Infos santé-Cannabis et adolescents
L’usage du cannabis chez
l’adolescent jeune pourrait compromettre son développement neuropsychologique.
C’est en tous cas ce que laisse entendre une étude néo-zélandaise qui s’ajoute
à d’autres travaux plus anciens et qui attire l’attention sur un phénomène
courant mais qui n’est peut-être pas à banaliser.
Les
chercheurs néo-zélandais ont accompli un travail long et minutieux puisqu’ils
ont suivi ce qu’on appelle une cohorte de naissance. Il s’agit de 1037
individus née en 1972 et 1973 et qui ont été ainsi suivis jusqu’à l’âge de 38
ans. Leur étude est publiée dans la revue américaine PNAS.
Chaque
participant a été évalué au plan neuropsychologique avant l’âge de 13 ans, en
1985 et 1986, puis en 2010-2012.
La
consommation de cannabis a été évaluée à 18, 21, 26, 32 et 38 ans.
Précisons
à ce stade que suivre pendant 20 ans de façon prospective une cohorte est, en
matière d’épidémiologie, un travail remarquable.
Les
auteurs ont cherché à savoir si l’usage du cannabis sur le long terme était
associé à un déclin des fonctions cognitives. Cherché également si les troubles
étaient spécifiques de certaines fonctions ou globaux.
Ils
ont également recherché le rôle éventuel d’un décrochage scolaire comme cause
des troubles
Ils
ont également enquêté auprès de tiers pour confirmer les troubles, étudié l’âge
de début de la consommation ainsi que les effets à long terme après cessation
de l’usage de cannabis.
Par
leur méthodologie ils ont pu éviter quasiment complètement un ‘parasitage’ lié
à la consommation d’autres drogues plus toxiques, le rôle du tabac, d’un excès
d’alcool et l’existence de troubles schizophréniques.
L’un
des résultats les plus marquants chez les utilisateurs au long cours est la
diminution du quotient intellectuel, le QI. Ce test n’est pas sans reproches et
sa validité fait l’objet de contestations depuis longtemps, mais en
l’occurrence, la baisse est un élément retrouvé dans diverses catégories
de l’étude et peut donc être considérée comme un indicateur à défaut de preuve
absolue.
Une indication précieuse
Les
auteurs de l’étude, je l’ai dit, ont utilisé une série de garde-fou qui leur
garantit une non ‘pollution’ de leur analyse.
Ils
peuvent donc dire que le fait de commencer avant 18 ans à fumer du cannabis de
façon régulière a un retentissement neuropsychologique plus important qu’un
début à l’âge adulte. Plus intéressant, et contrairement au tabac, la cessation
de l’usage ne remet pas les ‘compteurs à zéro’ et les anomalies
persistent. Ces troubles cognitifs vont avoir des conséquences à long
terme dans le vécu quotidien. Il risque d’y avoir une altération d’un certain
nombre de processus qui permettent à l’adulte normal de se situer dans son
environnement, de prendre des décisions, de répondre au stress.
Ce
travail vient en confirmer d’autres qui montrent la vulnérabilité du cerveau
des adolescents face au cannabis fumé tôt, de façon régulière et sur des
périodes longues.
Bien
qu’il ne soit pas politiquement correct, dans certains milieux, de soulever
cette problématique, il est important de s’y arrêter.
L’adolescence
n’est pas une période banale. C’est un moment où se font des remodelages, des
transformations, voire des finitions.
Et
ces périodes d’intenses ‘travaux’ où se produisent des divisions cellulaires,
la mise en place de connexions, le branchement entre elles de structures
nerveuses, l’enveloppement de nerfs dans des gaines protectrices de myéline.
Ces
périodes sont des moments de grande vulnérabilité, de grande fragilité. La
surface des cellules abrite des récepteurs, des structures qui, sollicités,
vont entrainer des réactions chimiques mettant en contact les cellules
nerveuses.
Plus tôt, plus de risques
Il
existe des récepteurs au cannabis dans le cerveau, à divers endroits. On peut
imaginer qu’une stimulation répétée et à des doses importantes puisse jouer un
rôle défavorable à une période charnière du remodelage cérébral sur un organe
en devenir. Des connexions aberrantes, des problèmes de communication
inter-neuronales, peuvent ainsi survenir.
D’autant
que les concentrations en principes actifs et en particulier en THC,
tétra-hydrocannabinol.
Dans
un domaine tout autre, on pense, par exemple, que les sollicitations hormonales
sur le sein pendant la puberté fait le lit du cancer quelques années plus tard.
On,
est, je le répète à une période-clé dans l’adolescence et quand on revient aux
résultats de l’étude on constate qu’un début de consommation plus tardif n’a
pas les mêmes conséquences.
D’autres
études menées en Suède et en Angleterre ont montré également des
phénomènes inquiétants chez des adolescents consommateurs précoces. Des
syndromes dépressifs et, chez des sujets prédestinés, un passage à la
schizophrénie en cas de consommation quotidienne élevée.
Pour
autant, il faut éviter la diabolisation et les discours moralisateurs. Ne pas
oublier non plus le rôle dévastateur des consommations excessives d’alcool,
souvent associées d’ailleurs à la prise de cannabis. Les bières qui, il y a
quelques années titraient 4 degrés d’alcool, titrent désormais plus souvent 10
degrés.
Mais
il n’est pas non plus interdit de souligner l’accumulation de données de
recherches qui laissent à penser que débuter tôt la consommation de cannabis a
un effet délétère sur le cerveau.
Informer
les adolescents et leurs parents, le choix face au risque étant, ensuite, de la
responsabilité de chacun.
Référence de l’étude
Madeline H. Meier et al.
Persistent cannabis users show
neuropsychological decline from childhood to midlife
PNAS 2012 ; published ahead of print August 27,
2012,doi:10.1073/pnas.1206820109
Autres travaux sur le mémé sujet :
Stanley Zammit et al.
Self reported cannabis use as a
risk factor for schizophrenia in Swedish conscripts of 1969: historical cohort
study
BMJ 2002;325:119
Louise Arseneault et al.
Cannabis use in adolescence and
risk for adult psychosis:longitudinal prospective study
BMJ 2002;325:1212–3
Joseph M Rey and Christopher C
Tennant
Cannabis and mental health
More evidence establishes clear
link between use of cannabis and psychiatric illness
BMJ 2002; 325 :1183-1184
Source docteurjd.com (blog santé de jd flaysakier)
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