Obésité législative
La France dispose d’un
nombre d’atouts extraordinaires : une géographie bénie des dieux, une
démographie dynamique, un réseau de transports exceptionnels, un tissu de
petites entreprises innovantes et de multinationales rayonnantes, des
ingénieurs que le monde nous envie… Notre pays aurait tout aujourd’hui pour
être un mastodonte de l’économie mondiale, un concentré fulgurant d’innovation,
le chef de file de la nouvelle révolution industrielle, une terre d’accueil
pour tous les entrepreneurs du monde, une Silicon Valley géante, « the place to be ». Pourtant, la
France attire de moins en moins les investisseurs. Les nouveaux Investissements
Directs Etrangers (IDE) en France ont par exemple chuté de 77% en 2013, pour
tomber à 5,7 milliards de dollars. C’est beaucoup moins, bien sûr, que les
États-Unis (159 milliards) ou la Chine (127 milliards). Mais c’est surtout
moins que le Royaume-Uni (53 milliards), l’Allemagne (32,2 milliards) et même
l’Espagne (37,1 milliards) ! Qu’est-ce qui fait donc cruellement défaut ?
Parmi les raisons qui
sont communément évoquées, il y a la complexité de notre système administratif
et fiscal. Le Journal officiel est ainsi passé de quinze mille à vingt-trois
mille pages annuelles en vingt ans, et le recueil des lois de l’Assemblée de
433 pages en 1973 à près de 4 000 pages en 2004. Le code général des impôts,
lui, fait 3 450 pages… Quant au code du travail, il pèse un kilo et demi et
s’alourdit de l’équivalent d’une page tous les 3 jours !
Montesquieu écrivait
dans De l’esprit des Lois que « les
lois inutiles affaiblissent les nécessaires ». Notre littérature juridique
est devenue obèse. Nous devons aujourd’hui avoir le courage de clarifier ces
textes, et même, pour certains, les repenser en profondeur. En particulier, le
temps est venu de réécrire un nouveau code du travail et un nouveau code
général des impôts parce que ces deux pavés indigestes font obstacle à l’esprit
d’entreprise. Oui, réécrire. Car toute modification à la marge les rend à
chaque fois plus illisibles et incompréhensibles. Et pour entreprendre,
innover, accepter de prendre des risques, il nous faut des règles du jeu
claires et limpides.
D’ailleurs, s’agissant
du code du travail, il nous faudra en finir avec ces effets de seuil qui
brident la croissance et l’emploi.
En France, un grand
nombre d’obligations légales (sociales, fiscales ou réglementaires) viennent
s’ajouter lorsque l’entreprise atteint certains seuils (le plus souvent 10, 20,
50 ou 250 salariés). Un exemple : à partir de 50 salariés, une entreprise est
tenue de créer un comité d’entreprise. Une contrainte coûteuse, qui fait que de
nombreuses entreprises demeurent cantonnées durablement à un effectif de 49
salariés, alors que leur développement aurait dû les conduire à recruter
davantage. Les chiffres de l’Insee parlent d’eux-mêmes : il y a en France
environ 1 200 entreprises de 47 salariés, 1400 entreprises de 48 salariés, 1600
entreprises de 49 salariés, et… 600 entreprises de 50 salariés.
Il y aurait pourtant
une façon simple d’éliminer de tels effets de seuil : il s’agirait de
conditionner les contraintes sociales, fiscales et administratives non pas à
l’effectif de l’entreprise, mais à sa marge brute (c’est-à-dire à la différence
entre le chiffre d’affaires et le coût de revient des biens ou des services) !
Contrairement à la démarche légitime qui consiste à refuser de recruter pour ne
pas atteindre certains seuils, aucun chef d’entreprise ne limitera son chiffre
d’affaires pour éviter certaines obligations ! Les contraintes seront ainsi
intimement liées aux performances de l’entreprise, et seront donc de ce fait
plus acceptables !
L’heure est grave.
Notre pays traverse une crise extra-ordinaire. L’opinion publique est en émois.
Des ferments révolutionnaires sont à l’œuvre. Pourtant, le sursaut tient à peu
de choses. C’est la raison pour laquelle le temps est venu d’en finir avec tous
ces verrous qui nous brident et empêchent notre pays de rayonner. Il est encore
possible de reprendre notre destin en main et de faire de la France un paradis
pour vivre et entreprendre. Mais nous devons faire vite : le temps joue contre
nous.
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