Les femmes et leurs talons, une relation équivoque
Les talons sont aujourd’hui un incontournable
dans le code vestimentaire féminin. Pourtant, les podologues les disent
dangereux pour les pieds et la colonne vertébrale, et une récente étude menée
par des chercheurs de l’université de Northumbria (Royaume-Uni) affirme que les
hommes sont, pour la plupart, incapables de se souvenir si une femme qui passe
devant eux portait des talons ou pas ; ils ne remarqueraient que l’allure
générale… Penchons-nous donc sur la relation d’amour-désamour qui unit les
femmes et leurs chaussures à talons.
Le talon comme danger médical : Les effets
négatifs des talons sur la santé ne sont plus à démontrer. Outre les douleurs
aux pieds (ampoules, cors, callosités, etc), les talons peuvent aussi provoquer
une déformation de la colonne vertébrale, une arthrose du genou, des maux de
tête (à cause de vaisseaux sanguins compressés dans la jambe ralentissant la
circulation du sang).
Le talon comme assujettissement de la femme :
Simone de Beauvoir dénonçait les talons comme instrument de soumission de la
femme à l’homme : « Les coutumes, les
modes, se sont souvent appliquées à couper le corps féminin de sa transcendance
: la Chinoise aux pieds bandés peut à peine marcher, les griffes vernies de la
star d’Hollywood la privent de ses mains, les hauts talons, les corsets, les paniers,
les vertugadins, les crinolines étaient destinés moins à accentuer la cambrure
du corps féminin qu’à en augmenter l’impotence. ». Les féministes
pensaient en effet qu’en empêchant la femme de faire certains actes
confortablement et de marcher aussi vite que les hommes, les talons la
contraignaient à rester dans un rôle d’infériorité et de vulnérabilité.
C’est encore l’avis des jeunes skateuses américaines, qui revendiquent une
« féminité alternative » où les filles font tout en tant
qu’égales des garçons (voir l’étude américaine Skater girlhood and
emphasized feminity : « You can’t land an ollie properly in heels »).
Le talon comme fantasme : Dans la Rome
Antique, c’était à la hauteur de leurs talons que l’on reconnaissait les
prostituées. Même si les talons aiguilles sont rentrés dans les mœurs, ils ont
toujours une forte connotation sexuelle : ces modèles, qui rendent la
marche très difficile, ont pour but assumé d’émoustiller les hommes
(photo : Madeleine Berkheimer pour Louboutin). Et ça marche, à tel point
que le « fétichisme du pied » est devenu une pathologie courante
selon les sexologues (voir analyse sur Psychonet.fr). Mais heureusement, la
plupart des hommes qui fantasment sur les talons ne vont pas aussi loin – ils
trouvent simplement extrêmement érotique le fait qu’une femme garde ses talons
pendant l’amour, sans désirer aucune pratique sado-masochiste.
Le talon comme élément spectaculaire d’une tenue : Les chaussures à talons se déclinent aujourd’hui dans les modèles les plus loufoques. Mais, sans aller jusqu’à ces chaussures œuvres d’art, certaines femmes plébiscitent, dans des occasions festives, le port de talons qui se remarquent (hauteur, couleur). Les talons deviennent partie intégrante de la tenue, lui apportent la touche finale.
Le talon comme vecteur de fragilité : Le
talon, surtout s’il dépasse une certaine hauteur, ne facilite pas les
mouvements. Il oblige la femme à faire de plus petites enjambées, et la fait
parfois tanguer avant de reprendre son équilibre. Ce contraste entre force (les
talons font prendre de la hauteur et de l’assurance) et fragilité (la femme
vacille) est indispensable pour comprendre le port des talons. Notons qu’il a
atteint son paroxysme vers le 15e siècle, avec l’apparition des
« chopines » turques, des chaussures à semelles de bois qui pouvaient
mesurer jusqu’à 70 cm de hauteur, obligeant les femmes à avoir recours à l’aide
d’un domestique pour se déplacer…
Le talon comme chaussure de sport :
Incroyable… mais vrai. Sarenza, un célèbre site d’e-commerce consacré à la
chaussure, organise chaque année depuis 2008 une course sur escarpins, dont la
gagnante remporte des chaussures en vente sur le site. Une façon décalée de
montrer que les talons ne sont pas si importables que ça…
Le talon comme allié de tous les jours : S’il
est d’une hauteur raisonnable (moins de 7 cm), le talon peut sans mal être
porté au quotidien. Il est alors l’allié de la silhouette, en allongeant la
jambe, en rendant la démarche plus assurée avec un joli déhanché, et en
obligeant à se tenir droite. Bref, il est un signe de glamour et de féminité –
et c’est pour cette raison qu’il est aussi populaire dans les placards des
femmes d’aujourd’hui.
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