Sergio Larrain
Cette
image stupéfiante de fillette suivie par son ombre dans un escalier du port de
Valparaiso est signée Sergio Larrain. Un coup de chance ? Mieux ?
« un miracle », disait le
photographe chilien. « Pour faire une
bonne photo, expliquait-il, il faut
partir de bonne humeur le matin à l’aventure, en marin qui hisse sa voile.
Errer, regarder, dessiner et regarder encore, jusqu’à ce que l’on sorte du
monde connu pour entrer dans ce que l’on n’a jamais vu. C’est alors que les
images apparaissent. »
Ami
de Neruda, admiré par Cartier-Bresson (qui le fait entrer chez Magnum), ce fils
d’architecte, né en 1913 à Santiago, est devenu un mythe dans l’histoire de la
photo.
Après
avoir acheté à 18 ans un Leica – il trouvait l’objet « beau » -, le jeune homme abandonne ses
études d’ingénieur pour le photojournalisme. Il parcourt le Proche-Orient,
l’Europe, et présente en 1949 ses premières visions personnelles : clichés
d’un Londres brumeux traversé de gentlemen fantomatiques à chapeau melon. En
1957, dans un escalier de Valparaiso, son terrain de prédilection, les deux
fillettes n’ont pas, elles non plus, l’air tout à fait arrimées à la terre
ferme. Toute la singularité de Larrain est là, dans cet art de faire surgir du
quotidien des personnages de fiction. Ses cadrages complexes, souvent réalisés
au ras du sol, à hauteur de chien errant, compriment les sujets dans un univers
d’une inquiétante étrangeté. Depuis 1971, le photographe vivait en ermite dans
un hameau perdu du Chili, pratiquant le yoga et se nourrissant de raisins secs.
Il refusait les visites. Dans une correspondance abondante, il appelait ses
amis à renoncer à leur ego, seule façon de sauver la planète pour cet
écologiste de la première heure. Sergio Larrain est mort le 7 février 2012. Il
avait 81 ans.
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