Beaucoup de com mais peu d’idées
Manipulateur et narcissique, le futur candidat
n’est pas à la hauteur des valeurs françaises.
Déçus par
leur président, François Hollande, qui avait promis une chose et qui a fait son
contraire, les Français assistent au spectacle berlusconien du retour de son
prédécesseur, Nicolas Sarkozy. Premiers signes de ce retour, de nouvelles
photos de Sarkozy faisant du jogging à Paris ou du vélo dans sa résidence du
cap Nègre, image parue en une du Journal du dimanche.
Le doute
n’est plus permis : Sarkozy revient. Et avec lui, le spectacle. Il dit être un
homme neuf, mais bien malin qui peut faire la différence avec l’ancien :
grandiloquence dans les annonces, vacuité dans les contenus. L’ancien président
entend construire sur les ruines de son parti délabré “la première formation du
xxie siècle”. Idées ? Programme ? Il évoque un “nouveau projet”, veut
“reconstruire la politique”, “dépasser les clivages traditionnels qui ne
correspondent plus aujourd’hui à la moindre réalité”.
Autant
dire que, lors de son entretien télévisé, il ne s’est engagé sur rien de
précis, se cantonnant à son rôle de victime injustement poursuivie par des
juges qui enquêtent sur les multiples délits qu’il aurait commis. Pourquoi
veut-il revenir ? “Je n’ai jamais vu une telle colère, un tel désespoir”,
a-t-il déploré. Il ne veut pas que les Français aient à choisir “entre le
spectacle désespérant d’aujourd’hui (Hollande) et la perspective d’un isolement
sans issue avec Mme Le Pen”. Des formules reprises telles quelles du texte
qu’il avait mis en ligne l’avant-veille sur Facebook.
Big Brother
En somme,
peu de politique, beaucoup de communication, et surtout des messages à la
première personne du singulier. L’image est très étudiée. Le retour se fait par
étapes, avec la complicité des médias, afin d’obtenir la plus grande couverture
possible. Premièrement, un texte sur Facebook ; ensuite, des déclarations à la
presse ; enfin, un entretien en prime time. Tout ce dispositif médiatique pour
faire passer un seul message : me revoilà. “C’est une longue marche qui
commence”, annonce-t-il, prenant pour modèle le président Mao. Nicolas Sarkozy
assure qu’il a “changé” [formule qu’il utilisait déjà dans son discours
d’investiture de 2007].
Reste que
son retour ne suscite guère d’enthousiasme. Les Français gardent en mémoire ses
gesticulations permanentes, sa tendance à privatiser la fonction
présidentielle, ses méthodes dignes de Big Brother. Et surtout, ils n’oublient
pas qu’il est poursuivi par la justice dans le cadre de dix affaires de
corruption, de trafic d’influence, de financement occulte, d’alliances
douteuses (qu’il nie) avec ses amis Kadhafi ou Assad. Est-ce cela, un président
de la France ?
A la
figure du monarque républicain, digne, respecté et discret, on voit succéder un
personnage américanoïde, histrionique, manipulateur des médias (et de ses
amis), dans le collimateur de la justice, qui se vante d’avoir 35 000 amis sur
Facebook. Où sont la grande culture, l’élégance, la distance respectueuse d’une
institution sacralisée, chez cette espèce de Berlusconi à la française ? Est-ce
là le genre de réformes dont la France admirable a besoin pour être compétitive
dans la mondialisation ?
Ces
réformes qu’on dit inévitables et dont on ne sait pas vraiment à quelle
prétendue nécessité elles obéissent mais que les médias et les politiques
martèlent comme des vérités religieuses. Nous verrons bien. Mais une chose est
sûre : même si nul ne doute de l’énergie du personnage, son retour provoque des
réactions diverses et ne laisse personne indifférent.
Dessin de Burki paru dans 24 Heures, Lausanne.
Source Courrier International
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