Photo : Rudy Waks
Omar Sy : “La banlieue, je la porte en moi”
Pour son premier vrai grand rôle, Omar Sy irradie dans la comédie “Intouchables”. Entretien avec un acteur chaleureux, soucieux de ne pas tomber dans les clichés sur la banlieue, où il a grandi.
Impossible d'y couper : Omar, c'est d'abord un sourire. Un néon taille XXL qui égaye d'un coup l'hôtel parisien où il débarque, chaleureux, tout de suite copain, à peine arrivé de sa maison en pleine forêt. Petit, il a manqué d'espace dans l'appartement familial. Alors, dès qu'il a pu, il a acheté ce pavillon au milieu des arbres... qui lui rappellent la banlieue où il est né et a grandi : « Trappes, c'était une banlieue verte ! »
Omar Sy, le Omar d'« Omar et Fred », explose dans Intouchables, d'Olivier Nakache et Eric Toledano. Cette comédie, adaptée d'une histoire vraie, les deux réalisateurs l'ont écrite pour lui, après l'avoir fait jouer dans Nos jours heureux, puis dans Tellement proches, où il endossait la blouse blanche d'un médecin que tout le monde prenait pour un infirmier sous prétexte qu'il était noir... « Ils m'ont tout de suite regardé comme un acteur, même si, moi, je n'osais pas le reconnaître. Ce sont un peu mes conseillers d'orientation ! »
Il est fier du regard « juste » d'Intouchables sur la banlieue. Pour autant, pas question de se prendre pour un porte-drapeau : « La banlieue, je la porte en moi. Je n'ai pas besoin de le crier sur les toits. En revanche, je suis vigilant sur le sujet. J'ai la responsabilité de ne pas tomber dans les clichés. » Il parle de son enfance à Trappes sans acrimonie, ni angélisme : « On grandit quelque part et on n'a pas d'éléments de comparaison. On fait avec. On trouve le moyen de s'amuser et de grandir quand même. L'avenir ? Pas une carte ouverte, plutôt un GPS très limité. Un questionnaire à choix réduit et aucune des cases à cocher ne te plaît ! »
La case en plus, c'est Jamel Debbouze qui la lui propose en 1997 : il le fait venir sur Radio Nova et lui présente un certain Fred Testot. En 2000, ils commencent leur duo en animant « Le visiophon » dans Nulle part ailleurs, sur Canal+. Depuis 2005, dans le « SAV » du Grand journal de Michel Denisot, ils se marrent des clichés sur les Africains, les réacs, les homos : « On aime mélanger des différences très marquées. Montrer qu'il y a du bon, même dans ce que l'on craint. »
Omar, c'est aussi un regard. Confiant. Doux comme tout, qu'il chante C'est fini la comédie de Dalida ou qu'il parle de sa foi. Il adore la chanteuse depuis qu'il est petit. La « faute » à la télé : « C'est la seule culture qu'on a en banlieue, parce que la bibliothèque, tu laisses tomber très vite, avec la nana aux grosses lunettes qui te regarde de travers dès que tu passes la porte. » Dieu, il y croit, mais, là encore, il refuse les généralités sur la religion musulmane. « C'est perso. Juste une clé pour mieux vivre. Sur ce sujet, personne ne devrait parler à la place des autres. »
Il a des racines peuls : « C'est un peuple qui s'occupait du bétail et qui a transhumé dans toute l'Afrique. J'en ai gardé l'amour du lait ! Et quelque chose de nomade. Je suis curieux, je vais voir partout. Entre la culture française et la culture africaine, je glane ce qui me plaît. » Les Peuls sont aussi des orateurs, des griots, et le cinéma est sa manière à lui de raconter des histoires. Pour le faire le mieux possible, il répète dorénavant ses rôles avec une coach. Parce que « le naturel, cela se travaille », mais aussi, peut-être, pour mériter sa réussite. Il doit bien ça à son père, Sénégalais, et à sa mère, Mauritanienne, qui, eux, trimèrent toute leur vie « pour pas grand-chose ». Quand, adolescent, il sortait, ses parents, qui avaient toujours peur qu'on les « vire » de France, lui demandaient de ne surtout pas faire de « vagues ». « J'en ai fait, finalement, mais des bonnes ! »... Et il rit.
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