jeudi 20 février 2020

Ma vie d’expat’ à Boston, USA

Ma vie d’expat’ à Boston, USA

Le témoignage de Benjamin : « La mentalité du diplôme, contrairement à la France, est peu présente. Seules l’expérience et vos capacités personnelles comptent. En France, je n’avais aucun avenir. »


Boston’s Waterfront by malone545(CC BY-NC-ND 2.0)

Une petite présentation ?
Je m’appelle Benjamin, j’ai 29 ans et je suis originaire de Lorraine, plus précisément de la région de Longwy (pandémonium socialiste situé en Meurthe-et-Moselle). Je suis marié à une Américaine et nous avons un fils de vingt-et-un mois. Nous sommes arrivés aux États-Unis fin janvier 2016. Après avoir vécu pendant un mois dans le Maryland (ma femme est originaire de la banlieue de Washington DC), nous nous sommes installés dans la région de Boston (Massachusetts). L’expatriation est très récente, raison pour laquelle je propose mon témoignage d’expatrié novice.

Que faites-vous comme métier dans ce pays ? Pouvez-vous raconter brièvement votre parcours professionnel ?
Je vais commencer début avril mon premier travail aux US en tant qu’Assistant Manager dans une banque américaine à Boston, dans le quartier de Downtown.

Mon parcours est assez atypique si je puis dire ! Après avoir obtenu une Licence d’Histoire, je me suis rendu compte que cela ne m’aurait mené à rien et j’ai rebondi en m’inscrivant dans un Master professionnel général à l’Université de Metz dans lequel je me suis spécialisé en Finance Internationale.

J’ai, par la suite, travaillé pendant six années au Luxembourg en Back et Middle-Office. Résident en France, je franchissais la frontière tous les jours. Au Luxembourg, je me suis mis exclusivement au service d’entreprises anglo-saxonnes dans lesquelles la mentalité du diplôme, contrairement à la France, est peu présente. Seules l’expérience et vos capacités personnelles comptent. J’ai retrouvé cette approche aux États-Unis. En France, je n’avais aucun avenir.

Pourquoi être parti ? Pourquoi ce pays ?
Je tiens à souligner que j’ai passé les trois premières années de ma vie au Maroc, puis toute mon enfance à Mayotte. Je dois avoir en moi ce qu’on appelle le « gène de l’aventure » ! Pourtant, les États-Unis constituent ma première expatriation en tant qu’adulte. La raison vient du fait que j’accordais plus d’importance aux stages plutôt que d’aller me perdre en Erasmus dans une fac d’Histoire à Stockholm.

J’ai quitté la France à un moment où l’atmosphère devenait totalement irrespirable. La stupidité étatiste n’est pas loin de son paroxysme et l’Union européenne s’avère être incapable de répondre aux défis posés par la mondialisation et la géopolitique, tout simplement. Attention ! Loin de moi l’idée d’affirmer que tout est rose aux États-Unis, bien au contraire ! Le populisme généré par Sanders et Trump montre que les Américains sont prêts à foncer dans le mur. Nonobstant cela, les Américains ne se sont pas encore satellisés autour de l’État pour qu’il résolve leurs problèmes.

Outre mon envie d’aller voir ailleurs, ma femme a éprouvé le besoin de rentrer après huit années passées en France. Entre temps, je me suis fait la main sur la culture américaine. Par exemple, je suis fan de Football Américain et je m’entends naturellement bien avec les anglophones.

C’est en toute logique que les États-Unis ont constitué une destination à la fois affective et naturelle. Nous avons même décidé de pousser l’aventure plus loin. Plutôt que de nous installer dans le Maryland où nous disposions de nos repères, nous avons choisi de tenter notre chance à Boston. Autrement, ce n’est pas drôle !

Si on excepte son penchant pour le socialisme (Sanders a failli remporter la primaire dans le Massachusetts), Boston est une ville qui a son charme. Elle est le berceau de la Révolution américaine. Un véritable melting-pot s’opère entre architecture américaine et architecture européenne. Un aperçu de ce mélange se trouve à Copley Square où cohabitent la « John Hancock Tower » et des bâtiments plus anciens comme la « Trinity Church ». Les routes ne sont pas rectilignes à l’inverse de la plupart des grandes villes américaines, autre résultat de l’héritage européen. Je trouve Boston beaucoup moins oppressante que New York, les gens ne se marchent pas dessus !

Pour apprécier la ville, il y a le « Freedom Trail » (chemin de la liberté). Les amoureux de la marche à pied peuvent s’en donner à coeur joie. Il s’agit d’un parcours tracé de quatre kilomètres qui s’étend du Boston Common (le plus ancien parc urbain des États-Unis daté du XVIIe siècle) au site de la bataille de Bunker Hill. Le parcours, qui a pour thème la révolution américaine, fait passer entre autres par le lieu du massacre de Boston ou encore par le Old South Meeting House (où fut amorcé le Tea Party).


Guilherme Nicholas_Acorn Street(CC BY 2.0)

Vous êtes marié à une Américaine. L’obtention du visa a-t-elle été une formalité ?
Oui et non, dans la mesure où vous devriez obtenir le Visa tout en subissant la lourdeur administrative qui va avec. Ce n’est jamais facile, bien qu’étant marié à une Américaine et ayant un enfant citoyen des États-Unis. La première partie de la démarche concerne la « petition», un formulaire dans lequel ma femme effectue une demande auprès du gouvernement fédéral pour me faire venir aux États-Unis. Nous avons dû inclure des preuves de notre relation (photos de nos deux familles, récit de notre relation, etc…).

Cette première partie s’achève lorsque l’administration américaine confirme que nous avons le droit de demander un visa. Cette première partie a duré un mois au lieux des cinq ou six habituels car mon épouse se trouvait en France et non aux États-Unis. L’administration est-elle plus rapide pour ses expatriés afin de les faire revenir plus rapidement pour qu’ils paient leurs impôts ? Mystère !

Une fois le dossier accepté, la deuxième partie, beaucoup plus longue, démarre. Nous avons sollicité un visa d’époux (spouse visa) afin que je sois en mesure de travailler aux États-Unis. Pour les visas de ce type, le futur immigré doit trouver un sponsor ayant une preuve de revenu aux États-Unis au dessus d’un certain seuil. En général, le conjoint américain est le sponsor. Comme les revenus de ma femme n’étaient pas imposables aux States, nous avons demandé à une de ses amies de le faire. Finalement, une fois cette paperasse acceptée, j’ai du prendre un rendez-vous auprès de l’ambassade américaine à Paris afin d’achever les formalités administratives.

Avant cela, on m’a prié de me rendre dans un centre médical parisien reconnu par les autorités américaines pour une prise de sang (pour vérifier que je n’ai pas contracté la syphilis) ainsi qu’une radio des poumons (pour la tuberculose). Enfin, avant le rendez-vous à l’ambassade, la visite médicale est obligatoire, non chez mon généraliste, mais chez un médecin agréé par l’ambassade (service malaxage des testicules inclus).
Une fois le visa en poche, il m’a suffit de le présenter aux services de l’immigration à mon arrivée. Leur tampon a fait office de Green Card temporaire. Le précieux sésame vert est arrivé par la poste un mois plus tard. J’ai également requis un numéro de sécurité sociale lors de mes démarches ; elle est la condition sine qua non pour accéder au marché du travail, en plus du visa adéquat ou de la green card.

Dans mon cas, l’avantage du « spouse visa » est que je n’ai (presque) rien eu à faire. C’est ma femme qui s’est occupée de la gestion des taches administratives. Ça tombe bien car comme pour Thomas Thévenoud, je souffre de phobie administrative avérée.

Avez-vous eu des doutes ? Comment les avez-vous gérés ?
Si trouver un logement ou m’exprimer en Anglais ne m’a relativement posé aucun problème, mon principal doute s’est porté sur l’emploi. Quand vous avez une famille et un emploi stable (ma femme et moi étions tous les deux embauchés en CDI au Luxembourg), il n’est guère facile de tout plaquer pour faire son baluchon, notamment avec un enfant à charge. Mais pour aller au bout de ses rêves, il faut savoir prendre des risques ! Si nous n’étions pas partis maintenant, nous n’aurions certainement jamais réalisé notre projet.

Nous avons été hébergés pendant un mois et demi chez ma mère, puis pendant quelques semaines chez mes beaux-parents (au passage, je remercie tout ce petit monde d’avoir fait preuve de charité privée en nous accueillant). Il m’est déjà arrivé de regarder mon fils d’un air désolé parce qu’il n’avait pas de chez lui à proprement parler. Pour faire face à cette incertitude liée à l’emploi, il suffit de s’accrocher et de ne pas perdre les pédales, croire en ses capacités et saisir sa chance dès qu’une opportunité se présente. Nous sommes également un couple solidaire, donc cela a aidé également. Ma femme et sa positive-attitude à l’Américaine m’ont aidé à surmonter mes doutes. Bien que cette transition n’ait pas été facile, nous avons vécu de notre épargne personnelle pendant deux mois et non des allocations. Le libéral que je suis en tient une certaine fierté !

Enfin, le facteur chance a joué. Mon épouse s’est vu offrir un emploi deux semaines après notre arrivée. Quant à moi, la réponse positive est tombée au bout de six semaines.

Comme disait Oscar Wilde, « il vaut mieux avoir des remords que des regrets ». On ne vit qu’une fois.


Wally Gobetz_Boston Freedom Trail_Old State House(CC BY-NC-ND 2.0)

Parlez-nous de votre quotidien : quelles différences avec la France vous ont le plus marqué ?
Des différences assez classiques si je puis dire dont certaines s’avèreraient suffisantes pour que notre Filoche national fasse une attaque.

Quel bonheur de pouvoir faire ses courses ou se balader dans un centre commercial le dimanche ! Les « pharmacy/essentials », qui font office de pharmacie et de supermarché, sont souvent ouvertes 24h/24. La deuxième différence classique notoire est le système des pourboires. Dans les restaurants, vous payez l’addition plus 20% de celle-ci pour le service (réparti entre serveur, barman, cuisine et plonge). C’est un système que j’affectionne, bien qu’il puisse paraître désarçonnant au premier abord. Le serveur s’avère être votre allié car vous êtes son premier fournisseur de ressource. Le pourboire s’applique également dans d’autres situations. Néanmoins, en cas de doute, nous requérons l’aide de mon beau-père.

La messe chrétienne du dimanche fait parti des mœurs aux États-Unis. Il n’est pas rare de trouver plus d’une église dans un village, en fonction du type de service religieux délivré (et selon la branche religieuse). L’Église fait office de repère social (pas l’unique), et bien souvent les gens se retrouvent après la messe pendant ce qu’on appelle le « coffee hour », une sorte de troisième mi-temps chrétienne sans alcool. Chaque église dispose de son propre code. Des femmes peuvent diriger la messe (elle sont pasteur ou ministre du culte), d’autres acceptent de marier les homosexuels, etc… Bien que non-croyant, j’ai déjà assisté à des messes et croyez-moi, il y a de l’animation ! Nous sommes bien loin des curés made in France.

Je terminerai cette liste un peu succincte par le logement. La plupart des appartements ont l’air conditionné et le gros électro-ménager est déjà mis à disposition du locataire. Et avec de la chance, l’immeuble aura même sa propre salle de fitness.

Ah ! et pour l’anecdote, certaines stations services du Massachusetts ont encore des pompistes qui font le plein et qui lavent les vitres des voitures.

Est-ce que vous vous sentez encore Français ? Pourquoi ?
Après deux mois d’expatriation seulement, je ne pense avoir eu assez de temps pour m’aliéner ma propre culture, bien que j’ai pu intégrer certains éléments de la culture américaine par le biais de ma femme et de son entourage. Je ne fais pas de l’obtention de la citoyenneté américaine le Graal Ultime. Je souhaite rester le Français intégré à la famille américaine. J’ai la chance de vivre avec une Américaine, de connaître sa famille et ses amis et donc de me familiariser avec l’ « American Way of Life » plus rapidement. J’hésite encore à contacter des associations françaises. Le communautarisme, c’est vraiment très peu pour moi.

Autre chose à dire ?
Pour celles et ceux qui travaillent dans la finance et qui chercheraient à embellir leur CV aux États-Unis, il faut savoir que Boston est l’un des principaux centres financiers américains, bien que la ville soit moins développée dans ce domaine que sa grande rivale New York. La Finance s’y est développée depuis les années 70 et on retrouve des grands noms connus de la finance, tels que JP Morgan, State Street ou PWC, pour ne citer qu’eux.


Michael Linden_Washington statue_Boston Public Garden(CC BY-NC 2.0)


Source contrepoints.org

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