D-DAY : l’Afrique débarquée !
François Hollande et le peuple
français saluent la mémoire de tous ceux qui ont contribué au débarquement du 6
juin sur les côtes normandes. L'Afrique n'est pas conviée. Pourtant, sa
contribution a été importante. Une énième ingratitude pour cet éditorialiste Guinée
Conakry Info Boubacar Sanso Barry.
Pas de
représentants de l’UA [Union africaine], de chefs d’Etat ou d’anciens
combattants en provenance de l’Afrique. En soi, c’est là une négation du
sacrifice que les Africains ont consenti aux Alliés pour que le débarquement
et, plus globalement, la victoire soit possible. Mais ils n’en sont pas à leur
première !
Naturellement,
si l’on considère uniquement ce qui s’est passé à la date du 6 juin, on
pourrait ne pas voir l’éminent rôle qui a été celui de l’Afrique et des
Africains dans la victoire des forces alliées. Si l’on se met dans cette
perspective des plus étroites, on comprendrait que Barack Obama, la Reine
Elisabeth II ou encore Stephen Harper soient aux premières loges. De ce point
de vue, on comprendrait même que les ennemis d’hier que sont notamment
l’Allemagne, la Pologne, l’Italie, etc. soient également conviés. De ce
point de vue donc, même la venue du turbulent Vladimir Poutine ne saurait
surprendre. Et c’est décidément ainsi que les organisateurs de la cérémonie
d’aujourd’hui perçoivent les choses.
Aucun tirailleur
Autrement,
l’Afrique aurait au moins été représentée parmi les 800 vétérans étrangers
attendus. Malheureusement, aucun tirailleur ne sera du rendez-vous. Ils ont été
oubliés. Comme ils l’ont toujours été, du reste. De la part de la France et du
monde, c’est une ingratitude flagrante à l’égard du continent africain. Parce
qu’en effet, s’il est vrai que les Africains n’ont peut-être pas fait partie
des troupes qui ont débarqué en Normandie, ils étaient là durant tout le
processus qui a précédé ce jour historique.
L’Afrique
était notamment là, servant d’assise territoriale et de cadre de
repositionnement pour les forces alliées. Si elles n’avaient pas eu l’Afrique
comme base arrière, les puissances alliées auraient certainement souffert de
l’occupation du canal de Suez par l’Italie ou par celle des territoires
asiatiques par les Japonais.
249 000 Africains mobilisés
Or,
l’implication du continent berceau de l’humanité ne s’était point limitée à
l’utilisation de ses ports et aéroports. Elle a également contribué à l’effort
de guerre en y envoyant ses braves fils et en donnant de ses immenses
richesses. A propos, des historiens estiment qu’entre 1940 et 1944,
ce sont quelque 169 000 combattants qui furent mobilisés dans l’Ouest
africain britannique. Pour ce qui est des colonies françaises, les mêmes
auteurs estiment à 80 000 le nombre de combattants mobilisés dans le cadre
des campagnes de “la France libre”. Une bonne partie n’est jamais revenue du
front. L’Afrique fut également sollicitée pour participer aux dépenses
militaires.
L’ombre du discours de Dakar
Comme on
le voit donc, contrairement à ce qui est incarné dans la cérémonie de ce jour
en Normandie, la contribution africaine à la victoire contre l’Allemagne nazie
n’est pas des moindres. L’Afrique a offert son sol comme champ de bataille, ses
fils comme combattants et ses avoirs comme contributions financières. Mais 70
ans après, on fait comme si elle n’avait rien fait. C’est à croire que
l’objectif est de falsifier l’Histoire, en gommant la partition que les
Africains y ont jouée.
Décidément,
[l’ancien président français] Nicolas Sarkozy n’est peut-être pas le seul à
penser que ''l’Afrique n’est pas assez entrée dans l’histoire'' ! En
vérité, certains maîtres à penser tiennent toujours à la ''débarquer'' de
l’Histoire. Mais, ça, c’est une autre histoire…
Photo: Le 6 juin 2014, au Château de Benouville, à l'occasion de la commémoration du 6 juin 1944 -AFP/Saul Loeb
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