vendredi 30 mars 2012

Infos santé-Médiator


Médiator

Entre 1976 et 2009, le benfluorex (Mediator® a été vraisemblablement à l’origine de 3100 hospitalisations et de 1300 décès au minimum. Ces données, déjà évoquées, sont publiées pour la première fois par deux épidémiologistes de l’Inserm dans une revue scientifique américaine.


Agnès Fournier et Mahmoud Zureik sont deux épidémiologistes dont les travaux sont reconnus internationalement dans le domaine des pathologies cardiovasculaires notamment.
Il n’est donc pas étonnant qu’ils se soient penchés sur le cas des valvulopathies, c’est-à-dire les atteintes des valves cardiaques, chez les personnes ayant suivi des traitements par benfluorex, dont le nom commercial est le Mediator®.
Ils publient les résultats de leurs investigations dans la revue ‘Pharmacoepidemiology and Drug Safety’ du 9 février 2012.
Les auteurs ont eu accès à plusieurs bases de données. On apprend ainsi qu’entre 1976, début de la commercialisation, et 2009, date du retrait, ce sont 145 millions de boites de Médiator qui ont été délivrées. La durée moyenne d’utilisation du médicament a été de dix-huit mois.
C’est la période 2006-2009 que, les épidémiologistes ont choisi de retenir pour leur évaluation. Grâce aux données fournies par  l’Assurance maladie à partir de dossiers de 303 336 patients ayant eu au moins un remboursement en 2006 pour le Mediator, 54 % utilisant encore le produit en 2007, 39 % en 2008 et 31 % en 2009.
.
La méthode retenue par les auteurs a consisté à extrapoler le nombre de cas d’hospitalisations  pour insuffisance valvulaire entre 2006 et 2009 chez des sujets qui avaient pris ce médicament en 2006 rapportées au nombre total d’utilisateurs du produit entre 1976 et 2009.

Il y a eu, dans cette période 597 hospitalisations  pour valvulopathies chez des personnes ayant utilisé le Mediator, 320 atteintes mitrales, 270 atteintes aortiques, 77, tricuspides et 41 atteintes plurivalvulaires.

Ils ont aussi calculé qu’au moment du début de suivi, en 2006, les 303 336 personnes suivies avaient déjà consommé en moyenne 30 boites de Mediator.
Ils ont choisi de s’intéresser aux patients ayant consommé plus de trente boites. A partir des données 2006-2009 ils ont obtenu une estimation pour la période 1976-2009 du nombre de personnes utilisatrices du Mediator et hospitalisées pour valvulopathies : 4 031 patients.
Sur ces 4031 personnes, ils estiment que 3069 étaient attribuables à l’utilisation du Mediator.

Pour estimer le nombre de décès chez les utilisateurs de Mediator au cours de la carrière de ce médicament, 1976-2009, ils ont utilisé les données d’une vaste étude conduite en Amérique du Nord.
Cette étude avait montré que chez les personnes porteuses d’une atteinte valvulaire modérée à sévère, le risque de décès prématuré lié à cette pathologie était de 43 %.
Fournier et Zureik estiment donc à 1320 le nombre de décès lié à l’utilisation du benfluorex ou Mediator. Et ils pensent que le chiffre réel est sans doute encore plus élevé.

Il est évident que cette étude va être vivement attaquée, car elle enfonce sérieusement le clou.
Elle repose sur des modèles et des extrapolations. Mais les deux épidémiologistes qui font ces extrapolations ne sont pas des ‘touristes’ ou des chercheurs en mal de gloire.
Ils appartiennent à de grandes équipes internationalement reconnues en matière de mortalité cardiovasculaire. Ils n’ont aucun lien d’intérêt avec un quelconque industriel.
Le monde de la cardiologie  a, depuis le début de l’affaire, battu en brèche les travaux des épidémiologistes au prétexte, notamment, qu’ils n’avaient pas fait de telles constatations dans leur pratique.
Mais ils ne connaissaient quasiment pas ce produit, prescrit surtout par des généralistes, des endocrinologues et des gynécologues.
D’autre part, des études ont montré, que c’est sous le microscope et non pas à l’échographie qu’on mettait en évidence les lésions caractéristiques de l’usage de benfluorex.

Il faut donc espérer que ce travail bénéficiera d’analyses et de critiques au sens scientifique du terme et non pas de dénégations. Ecarter ces travaux d’un revers de la main au prétexte qu’on est un mandarin n’est pas très productif.
On devrait avoir, cependant, beaucoup de mal à réfuter les travaux de ces deux chercheurs qui ont travaillé à partir de données chiffrées solides et vérifiables.
Leur estimation s’inscrit parfaitement dans la ‘fourchette’ de l’étude menée sur une période différente par Catherine Hill et qui estime le nombre de décès attribuables au Mediator entre 500 et 2000.


Référence de l’étude :

Agnès Fournier and Mahmoud Zureik
Estimates of deaths due to valvular insufficiency attributable to he use of benfluorex in France
Pharmacoepidemiology and Drug Safety 2012.
Published online in wileyonlinelibrary.com doi: 10.1002/pds.3213

Lire également l’étude sur la cohorte de patients diabétiques et qui ont pris du benfluorex
Alain Weill et al.
Benfluorex and valvular heart disease: a cohort study of a million people with diabetes mellitus
Pharmacoepidemiology and Drug Safety 2010; 19: 1256–1262

LA RÉACTION DES LABORATOIRES SERVIER DU 09/02/2012
Les Laboratoires Servier tiennent à souligner que l’étude annoncée aujourd’hui par la presse concernant Médiator n’est pas une nouvelle étude. Il s’agit des mêmes chiffres déjà largement diffusés mais non confirmés, issus d’une étude statistique dont la méthodologie a fait l’objet de sérieuses critiques. Ces chiffres ont été simplement remaniés par les auteurs, en vue d’une publication.
Des études cliniques menées par des cardiologues sont actuellement en cours. Elles seules permettront d’évaluer l’incidence réelle des valvulopathies chez les patients traités.


Source docteurjd.com (blog santé de jd flaysakier)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire