Cholestérol, nouvelles recommandations américaines
Ces nouvelles recommandations entérinent l'abandon
de valeurs cibles en "bon" et "mauvais" cholestérol. Et
préconisent un usage étendu des statines.
Les statines, qui abaissent le taux de
LDL-cholestérol sanguin, devraient maintenant être prescrites à quelque 33
millions d’Américains sans maladie cardiovasculaire qui présentent un risque de
7, 5% ou plus de faire un accident cardiaque ou un AVC dans les 10 prochaines
années.
Il aura
fallu près de 10 ans pour que l'American College of Cardiology (AAC) et
l'American Heart Association (AHA) éditent ces nouvelles recommandations
("guidelines"). Leur impact se fera probablement sentir au-delà de la
seule communauté cardiologique américaine : quelles seront leur répercussion en
France et en Europe ?
Jusqu'à
présent, l'objectif d'un traitement était d’atteindre un taux souhaité ou idéal
de "bon" cholestérol (comme on appelle improprement le
HDL-cholestérol) et de "mauvais" cholestérol (LDL-cholestérol;
les recommandations européennes de 2012 préconisent ainsi un taux de
LDL-cholestérol inférieur à 0,7g par litre ou sa réduction d’au moins 50% si le
risque cardiovasculaire est très élevé). Ces objectifs chiffrés sont désormais
abandonnés. « Nous n’avons pas pu établir de preuve solides concernant
les valeurs cibles » commente notamment l'un des experts américains.
Il était
jusqu'à présent recommandé de débuter un traitement par statine lorsque le
risque de faire un accident cardiaque ou un AVC dans les 10 ans à venir était
estimé à 20%. Le seuil est désormais abaissé à 7,5%.
Voici les
principales modifications des nouvelles "guidelines" conjointes de
l'American College of Cardiology et de l'American Heart Association :
- Abandon de valeurs cibles du taux de LDL-cholestérol et HDL-cholestérol à atteindre sous traitement.
- Ajout au classique calcul du risque de développer un accident cardiovasculaire celui de la mesure de faire un accident vasculaire cérébral (AVC).
- Montée en puissance du régime méditérannéen.
- Modification des valeurs seuils de l’indice de masse corporelle (IMC) à partir desquelles débuter un traitement dans l’obésité.
Ces
recommandations concernent le cholestérol, l’obésité, l’évaluation du risque et
le mode vie.
- Prescrire plus largement les statines
Oubliées
aussi les recommandations qui demandaient aux médecins d’avoir pour objectif de
faire diminuer les taux de LDL-cholestérol à moins de 1g/L et même dans l’idéal
à 0,7 g/L.
Selon les
rédacteurs des nouvelles recommandations, il n’y a simplement aucune preuve sur
la base des essais qu’un traitement anti-cholestérol doive parvenir à une
certaine valeur cible de cholestérol sanguin pour être efficace. En d’autres
termes, il n'est pas démontré qu'une diminution du risque soit effective si le
HDL-cholestérol atteint 0,7 ou 0,9 g/L sous traitement.
« Nous
avons délibéré pendant des années et n’avons pu réussi à établir de preuve
solides concernant les valeurs cibles », indique le Dr Neil Stone de la
Northwestern University (Chicago). Ce que confirme le Dr Nissen de la Cleveland
Clinic (Ohio), estimant au sujet des anciennes recommandations que :
« ce n’était pas de la science. Les anciens comités les ont établi à
partir de rien ».
Résultat :
les recommandations 2013 conjointes ACC/AHA, publiées à la fois dans le Journal of the American College of Cardiology et
Circulation, ne préconisent aucun objectif chiffré quant au taux de
LDL-cholestérol ou d’autres paramètres tant en termes de prévention primaire
(chez les sujets indemnes d’accident cardiovasculaire, comme souffrant déjà de
maladie cardiovasculaire). Les recommandations n’ont donc pas validé l’adage
selon lequel « plus le taux de LDL-cholestérol est bas, mieux c’est »
(« the lower, the better »).
- Evaluer le risque d’infarctus, mais aussi celui d’AVC
Par ailleurs, jusqu’à présent, les recommandations ne
considéraient que le risque d’accident cardiovasculaire et non celui d’accident
vasculaire cérébral. Les patients peuvent calculer leur risque sur 10 ans de
faire une attaque cardiaque ou cérébrale en utilisant des
équations de risque.
Populations
à risque. Celles-ci prennent en compte l’appartenance ethnique, le sexe, l’âge,
le taux de cholestérol total, du HDL-cholestérol, la pression artérielle,
l’utilisation des médicaments anti-hypertenseurs, l’existence d’un diabète ou
d’un tabagisme. Sont potentiellement concernées les femmes blanches de plus de
60 ans qui sont fumeuses et ont une hypertension artérielle ou bien les hommes
noirs âgés de plus de 50 ans hypertendus. C’est la première fois qu’il est
possible de calculer le risque cardiovasculaire (infarctus et AVC) pour les
sujets afro-américains, dont le risque est plus élevé que chez les sujets
caucasiens.
Par
ailleurs, une équation est disponible pour évaluer le risque au cours de la vie
de développer un accident cardio ou neurovasculaire, à partir de l’âge de 20
ans.
Au total,
les recommandations américaines intègrent donc l’impact cumulé au cours de la
vie de l’ensemble des facteurs de risque pour un individu donné. En d’autres
termes, il s’agit donc, selon l’âge de l’individu, de déterminer le niveau de
risque que lui ont conféré tout au long des années l’effet synergique de
multiples facteurs de risque (taux de cholestérol, pression artérielle,
diabète, tabagisme, etc.). Ceci représente une importante évolution
conceptuelle dans la prise en charge globale des patients à risque
cardiovasculaire.
- Traitement par statine : quatre populations de patients
« Certes,
les statines réduident le taux de cholestérol, mais en fait elles ciblent le
risque cardiovasculaire global », souligne le Dr Lloyd-Jones de la faculté
de médecine Feinberg de la Northwestern University à Chicago.
Les
nouvelles recommandations préconisent un traitement par statine dans les quatre
catégories suivantes :
- Patients sans maladie cardiovasculaire ou diabète, âgés de 40 à 75 ans, qui présentent un risque d’au moins 7,5% de faire une attaque cardiaque ou un AVC dans les dix prochaines années.
- Patients qui ont déjà fait un infarctus du myocarde, un AVC ou souffrant d’une angine de poitrine instable, d’une maladie artérielle périphérique, un accident vasculaire transitoire (symptômes spontanément résolutifs du fait d’une réduction soudaine de l’apport de sang au cerveau), une intervention chirurgicale pour rétablir la circulation coronaire ou d’une autre artère périphérique (au niveau des membres inférieurs par exemple).
- Sujets de 21 ans et plus avec un taux très élevé de LDL-cholestérol ("mauvais" cholestérol), égal ou supérieur à 1,9 g/L, comme ceux avec une hypercholestérolémie familiale
- Individus avec un diabète de 1 ou de type 2 âgés de 40 et 75 ans (avec un taux de LDL-cholestérol compris entre 0,7 et 1,89 g/L, sans signe de maladie cardiovasculaire).
Chez les
patients présentant une maladie cardiovasculaire imputable à l’athérosclérose,
une statine devrait être utilisée pour atteindre une réduction de la
concentration en LDL-cholestérol d’au moins 50%, sauf contre-indications ou
survenue d’effets secondaires. Dans ce cas, les médecins devraient avoir
recours à un traitement plus léger en statine. De même, chez les patients dont
les taux de HDL-cholestérol (HDL-C) dépasse 1,9 g/L, une statine à posologie
élevée est recommandée pour abaisser de moitié les concentrations de HDL-C.
Chez les
patients diabétiques, il est recommandé de prescrire une statine qui diminue le
taux de LDL-cholestérol de 30 à 49% et d’utiliser un traitement à posologie
plus élevée lorsque le patient coure un risque de plus de 7,5% de développer
une maladie cardiovasculaire dans les dix ans.
L'obésité
traitée comme une maladie. C'est ce qui ressort des nouvelles
"guidelines", qui précisent que tout américain devait chaque année
savoir où en est son IMC, qui est un indicateur d’une possible obésité basée
sur le poids et la taille. Les personnes avec un IMC égal ou supérieur à 30
sont considérées comme obèses et doivent être traitées (78 millions d’individus
aux États-Unis). Les recommandations soulignent enfin l’importance d’une
hygiène alimentaire et de l’exercice physique. Elles insistent notamment sur le
fait que la consommation de viande rouge et d’aliments et de boissons sucrées
devrait être limitée, et que celle de fruits, de légumes, de céréales
complètes, de produits à faible teneur lipidique, de noix, de volaille et de poissons
devrait en revanche être encouragée. La consommation de sel devrait également
être limitée.
Source : sciencesetavenir.com
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