Libérons-nous
Stéphane Hessel préconisait naguère aux autres
de s’indigner, qui est le verbe de l’impuissance par excellence et qui va de
pair avec revendiquer des « droits à » et tendre la main pour
recevoir. Dans un court essai, Pascal Salin propose aux Français un autre
impératif, qui est une invite à l’action libre et à la responsabilité
respectueuse des autres, auxquelles il s’associe :
« Libérons-nous! », et sans lesquelles il n’est pas de dignité
humaine.
Se libérer de quoi ?
De l’État, qui maintient les femmes et les hommes en esclavage, puisqu’il prend
les décisions à leur place en matière de santé, d’éducation, de logement ou,
même, de culture, alors qu’ils savent pourtant mieux que lui ce qui convient à
leurs besoins. En intervenant dans le domaine de la santé, notamment en
limitant la libre rémunération des médecins, l’État raréfie pour eux l’offre de
soins médicaux. En intervenant dans le domaine de l’éducation, l’État leur
enlève une responsabilité qu’ils ont pourtant exercée pour faire naître leurs
enfants. En intervenant dans le domaine du logement pour limiter les loyers,
l’État raréfie les logements disponibles pour eux et provoque l’augmentation de
leurs loyers. Sans les prélèvements obligatoires, impôts, taxes, cotisations
diverses et variées, qui donnent du pouvoir aux hommes de l’État, qui dépensent
cet argent sans compter, ils jouiraient d’un pouvoir d’achat qu’ils ne peuvent
même plus imaginer. Or tout cet argent qui leur est confisqué est le fruit de
leurs efforts et ils devraient pouvoir en disposer eux-mêmes à leur guise.
Comme le rappelle
Pascal Salin : « Les êtres humains sont
des êtres sociaux, c’est-à-dire que leur vie nécessite l’existence de liens
avec d’autres humains ; ce qui n’empêche pas chacun d’avoir sa
personnalité. » La civilisation est faite de ces liens tissés entre
eux sous forme d’accords aux multiples modalités, que l’on peut appeler
contrats même s’ils ne sont pas écrits : « Le
contrat met en relation deux personnes (ou deux ensembles de personnes, par
exemple des entreprises) et si un contrat existe, c’est évidemment parce qu’il
est satisfaisant pour les deux co-contractants. Si le contrat est librement
décidé et signé, il rend impossible toute domination des uns par les autres :
les contractants partagent la même liberté et la même dignité. »
Parmi ces contrats il
en est un, le contrat de travail, sur lequel Pascal Salin rappelle quelques
vérités oubliées : « Dans une société
d’hommes et de femmes libres, chacun entre librement dans un contrat et en sort
librement sans que l’un des deux partenaires puisse imposer sa volonté à
l’autre. Si un salarié n’est pas satisfait de son employeur, il peut le quitter
et en trouver un autre ; symétriquement, si un employeur n’est pas satisfait de
son salarié, il devrait pouvoir en chercher un autre. » La société
française n’est justement pas une société d’hommes et de femmes libres. En
effet un des co-contractants, l’employeur, est présenté comme un exploiteur,
dont il faut protéger l’autre co-contractant, l’employé, rompant ainsi la
symétrie entre eux. Comment protéger l’employé contre son employeur ? En
rendant son licenciement plus difficile. Seulement, « les employeurs potentiels hésitent davantage à embaucher des
salariés s’ils savent qu’ils auront du mal à les licencier s’ils ne donnent pas
satisfaction ou si les circonstances nécessitent une réduction des
effectifs. » C’est pourquoi, « la
vraie politique d’emploi ne consiste pas à rendre les licenciements difficiles,
mais à supprimer les obstacles à l’emploi [...], tous ces obstacles qui rendent
difficile pour les salariés de trouver un emploi ou d’en retrouver un
lorsqu’ils ont perdu celui qu’ils avaient. »
Comment retrouver la
croissance et le faible chômage que la France a connus au cours des années 1950
à 1970 ? En tournant le dos à tout ce qui la paralyse depuis le début des
années 1980. Comment ?
- En permettant à l’innovation de jouer son rôle dans la création de richesses, c’est-à-dire en ne décourageant pas l’entrepreneur-innovateur : « Pour qu’un entrepreneur mette en œuvre une innovation et accepte de prendre en charge les risques correspondants, il faut qu’il puisse espérer une rémunération satisfaisante dans le cas où ses projets réussissent. » Autrement dit, en ne confisquant pas totalement, ou presque, son profit s’il en dégage un, et en permettant la constitution d’épargne pour la financer.
- En renonçant à croire que « l’économie [est] une vaste machine dont un gouvernement pourrait manipuler les leviers à sa guise » : « [L'activité économique] est le résultat d’une quantité innombrable de décisions – grandes ou petites – prises par un grand nombre d’individus qui exercent leur raison pour s’adapter au mieux à leur environnement et pour améliorer leur sort. La croissance est donc le résultat non intentionnel, et largement imprévisible, de toutes ces décisions humaines, en particulier celles qui sont prises par les entrepreneurs-innovateurs. » Autrement dit, en réduisant massivement et rapidement prélèvements obligatoires et réglementations (telles que le salaire minimum, qui conduit à ne pas embaucher du tout des employés à la productivité trop faible, et qui donc « n’est rien d’autre qu’une machine à exclure »).
- En réduisant rapidement et profondément la fiscalité qui détruit emploi et production : « Le recours à l’impôt pour financer des dépenses publiques conduit à une double destruction de richesses par rapport à ce qui se passerait si l’on avait plutôt recours au contrat libre et à la liberté d’entreprendre. En effet, ceux qui paient l’impôt sont incités à faire moins d’efforts – de travail, d’innovation, d’épargne ou d’investissement. Mais, par ailleurs, ceux qui bénéficient des largesses étatiques sont aussi moins incités à faire des efforts puisqu’ils peuvent obtenir gratuitement – ou presque gratuitement – ce qu’ils désirent et qu’ils ne pourraient normalement obtenir que par le travail et l’effort. » Autrement dit, en ne démotivant pas, par la confiscation de leurs richesses matérielles, ceux qui pourraient exercer librement leurs talents, et en ne portant pas atteinte par là même à leurs objectifs immatériels (de nature spirituelle, artistique, affective ou purement intellectuelle).
Pour vaincre le
chômage on n’a pas tout essayé, comme le prétendent hommes politiques de droite
ou de gauche, qui voudraient que l’on aille plus loin dans l’interventionnisme
étatique, les réglementations et les dépenses publiques : « On n’a pas essayé la seule recette qui
conduirait au succès, celle qui consiste à dire aux hommes de l’État:
« libérez-nous! Libérez-nous de vos réglementations étouffantes!
Libérez-nous de vos impôts écrasants! Laissez-nous faire et vous verrez ce que
nous sommes capables de faire ». »
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