Le plan-plan d’économie de Moscovici
Bon, c’est vrai
qu’avec le second tour des élections municipales, les politiciens n’ont plus
tout à fait la tête à parler réformes, et encore moins à se plonger dans celles
qui permettraient une vague économie de l’argent du contribuable. Mais qu’à
cela ne tienne : vaillamment, un homme reste sur le pont à trouver des
solutions innovantes et à sculpter un budget à la fraise de dentiste, le tout,
avec le regard fixé sur l’objectif, c’est-à-dire son prochain poste de
Commissaire Européen.
Vous avez reconnu
Pierre Moscovici, qui n’aura jamais autant brillé qu’à ce poste de ministre de
l’Économie (quand il n’a su en faire aucune) et des Finances (alors qu’il n’y a
plus un rond en caisse). Et s’il lui faut briller, surtout actuellement, c’est
parce qu’on sait que les municipales passées, le président Hollande devra
indubitablement prendre acte du sentiment qu’on qualifiera de mitigé des
Français à son égard.
On se doute déjà
fortement qu’un remaniement semble envisagé, même si Hollande, têtu, pourrait
choisir de n’en rien faire pour montrer qu’il ne travaille pas sous la
pression, nananère. Mais si remaniement il y a, tout comme on sait que Vincent
Peillon ne restera pas (c’est pour cela qu’il est en lice pour devenir député
européen, le petit malin), tout comme on se doute que Ségolène Royal, profitant
de l’expulsion de Treirweiler, pourrait réapparaître sur le devant de la scène
politique avec un gros ministère joufflu et gonflé de socialitude, on sait
aussi que Pierre a déjà choisi de devenir commissaire européen. Et on se doute
bien que, vu de Bruxelles, les petites affres dans lesquelles se débattent les
ministres français lui seront parfaitement sans intérêt. Mieux : le budget de
la France deviendra alors un sujet de rigolade alors qu’il est encore, en ce
moment, un sujet d’inquiétude pour le futur-ex-ministre de Bercy.
Pour le moment, Pierre
met donc les petits plats dans les grands. Il ne recule devant aucune
exagération en expliquant à qui veut l’entendre que son plan d’économie sera le
plus ambitieux jamais pensé. Au moins, on n’est pas trop violemment surpris
puisque c’est la troisième ou quatrième fois en dix ans qu’on nous sort que les
plans d’économies pondus par les crânes d’œuf de la DGI sont les plus ambitieux
jamais trouvés. Et comme jusqu’à présent, la dette française a continué de
grimper et que les dépenses de l’État n’ont jamais diminué, on peut en déduire
avec une assez bonne probabilité que ce plan aboutira à la même fanfreluche
inutile.
Il n’en reste pas
moins qu’il va bien falloir que quelqu’un s’y colle, à ces économies. Non pas
que l’occupant de l’Élysée aurait pu trouver la lumière et découvrir que le
pays, exsangue, a plus que jamais besoin de se mettre à la diète. Simplement,
pour s’éviter des déboires auprès de la Commission (qui a tout de même mis la
France sous observation), pour s’éviter des soucis auprès des trop nombreux
prêteurs à l’État français qui commencent à trouver les perspectives
économiques du pays douteuses, Hollande et sa clique vont bien devoir couper
dans certains postes superflus.
Pour le moment, on a
d’ailleurs déjà commencé à raboter un peu le budget pourtant colossal de
l’Élysée. En présentant ainsi une baisse de 11 millions d’euros depuis 2011,
soit une diminution de presque 4 millions d’euros par an, on a donc réussi à
dégonfler le budget du palais présidentiel à 101 millions à l’année, et on ne
désespère pas de passer à 100 millions en 2015 (un joli million de gagné,
performance olympique). Rappelons qu’en sucrant la moitié du staff de l’Élysée,
constitué essentiellement de ces indispensables fonctionnaires froufroutants
faisant cour auprès du Roi Solex et en lui imposant un train de vie plus à la
mesure du pays dans lequel il vit (et meilleur pour sa ligne, du reste),
l’économie serait certainement plus substantielle (la République survivra sans
Sérillon à la communication présidentielle, soyez-en sûr). Ne soyons pas
bégueule : si le rythme est celui d’un catarrheux après un marathon, la
tendance reste la bonne.
Du côté des
fonctionnaires de tout le reste du gigantesque appareil d’État français, dont
la masse salariale constitue à l’évidence le principal boulet traîné par
l’économie du pays, il va être bien évidemment au moins aussi compliqué de
tailler dans le gras. Ce sera même, si l’on en croit le discours lacrymogène de
certains représentants, impossible : on est à l’os, mon bon mossieur, car oui,
la France a besoin de ces milliers de personnels occupant leurs après-midis
dans les collectivités territoriales diverses à agrafer des notes de services
incompréhensibles qui ne seront lues par personne et dont le citoyen — qui paye
pour tout ça — se fiche éperdument. Y’a pas à tortiller, ma brave dame : on a
déjà économisé tout ce qu’on pouvait, mais si mais si, et faire plus, ce serait
fauter. L’austérité, c’est vraiment trop dur.
Pourtant, on nous
explique sans rire que la baisse des effectifs n’est plus un sujet tabou !
Ici, comprenez que c’est évoqué entre deux couloirs à Matignon, éventuellement
pendant le goûter à l’Élysée, entre deux BN ou après un pépito-banga, histoire
de faire un peu frémir la ménagère de moins de 50 ans qui paye pour tout ça.
Mais rassurez-vous : rien n’est encore décidé, toutes les pistes sont étudiées,
et on verra après les élections mais ne nous précipitons pas, surtout qu’en
attendant, le nombre total de salariés de la fonction publique (territoriale,
d’État et hospitalière) continue de grimper gentiment.
On le voit, faire des
(vraies) économies alors que le ministre va partir, que tous sont d’accord pour
dire qu’il n’y a aucune marge de manœuvre, et que personne ne semble prêt à
faire le premier pas, cela ne va pas être simple. En deux ans de gouvernement
Ayrault, on aura constaté une augmentation du SMIC de 2%, de l’allocation de
rentrée scolaire de 25%, du RSA de 10% (sur 5 ans), un encadrement des loyers
et une pincée de mesures sociétales accueillies assez diversement dans le pays
pour qu’on ne puisse plus le qualifier d’apaisé. La dette n’aura pas baissé,
l’effectif fonctionnaire et les dépenses des administrations non plus.
Pas de doute, le
moindre frémissement de changement dans ces domaines s’apparenterait pour
Hollande à retourner complètement sa veste (ce qui tombe bien après s’en être
pris une carabinée).
Seul espoir au niveau
des collectivités territoriales : les communes qui vont maintenant supporter
les étatistes de droite suite aux Municipales vont se voir imposer ces
économies drastiques que Hollande n’arrive pas à créer dans le giron de l’État.
Ce sera d’autant plus facile qu’il n’aura pas à ménager ses opposants
politiques et pourra ainsi amoindrir la douleur de cette cuisante défaite. Et
ce sera d’autant plus facile que déjà, dans certaines communes, on commence à
comprendre que les dépenses à tout va, électoralement parlant, ça ne prend
plus.
Cela suffira-t-il ? Il
n’est qu’à regarder de plus près les montants stratosphériques de la dette et
des niveaux de dépenses des administrations pour comprendre que ce ne sont pas
10% d’économie ici ou là en papeterie qui sauveront la mise. Dès lors, pour
moi, c’est clair : ce pays est foutu.
Source contrepoints.org
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