Qu’attendre du prochain
président de la République ?
Au-delà des petites
phrases et des problèmes de personnes qui semblent occuper le devant de la
scène, que peut-on attendre du prochain président de la République française ?
Que peut-on attendre
du prochain président de la République française ? Au-delà des petites
phrases et des problèmes de personnes qui semblent occuper le devant de la
scène, quels sont les enjeux des vingt prochaines années ?
De façon très
concrète, il y a des sujets que l’on entend peu sur les tréteaux électoraux.
L’électeur de base apprécierait sans doute pour eux une action déterminée dans
la durée et indépendante des alternances. Prenons quelques exemples :
formation, recherche, dépense publique, protection sociale, fonctions
régaliennes.
Qu’il assure à tous une formation suffisante pour le
monde actuel
La formation de la
population est « la mère de tous les sujets » ! La France ne
peut pas progresser avec 20% de sa population active « non
qualifiée » et 20% des jeunes qui sortent de l’Éducation nationale sans le
moindre diplôme. Ajoutons-y le fait qu’on ne sait pas vraiment former un adulte
non qualifié, et on a là un grand sujet de débat sur ce que doit être la
formation en France pour le XXIe siècle !
Au-delà du bagage
minimal nécessaire pour tous (sans doute proche d’un actuel
« Bac+2 », avec beaucoup de précautions) cette formation devra aussi
augmenter fortement le nombre de chercheurs et de chefs d’entreprise
potentiels. Cette population restera certes très minoritaire, mais est la seule
« locomotive » capable d’accélérer vraiment la
« croissance ».
Qu’il augmente massivement l’effort du pays en
recherche et industrialisation
En effet, le progrès
d’une nation (et de l’humanité en général) s’obtient d’abord et avant tout par
la mise en œuvre du progrès scientifique et technologique servi par
l’augmentation de la consommation d’énergie. Ce sujet est quasi-absent du débat
public, alors qu’il dépend de deux grands leviers.
Le premier est la
Recherche proprement dite dont les crédits périclitent depuis des années, et
dans laquelle un citoyen ne peut pas investir directement. Elle est pourtant
certainement l’investissement le plus rentable que puisse faire une société
humaine ! Depuis qu’un premier « chercheur » a eu l’idée de
voler un tison à un incendie de forêt et de conserver ce feu, elle est la
source de tout progrès. En particulier l’écologie dépend concrètement très peu
des comportements individuels et très largement de la science et de la
technologie appliquées.
Le second
est l’industrialisation des résultats de cette Recherche pour les
transformer en innovations, c’est-à-dire des produits et services vendables à
des clients désireux de les acheter. C’est la seule façon de provoquer
une vraie croissance durable. Dans ce domaine, orienter l’épargne dans cette
direction fait partie des solutions efficaces : l’épargne est aujourd’hui
très largement drainée vers le financement de la dette publique.
Qu’il repense sérieusement la dépense publique
Parler de dette
publique conduit au traitement de sa cause, la dépense publique,
en augmentation constante depuis 40 ans. Actuellement, de plus en plus
d’impôts et de dette la financent peu ou prou sans jamais parvenir à équilibrer
les budgets. On ne voit émerger aucune solution sur ce point, au-delà des
incantations convenues répétées quelques mois avant chaque élection.
Pourtant, cette
question est fondamentale. Elle commence par une redéfinition des outils de
mesure (PIB en tête) qui évaluent trop souvent une illusion de
« croissance » et plongent nos dirigeants dans la schizophrénie. Dans
ces conditions, repenser vraiment la dépense publique permettra d’expliquer ce
que l’on peut attendre (ou non) de la baisse des dépenses publiques selon
la façon dont cette baisse est conduite. On en profitera pour conduire une
réflexion calme et dépassionnée sur la notion aujourd’hui confuse et
idéologique de « service public » en France au XXIe siècle.
Qu’il reconstruise totalement notre prétendu
« modèle de protection sociale »
Nos innombrables aides
sociales n’atteignent pas leur but : dans le cas contraire, il n’y aurait
aucun SDF dans les rues. Mais des centaines de milliers de personnes vivent –
plutôt bien – de la gestion de cette aide sociale par les « partenaires
sociaux » (en fait les syndicats patronaux et salariés). Personne ne parle
jamais de ces coûts de gestion. Pourtant, aucune pression à la baisse ne
s’exerce sur eux, puisque ces organismes jouissent du monopole de la protection
sociale.
Le « revenu
universel » est sans doute un élément de réflexion extrêmement fécond
dans cette voie. Et la plus importante dépense sociale est sans doute aussi
à repenser totalement : il s’agit de la retraite. Cela commence par
trouver les moyens de remettre au travail réel la tranche des 55-65 ans
pleins d’énergie ! Nous avons en effet l’un des taux d’emploi de cette tranche
d’âge les plus bas de l’OCDE.
Qu’il rétablisse les fonctions régaliennes de l’État
Il devra de surcroît
dégager les économies suffisantes pour restaurer les fonctions régaliennes de
l’État. Depuis des décennies, les dépenses régaliennes servent de
« variables d’ajustement » pour financer les autres dépenses de
l’État qui ne cessent de croître. Qu’il s’agisse de l’armée, de la police et
des douanes, sur-sollicitées et en voie d’usure rapide, ou de la justice
notoirement sous-équipée, les crédits sont en chute quel que soit le
gouvernement.
On peut enfin se
demander comment partout en France des cités, propriétés de l’État ou de
structures para-étatiques de gestion de HLM, deviennent des « zones de
non-droit » ou des « quartiers sensibles ». Et cela malgré les
dizaines de milliards engloutis depuis des décennies dans la politique de la
ville. Cela comprend aussi la politique envers les DOM-TOM y compris la
Corse à qui il faut donner des moyens de développement autres que des
subventions pour devenir des fers de lance de la France.
Qu’il ne se demande pas si les solutions pertinentes
sont « de gauche » ou « de droite »
Pour tous ces sujets,
peu importe que le prochain Président soit « de gauche » ou « de
droite » : on lui demande juste que les solutions qu’il mettra en
œuvre produisent des résultats mesurables dans les prochaines décennies ! C’est
cela seul qui donne sa légitimité à l’action de l’État – donc à l’impôt
(et à la dette) -, efficacité qui reste à mesurer vraiment.
C’est un énorme
travail, et on aimerait entendre les candidats en parler et surtout espérer
raisonnablement que le prochain Président mène une politique française
vigoureuse sur ces sujets. Les résultats devront être assez convaincants pour
que les successeurs, quel que soit leur bord, la continuent sur une bonne
vingtaine d’années. C’est ce qu’ont réussi en leur temps des personnalités
aussi différentes que Margaret Thatcher ou Gerhardt Schröder, pour ne prendre
que nos voisins immédiats.
Source contrepoints.org
Par Pierre Tarissi.
Pierre Tarissi a 64 ans, informaticien retraité, est Business Angel depuis 2011. Ingénieur Arts et Métiers (1974) et diplômé de l'ESSEC (1976), après 10 ans de gestion de production chez Citroën, il a occupé des postes de direction informatique dans le secteur des assurances avant de devenir consultant et directeur de projets dans ce secteur.
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