La marche
Marcher est vivement conseillé pour les
seniors. Les fameuses « 30 minutes de marche active » semblent
constituer la panacée pour profiter de tous les bénéfices de l’exercice. Qu’en
est-il vraiment ? Comment optimiser votre programme ?
Par le Docteur Stéphane CASCUA, médecin du sport.
À
l’origine de la promotion et de l’excellente image de la marche on trouve de
nombreuses recherches médicales confrontées à une réflexion sociologique et
politique. Dès les années 80, PAFFENBARGER indique que les tous premiers effets
favorables de l’activité physique se manifestent à partir d’une dépense
énergétique hebdomadaire de 500 à 1 000 kilocalories. Voilà qui correspond à
une durée de 2 heures à 4 heures de marche par semaine. D’autres articles
viendront confirmer cet ordre de grandeur. Notez d’emblée qu’à ce niveau
d’activité les bienfaits sont significatifs mais restent modérés. Le risque
d’infarctus, d’hypertension artérielle, d’excès de cholestérol et
d’autres maladies dites de civilisation diminue légèrement. Ainsi, la
probabilité de survenue de maladie cardiovasculaire est réduite de 15 à 30 % et
celle du diabète de 6 %. Sachez aussi que les bénéfices continuent de croître
jusqu’à 3 500 kilocalories hebdomadaires soit l’équivalent de 10 kilomètres de
course par jour. Dans ces conditions le risque de crise cardiaque est divisé
par 3.
- Après la médecine, la sociologie et la politique
À la
rubrique sociopolitique, il faut admettre que la marche est très facile à
pratiquer, même sans tenue de sport, même pour aller travailler. De surcroit,
les études montrent que son intérêt persiste si elle est réalisée de façon
discontinue. Ainsi, les allers-retours à la photocopieuse conservent leur
pertinence scientifique tout au long de la journée ! Mais l’INSERM indique
encore de nombreux freins à la marche quotidienne : absence ou mauvais état des
trottoirs, obscurité, sensation d’insécurité. De fait, elle est encore plus
difficile à mettre en place à la campagne qu’à la ville. Contrairement à une
idée reçue, les enquêtes mettent en évidence que vivre en zone rurale ne
favorise pas l’activité physique. Au contraire, le porte à porte en voiture y
est beaucoup plus systématique. Quant à faire la promotion d’autres activités
sportives, les politiques sont moins enthousiastes. Lorsque l’intensité de
l’effort augmente, l’équilibre « risque/bénéfice » devient plus
précaire et un couteux bilan médical est parfois nécessaire. De plus, si ces
démarches amènent toute la population à la piscine ou sur les terrains de
tennis, les collectivités locales se verront rapidement reprocher leur manque
d’infrastructures. Décidément, mieux vaut proposer à chacun de marcher dans la
rue…
- Le cœur est sollicité… mais pas assez
Il n’en
reste pas moins vrai que la marche recèle bien des intérêts pour la santé. Elle
répond presque en totalité à la définition du sport d’endurance : activité
physique sollicitant le cœur à intensité moyenne grâce à l’utilisation d’une
volumineuse masse musculaire notamment celle des membres inférieurs. En marche
à pied, le niveau de travail cardiaque est plutôt faible mais nous trouverons
des astuces pratiques pour y remédier ! Certaines études montrent qu’elle
permet d’améliorer le pronostic vital… et même la VO2 max… chez des patients
sortant des services de cardiologie. Cette constatation s’explique aisément
grâce à la notion essentielle d’ « effet d’entraînement ». Vous
progressez lorsque vous effectuez un peu plus d’exercice que d’habitude. En
pratique, vous comprenez pourquoi la marche à pied est bénéfique pour la santé
du sédentaire repenti et sans grande efficacité pour le coureur de fond
assidu ! Bref, c’est mieux que rien et c’est indispensable pour commencer
le sport progressivement ! Une bonne façon de compenser le manque
d’intensité cardiovasculaire de la marche est de prolonger sa durée. En effet,
les études corrèlent volontiers les bienfaits de l’activité physique à la
dépense énergétique. Cette dernière est principalement liée à la distance
parcourue et relativement indépendante de la vitesse. Puisque, le plus souvent,
on court deux fois plus vite qu’on ne marche, 30 minutes de marche correspond à
15 minutes de footing. Ainsi, en pratique, il est vivement conseillé
d’atteindre progressivement 1 à 1h30 de marche par jour pour profiter
pleinement des bienfaits d’une activité d’endurance.
- L’appareil locomoteur se renforce… mais pas assez !
Chaque
pas impacte la structure osseuse, crée des microlésions qui sont à l’origine
d’une réparation plus solide. Logiquement, les études montrent que la marche à
pied est efficace pour lutter contre l’ostéoporose. D’autres mettent en
évidence que la course est plus efficace. Même les femmes ménopausées profitent
d’un peu de trottinement au sein de leur programme. Bien sûr, lors des
déplacements à pieds, les muscles des jambes travaillent et même ceux du dos.
S’ils sont faibles, ils se renforcent… s’ils sont forts, ils ne
progressent pas ! Le cartilage bénéficie de cette activité douce et
fonctionnellement essentielle pour préserver son autonomie. Ainsi, la marche
est efficace pour lutter contre l’arthrose. Une étude fait référence. Des patients
victimes d’arthrose de genou sont répartis en 3 groupes. Le premier se repose,
le second fait de la musculation, le troisième insiste sur la marche. Comme
vous le devinez, c’est ce dernier qui présente le moins de douleur et la plus
grande aptitude à bouger à la fin du protocole. La marche améliore l’équilibre
spécifiquement lors de cette pratique mais reste de fait peu efficace pour se
récupérer en cas d’incident de type glissade ou brusque irrégularité sur le
sol. Là encore, nous allons vous proposer de booster cette activité pour la
rendre plus efficace…
- La marche avec options « cardiovasculaires » !
Pour
accroître le travail du cœur, les instituts de prévention vous parlent de
« marche active », c’est bien ! Mais, comme vous l’avez compris,
la vitesse idéale dépend de vos aptitudes. Si initialement, il est recommandé
de renouer avec le mouvement tout en restant « en aisance
respiratoire », il est rapidement conseillé de percevoir un « très léger
essoufflement ». Les plus aguerris recherchent alors une intensité telle
qu’ils puissent « parler mais pas chanter ». Dès que vous avez
retrouvé la forme, l’allure de marche efficace pour le cœur est incompatible
avec la vie quotidienne. À cette cadence, vous risquez fort de bousculer tous
ceux qui déambulent sur le trottoir ou d’arriver ruisselant au bureau. La marche
active devient vite une pratique sportive à part entière nécessitant d’enfiler
une tenue adaptée et de s’octroyer un peu de temps. Cependant, quelques astuces
peuvent vous aider à vous rapprocher de ce niveau de sollicitation. Pour ne
rien gâcher, elles contribuent aussi à votre renforcement musculaire !
- La marche avec « options musculaires » !
N’hésitez
pas à prendre un peu de poids… transportez vos affaires avec un sac à
dos. Voilà qui fait aussi travailler vos muscles longeant la colonne !
Dans le même esprit, ne ronchonnez plus lorsque vous ramenez quelques
commissions à pied. Portez deux sacs de poids comparable et modéré peut
constituer un véritable exercice de musculation. Pour rendre cette pratique
plus ludique et plus efficace, amusez-vous à faire quelques exercices. Pliez
les coudes, montez les bras sur le côté, en avant et arrière, etc. Si vous
croisez vos voisins, nul doute, vous allez les impressionner !
Discrètement, faites des pauses ou posez vos cabas de temps à autre comme si
vous faisiez des séries de musculation. Chargé ou non, pensez aux rues en
pentes et aux escaliers, vos cuisses et votre cœur apprécient cette
sollicitation. Lors de vos balades spécifiques, prenez des bâtons et optez pour
la marche nordique. Ainsi, vous associez de façon très efficace renforcement
musculaire et augmentation du travail cardiaque. Dans vos moments de
disponibilité, la randonnée sur le relief et en terrain varié transforme la
marche en une activité sportive beaucoup plus complète. Le cœur travaille
longtemps et plus intensément en côte. Les muscles aussi sont mis à
contribution plus vigoureusement, surtout si vous portez un sac à dos et si
vous utilisez des bâtons. Votre système nerveux peaufine votre équilibre dans
les descentes caillouteuses. Ainsi, ces grandes balades dominicales associées à
une préparation quotidienne à l’aide de bonnes séances de marche active
peuvent constituer un vrai « programme santé forme » pour le
sénior.
- La marche vous pousse au maximum !
On peut
reprocher à la marche usuelle son manque d’intensité pour garder le jeune
sénior en forme. À l’inverse, la randonnée en côte amène parfois le sénior âgé
au maximum de ses aptitudes cardiovasculaires. Les constatations de
terrain sont là pour le prouver. Je côtoie des retraités actifs et branchés qui
aiment à utiliser un cardiofréquencemètre. Lorsqu’ils crapahutent
vigoureusement sur le relief, ils approchent leur fréquence cardiaque maximum.
De façon comparable, un test progressif de marche sur tapis roulant en pente,
est souvent utilisé par les cardiologues pour mener à bien leur épreuve
d’effort maximum chez les seniors. On parle de « protocole de BRUCE ». De fait,
vous comprenez pourquoi ce type de bilan se révèle souvent nécessaire pour
valider une simple aptitude à la randonnée chez un senior actif !
Source SantéSportMag
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