière en diminuant dramatiquement les prérequis pour obtenir une
hypothèque.
- Fin de la primauté du droit
Mais au-delà de la
réglementation bancaire, Allisson montre à quel point la réglementation en
général chamboule complètement les choix des dirigeants d’entreprise, peu
importe le domaine. Un jour, tel règlement est sans importance parce que le
contexte économique est favorable. Mais six mois plus tard, quand les choses
vont mal, « The humble bureaucrats are
then energized with the moral certainty and clarity of the Gestapo »
(l’humble bureaucrate a maintenant l’énergie et la certitude morale d’un membre
de la Gestapo). Ce dernier décide donc de blâmer le dirigeant d’entreprise pour
ne pas avoir appliqué ledit règlement, ce qui peut, par exemple, forcer le
refus d’un prêt. Pour ajouter l’insulte à l’injure, Allison affirme qu’un
banquier ne peut pas dire à son client, si fidèle et fiable soit-il, que son
prêt est refusé à cause d’un zèle bureaucratique soudain.
Cet arbitraire s’est
également reflété dans le secours financier de certaines banques et pas
d’autres. Normalement, sur le libre-marché, une compagnie mal gérée fait
faillite, et ses avoirs sont redistribués de façon à mieux répondre à la
demande. Mais quand le gouvernement rentre dans le tableau, il peut décider, en
utilisant des raisons du genre « Le système va s’écrouler si nous ne
faisons rien », de sauver une entreprise de la faillite. En clair, le
gouvernement dit : « Ce n’est pas important si vous vous administrez
mal, je vais vous secourir » – la fameuse mentalité « too big too fail » (trop gros pour
faire faillite).
Par exemple, Paulson,
secrétaire du Trésor quand la crise a commencé, était un gros actionnaire de
Goldman Sachs, une des plus grosses compagnies financières à faire faillite. Il
a évidemment tout fait pour secourir son investissement, tout en laissant Lehman
Brothers faire faillite. Mais le fait qu’UNE compagnie ait été sauvée permet
aux autres de penser que prendre des risques inconsidérés, surtout s’ils sont
encouragés par l’État, seront « récompensés » en bout de ligne…
- Des solutions choquantes, mais nécessaires
Afin d’éviter une
autre crise comme celle que nous subissons encore – Allison en prédit une autre
majeure d’ici 10-15 ans si aucun changement majeur n’est apporté – des
solutions radicales (mais ô combien nécessaires) doivent être apportées. La
majorité de la réglementation bancaire, particulièrement la loi Dodd-Frank
adoptée après la crise, doit être abolie au plus vite. Aussi, Mae et Mac
doivent être liquidés et/ou privatisés, ce qui remettra du bon sens dans le
marché hypothécaire – sans garantie du gouvernement, finis les prêts à risque.
Il propose également, comme toute personne connaissant bien le pouvoir des
incitations sur le comportement, de diminuer les impôts afin d’encourager la
production. En effet, quand les impôts sont élevés, les gens passent plus de
temps à tenter de les éviter qu’à tenter d’innover, bloquant ainsi la voie à
une amélioration de notre niveau de vie.
Une autre solution
radicale proposée par Allison vise à s’attaquer à la racine des crises
économiques, qui est avant tout philosophique et non économique. Et cette
philosophie de la crise est… l’altruisme, tel que Ayn Rand le définit,
c’est-à-dire sacrifier autrui pour son propre bénéfice. C’est exactement ce qui
a engendré la crise : parce tout la monde « a droit » à une
maison, le gouvernement doit prendre les moyens nécessaires pour y arriver.
Mais pour y arriver, il faudra « sacrifier » certaines personnes –
les banquiers, en les forçant à prêter à n’importe qui et les contribuables, en
les forçant à payer pour les fautes des banquiers. En laissant libre cours à l’« égoïsme objectiviste » des gens,
une crise de l’ampleur de celle de 2008 n’a virtuellement aucune chance de se
reproduire puisqu’il n’est pas dans l’intérêt personnel des banquiers de
prendre autant de risque.
En conclusion, The
Free Market Cure devrait faire partie de toutes les bibliothèques. Les
explications très détaillées de l’auteur permettent de voir la crise du point
de vue des « fautifs » et montre que leurs agissements étaient somme
toute rationnels dans le contexte (quoi que certains aient pris moins de
risques que d’autres, ce qui s’explique aussi par les incitatifs du
gouvernement). Bien que certains passages soient difficiles à comprendre – sans
doute parce que la réglementation elle-même est incompréhensible –, l’ouvrage
est assez bien vulgarisé pour que Monsieur et Madame-tout-le-monde puisse
facilement comprendre. Il vous donnera quelques munitions de plus pour
répliquer à ces incessants c’est-la-faute-du-libre-marché qui polluent encore
les pensées de trop de gens.
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