La fin des syndicats à la française
Avec la disparition de Marc Blondel, une page
du syndicalisme français va-t-elle se tourner ?
Les
syndicats à la française se sont toujours complus dans l’idéologie de la lutte
des classes, ce qui n’est plus le cas pour les syndicats étrangers. Mais le
discrédit qui frappe la classe politique ne va-t-il pas s’étendre au monde
syndical, dont les finances et les rouages demeurent occultes ?
La mort
de l’ancien leader syndical, Marc Blondel, peut être interprétée comme un
signe : la fin du syndicalisme marxiste et dogmatique.
Marc
Blondel, comme George Marchais, faisait partie de ces syndicalistes
doctrinaires qui s’opposaient à la moindre petite réforme, tout en profitant à
fond du système étatique. Son combat victorieux contre la réforme Juppé de
décembre 1995 avait offert une nouvelle puissance à l’opposition syndicale
marxiste en France. Et même si jean Claude Mailly se présente comme son fils
spirituel, on ne peut pas dire qu’il ait été vraiment remplacé. En tous cas, le
syndicalisme de contestation se fait beaucoup plus discret en France, depuis
quelques années. Qui s’est rendu compte, par exemple, que, le 18 mars dernier,
une journée nationale de mobilisation massive avait été organisée par quatre
grandes centrales syndicales : CGT, FO, FSU et Solidaires ? Cette
« journée » est passée presque inaperçue, contrairement à ce que l’on
aurait pu observer au milieu des années 1990. Tant mieux !
Mais
quelles sont les raisons de cette discrétion ? Car la désaffection des
syndiqués n’en est pas la seule cause, même si elle est spectaculaire. S’il est
vrai que les syndicalistes ne représentent que 4 % à peine des salariés du
privé, et ne sont présents que dans quelques entreprises publiques et à
l’Education nationale, (autant dire que personne ne leur font confiance...) -
ils participent pourtant au fameux « dialogue social » avec le
patronat et les politiques.
Cette
érosion, déjà ancienne du taux de syndicalisme, ne cesse de s’aggraver.
Ailleurs dans d’autres pays : Italie, Allemagne, Etats-Unis, Canada, etc…
les syndicalistes ont subi les mêmes revers, le nombre de syndiqués ayant
fortement diminué ces dernières années.
Il faut
dire que nulle part, ce déclin n’a été aussi rapide qu’en France. Car ici le
syndicalisme de contestation a une particularité : il est resté fidèle à
ses racines marxistes et anticapitalistes. Il suffisait de jeter un œil sur
les tracts qui appelaient à la mobilisation de ce 18 mars. Il s’agissait de
défendre, comme il se doit, le service public et les emplois publics avec
l’augmentation du salaire des fonctionnaires, tandis qu’en même temps, on
condamnait les entreprises (privées) et le système économique qui
« fabrique des chômeurs ». Les tracts critiquaient le "pacte de
responsabilité" comme la « politique d’austérité » du
gouvernement.
Faut-il
traduire ? Les slogans étatistes et marxisants s’affichaient naturellement
sur les banderoles des défilés, les patrons étant désignés comme « les
boucs émissaires du chômage en France », tandis que la baisse des charges
patronales se transformait en prétexte destiné à « remplir les poches des
actionnaires ».
Même en
Italie, où il existe une longue tradition communiste, les syndicats se sont
débarrassés de l’idéologie anticapitaliste. Mais en France, cette idéologie
perdure, qui embourbe les syndicats dans la contestation gauchiste.
La
journée du 18 mars a donc été un échec. Et il parait évident que les syndicats
n’en ont pas tiré la leçon. Ils continueront en effet sur cette voie, aussi
longtemps qu’ils resteront sous perfusion d’argent public. Car leurs finances
se portent fort bien, seulement à ce que l’on dit car la transparence n’est pas
la vertu première des syndicalistes. La classe politique de son côté se refuse
à dissiper cet écran de fumée, dans la mesure où l’on a refusé de soumettre le
rapport Perruchot au vote de l’Assemblée Nationale.
Il n’en
reste pas moins vrai que ce syndicalisme de connivence et de façade se
rapproche plus que jamais de sa fin, car le discrédit qui frappe la classe
politique va probablement s’étendre aux leaders syndicaux.
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