Indignation latine contre l'Europe
Humiliation, délit, manque de respect. La
presse sud-américaine se montre solidaire du président de la Bolivie, interdit
le 2 juillet de survoler l'espace aérien de quatre pays européens. Les journaux
affirment que l'incident ouvre une crise diplomatique entre les deux rives de
l'Atlantique.
La plupart
des présidents d'Amérique latine ont réagi de la même manière au blocage de
l'avion d'Evo Morales : ils se sont montrés solidaires avec leur homologue
bolivien et ont critiqué l'attitude des quatre pays européens concernés. C'est également le cas de la plupart des
journaux latinos qui montrent leur colère et leur indignation dans les éditos
et les analyses.
Pour le journal
bolivien Página Siete, ce qui s'est passé le 2 juillet est "grave" et
"humiliant". Le fait que quatre pays européens cèdent aux pressions
de Washington met en évidence "le pouvoir incommensurable des Etats-Unis,
ainsi que le manque de dignité de certains gouvernements européens".
D'après le quotidien, cet incident va améliorer l'image d'Evo Morales, dont le
"gouvernement est très habile dans la gestion politique de ce genre de
crise".
La Prensa, quant
à elle, assure ne pouvoir qualifier cet acte que comme "sauvage et
barbare" et maintient qu'il s'agit d'"un attentat inacceptable pour
l'ensemble du peuple bolivien".
"Attention,
les masques tombent et les dents s'aiguisent", titre le journal équatorien
El Telégrafo dans l'une de ses colonnes
d'analyse. "Avec des pistolets à la main, comme des gangsters, ils [ces
pays européens] prétendent humilier les peuples qui ouvrent les portes à la
redistribution en démocratie", écrit le quotidien.
"C'est
l'heure de la dignité continentale", souligne de son côté le journal
uruguayen La República. "On aurait
dit un film de science-fiction. Mais non, c'est la réalité. C'est une attaque
contre un pays frère mais aussi contre toute l'Amérique, celle du sud du Río
Bravo del Norté [ou Rio Grande, qui sépare les Etats-Unis et le Mexique]. C'est
un acte criminel qui doit être condamné par tous les gouvernements latinos et
ceux des Caraïbes."
Le journal péruvien La
República qualifie cet épisode de "gaffe
diplomatique. Le président de la Bolivie doit recevoir des excuses, avant que
cet incident ne se transforme en manifestation latino-américaine. Il est
d'ailleurs peut-être déjà trop tard ?"
Enfin, en
Argentine, La Nación revient sur l'attitude de l'Union européenne, qui est
passée de la colère – face aux révélations d'espionnage des Etats-Unis – au
ridicule. "La lamentable odyssée vécue par le président de la Bolivie
oblige à se demander si l'indignation des dirigeants européens quelques jours
auparavant n'était pas juste une manipulation diplomatique pour calmer
l'opinion publique et si les gouvernements n'étaient pas soumis au diktat de
Washington." De son côté, Página 12 titre : "Cinq siècles
semblables", en référence aux déclarations de Cristina Kirchner qui a
affirmé, à propos de l'incident, que la "Vieille Europe conserve encore
des vestiges d'un colonialisme qui humilie le continent sud-américain".
- Les chefs d'Etat sud-américains solidaires de la Bolivie
Le quotidien bolivien Página Siete rapporte les réactions
de plusieurs chefs d'Etat de la région. Pour la présidente du Brésil, Dilma
Rousseff, c'est toute l'Amérique latine qui est affectée et pas seulement la
Bolivie, et cela met en danger le dialogue entre les deux continents. Son
homologue argentine Cristina Kirchner a choisi Twitter, comme elle en a
l'habitude, pour s'exprimer : "Définitivement, ils sont tous fous. Un chef
d'Etat et son avion ont une immunité totale." L'Equatorien Rafael Correa a
aussi choisi ce
réseau social : "Ce qui est contre la Bolivie est contre tous." Le
Péruvien Ollanta Humala a assuré que l'Amérique latine attendait une
explication de la part de l'Europe. Enfin, le gouvernement vénézuélien a parlé
d'une "agression grossière et brutale".
Dessin
de Martirena, Cuba.
Source Courrier International
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