Anti-oxydants et cancer
Depuis des années les
diététiciens et les médecins cancérologues clament que les aliments contenant
des anti-oxydants sont bons pour la santé et qu’ils « peuvent » prévenir
l’apparition de certains cancers, pour ne pas dire « pourraient » car
l’incertitude est telle dans ce domaine qu’il valait mieux utiliser le
conditionnel afin d’éviter d’être poursuivi devant les tribunaux pour
imposture. Il y a eu de nombreuses études réalisées pour tenter de prouver que
les pommes, les carottes, les poivrons ou des noix variées comme la pistache
étaient bénéfiques pour la santé et prévenaient aussi bien l’apparition de
certaines maladies cardio-vasculaires que celle de certains cancers. Aucune
étude réalisée dans ce sens ne s’est révélée concluante. Malgré tout on a
continué à clamer que c’était bon pour la santé pour d’obscures raisons de
marketing. À qui a profité le crime, nul ne le saura jamais sinon à
quelques nutritionnistes gourous qui se sont enrichi aux dépens de la crédulité
de leurs clients crédules.
Dans un court papier
paru dans le New England Journal of Medicine
deux médecins de la Lustgarten Foundation et d’autres collègues considèrent que
les antioxydants n’ont aucun effet sur la réduction de l’apparition des cancers
mais au contraire ont plutôt l’effet inverse. Leurs travaux se basent sur la
compréhension récente de la stratégie choisie par la cellule pour maintenir un
équilibre entre les composés oxydants et leur contreparties non oxydantes, en
un mot la régulation des réactions d’oxydoréduction essentielles dans de
nombreux processus chimiques de la cellule. Par exemple l’eau oxygénée est
essentielle, en très faible quantité, pour certaines voies métaboliques et
l’eau oxygénée est effectivement produite au bon endroit et au bon moment dans
la cellule. En quantités importantes, il est reconnu que ce composé est toxique
et les cellules produisent leur propres moyens de défense pour annihiler les
surplus d’eau oxygénée, de même que la cellule dispose d’un attirail très
performant pour éliminer l’ammoniac qui est tout aussi toxique.
Il paraissait logique
pour de nombreux praticiens et diététiciens que des compléments alimentaires
adéquats riches en substances antioxydantes soient bénéfiques pour la santé car
ils contribuaient à en quelque sorte neutraliser les effets néfastes de l’eau
oxygénée, en réalité l’espèce chimique appelée radical O-singulet ou oxygène
réactif.
Or cette étude a
montré qu’il n’en est strictement rien car les substances présentant des
propriétés dites antioxydantes n’agissent pas sur les mêmes sites au sein de la
cellule car il se trouve, selon cette étude, que l’oxygène réactif apparaît au
niveau des mitochondries alors que les antioxydants présents dans
l’alimentation n’atteignent jamais ces organites subcellulaires dédiés à la
production de l’énergie dont a besoin la cellule. Bien au contraire toutes ces
substances supposées bénéfiques s’accumulent dans une toute autre région de la
cellule et leur effet est quasiment nul voire négatif pour le bon équilibre du
métabolisme cellulaire dédié à la régulation de la teneur en oxygène « actif ».
Dans le cas des cellules cancéreuse, la situation est même aggravée car les
produits contenus par exemple dans les pistaches s’accumulent et perturbent la
régulation de la teneur en cette espèce d’oxygène qui peut créer des dommages à
l’ADN nucléaire ! Cette observation conforte le fait que la radiothérapie
anti-cancéreuse fait apparaître des formes activées de l’oxygène, ce que l’on
appelle en chimie des radicaux libres, comme certains traitements chimiques
présentant les mêmes effets. Ces traitements tuent les cellules cancéreuses en
augmentant les radicaux oxygène.
Il apparaît donc de
manière contre-intuitive que l’inhibition des mécanismes réduisant les radicaux
oxygène soient plutôt bénéfiques dans le traitement des cancers, le challenge
étant de déterminer quels sont les processus régulant les schémas métaboliques
impliqués dans un tel maintien du bon équilibre entre les espèces oxydantes et
leurs opposés réducteurs. Il s’agit d’un équilibre contrôlé en permanence par
la cellule afin de préserver son intégrité, on appelle ce mécanisme la balance
redox qui a lieu en particulier au sein de la mitochondrie.
Il reste tout de même
un long cheminement pour déterminer précisément quel est le processus intime
qu’utilise la cellule pour se prémunir contre toute déviation la conduisant à
devenir cancéreuse. Cette étude a par exemple montré que les fumeurs abusant d’aliments
riches en beta-carotène, un antioxydant vitaminique bien connu, développaient
plus rapidement un cancer des voies pulmonaires ou des poumons que les fumeurs
ne suivant aucun régime particulier !
Comme quoi les idées
reçues qui ne sont fondées que sur des on-dits peuvent être particulièrement
néfastes…
Source : Cold Spring Harbor Laboratory, Long Island
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