Derrière le progressisme
de Macron, l’immobilisme ?
« Si nous
voulons que tout reste tel que c’est, il faut que tout change. » Cette
phrase du roman Le Guépard incarne à la perfection la politique qu’est en train
de mettre en place Emmanuel Macron.
Il
y a soixante-dix ans décédait Tomasi De Lampedusa, auteur du roman Le Guépard, à l’origine d’un concept de
science politique, tiré de la phrase la plus célèbre du roman, prononcée par
Tancrède : « Crois-moi mon petit oncle, si
nous ne nous en mêlons pas, ils vont nous fabriquer une république. Si nous
voulons que tout reste tel que c’est, il faut que tout change. »
Changement en surface, statu quo
en profondeur
Ainsi
naissait le « gattopardisme », synonyme de changements spectaculaires en
surface… pour mieux préserver le statu quo des choses profondes. Notre note
récente pour l’Institut Thomas More1
sur le programme économique de LREM montre combien ce plan de réformes, loin de
rompre avec l’atavisme étatique et bureaucratique de la France, s’inscrit dans
la continuité du compromis social-démocrate Hollande-Valls-Macron.
Emmanuel
Macron sera-t-il un président réformateur ? Il est permis d’en douter quand on
analyse de près le programme de LREM. Au-delà d’acrobaties fiscales comme
le basculement de certaines cotisations sur la CSG ou la transformation du
CICE, il ne prévoit ni baisse des prélèvements obligatoires ni diminution de la
dette publique.
Des mesures non financées
Certaines
mesures essentielles (étatisation de l’assurance chômage, ISF immobilier,
nouvelle taxe d’habitation, indemnités chômages pour les démissionnaires) ne
sont tout simplement pas financées alors qu’Emmanuel Macron prétend respecter
nos engagements européens, se livrant ainsi à un jeu de dupes avec notre
partenaire allemand.
Ces
mesures font fi de toute politique réelle de l’offre et font reporter
l’essentiel de l’effort d’adaptation sur certaines catégories précises :
retraités, propriétaires immobiliers, investisseurs. Nous aurons rarement vu
dans notre histoire économique de telles catégories ainsi ciblées au nom de la
lutte contre une suppose économie de la rente.
Le jacobinisme au pouvoir
De
la même manière, LREM fait fi de la richesse de nos territoires, de nos PME,
pour se concentrer sur les seules grandes entreprises et renforcer le
jacobinisme dans notre pays : les clivages Paris/territoires, Grandes
Entreprises/PME, Start Up/ Industrie, sont artificiellement mis en exergue pour
justifier un programme fondamentalement déséquilibré.
Même
la réforme annoncée du marché du travail parait bien pusillanime, dans la
mesure où elle ne remet en cause aucune des vaches sacrées françaises :
35h, distinction CDD/CDI, seuils d’employés. La modification annoncée du RSI
est emblématique à elle seule de l’approche Macron : au lieu de remettre en
cause l’ubuesque calcul actuel des cotisations et leur gestion, on se contente
de déléguer la gestion des entrepreneurs au régime général…
De
même, loin d’imposer une règle d’or d’équilibre aux partenaires sociaux, on
étatise autoritairement l’assurance chômage. Ce gattopardisme français pourrait
permettre une amélioration de l’économie, mais très graduelle, limitée,
dépendante de la conjoncture et surtout des taux d’intérêt. Un programme
insuffisant pour sortir la France de l’ornière en cinq ans, surtout en cas de
nouvelle récession mondiale.
- “Les Failles du Programme Économique de la Republique en Marche”, Institut Thomas More, 7 Juin 2017.
Source
contrepoints.org
Par Sébastien Laye.
- Sébastien Laye
HEC, IEP, Sébastien Laye a développé des sociétés dans le secteur financier aux États-Unis au cours des cinq dernières années, après une carrière en fonds d’investissement et en banque. Il est franco-américain et écrit régulièrement pour L’Expansion ou FigaroVox. Il est chercheur associé à l’Institut Thomas More.
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