Remaniement "Un choix très risqué"
Stefan Ulrich, rédacteur en chef adjoint du
service International de la Süddeutsche Zeitung
Courrier international – Que pensez-vous du
choix de François Hollande de procéder à un remaniement ?
Stefan Ulrich – C’était
un choix nécessaire. Il y avait trop d’opposition, de diversité dans l’ancienne
équipe gouvernementale. Il n’y avait pas de volonté commune. Le président
réaffirme ainsi clairement son intention de changer de cap, de réformer le
pays. Pour ce faire, il a besoin d’une équipe plus restreinte et unifiée. Mais
c’est aussi un choix très risqué. Il exclut ainsi une grande partie de la
gauche, les communistes, la gauche radicale, les Verts et une partie des
socialistes qui ne sont pas d’accord avec sa ligne politique.
Courrier international – Cette décision va-t-elle rapprocher la France de
l’Allemagne ?
Stefan Ulrich – Le
gouvernement allemand est très méfiant envers une partie du PS, des politiques
qui sont plus socialistes que sociaux-démocrates. La chancelière Angela Merkel
est certainement satisfaite de voir Hollande soutenir la politique de solidité
financière et de soutien aux entreprises. Bon nombre d’Allemands ne comprennent
pas l’hostilité des Français face à cette politique d’austérité et leur
attachement à leur modèle traditionnel de vie sociale avec un Etat qui joue un
rôle dominateur dans l’économie.
Courrier international – L’affrontement de deux logiques, croissance contre
austérité, ne risque- t-il pas de faire imploser l’Europe ?
Stefan Ulrich – Arnaud
Montebourg a justement souligné la nécessité de relancer la croissance.
L’Europe du Sud, contrairement à l’Allemagne, est confrontée à un problème de
croissance. L’Italie déplore un chômage des jeunes de presque 50 %, c’est une
catastrophe. Certains Allemands considèrent qu’il est tout simplement
impossible de conduire une autre politique pour l’Europe que celle de la
rigueur. Ils estiment que la crise qui touche le Sud est la seule faute des
gouvernements.
Mais
d’autres, comme notre ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, ont une vision
beaucoup plus fine de la situation et une conscience très nette des problèmes
économiques et sociaux auxquels sont confrontés les pays du Sud. Ils savent –
je l’espère au moins – que, dans la pratique, il est nécessaire de trouver un
compromis, avec plus de flexibilité. Il faut assainir les finances publiques
et, en même temps, trouver une politique qui fasse également place à la
croissance, pour combattre le chômage des jeunes et sortir des pays comme la
France et l’Italie de la crise.
Dessin
de Tom paru dans Trouw, Amsterdam.
Source Courrier International
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