Obligée de donner la vie
Une femme tombée enceinte suite à un viol s'est
vu refuser l'avortement, malgré sa fragilité psychologique. L'affaire ravive le
débat sur l'interruption volontaire de grossesse.
La
question de l'avortement est à nouveau au centre des débats en Irlande, alors
qu'une jeune femme, tombée enceinte après avoir été violée, s'est vu
refuser l'intervention. En Irlande, pays de forte tradition catholique,
l'interruption volontaire de grossesse (IVG) est interdite, sauf dans un cas :
si la grossesse met en danger la vie de la femme enceinte, y compris si sa
santé mentale entraîne un risque de suicide. Dans tous les autres cas,
l’avortement est illégal, même en cas de viol, d'inceste, ou d’anomalie du
fœtus.
The Irish Times revient sur l'affaire :
au mois d'avril, la jeune femme, sans-papiers, alors à 8 semaines de grossesse,
demande à avorter au motif qu’elle a des tendances suicidaires. Sans succès,
même si ce motif est légal. Du fait de sa situation irrégulière et de sa
demande d'asile en cours, elle n’a pas non plus la possibilité de se rendre au
Royaume-Uni pour avorter, comme le font de nombreuses Irlandaises.
En
juillet, à 24 semaines de grossesse, elle est hospitalisée pour tendances
suicidaires. Elle entame une grève de la faim, mais l’hôpital, par voie
judiciaire, parvient à imposer une réhydration artificielle afin de sauver la
vie de l’enfant.
Début
août, l'hôpital pratique une césarienne. La jeune femme en est seulement à 25
semaines, soit à un stade limite concernant la viabilité du fœtus. L’enfant, un
petit garçon, reçoit des soins pour prématurés et est placé.
"La tyrannie d'une minorité"
En
réaction à cette affaire, le journaliste Fintan O'Toole appelle dans le Irish Times à un assouplissement de la loi sur
l’avortement, estimant que "le régime répressif actuel ne reflète pas
l’opinion publique". L’auteur rappelle que la majorité des Irlandais est
en faveur de l’avortement en cas de viol ou d’anomalie grave qui empêcherait le
fœtus de survivre après la naissance. Pour lui, la situation actuelle est donc
"clairement un cas où une petite minorité tyrannise la majorité".
Cet avis est partagé par le Irish Independent. Dans un
éditorial, le journal demande que la loi sur l'avortement soit
révisée, mais aussi que les soins accordés aux demandeurs d'asile soient
améliorés. "Le sort de cette jeune fille questionne non seulement
l'efficacité de la loi sur l'avortement, mais aussi les prestations de santé,
qui ne répondent pas aux besoins des demandeurs d'asile - y compris en ce qui
concerne l'assistance psychologique."
"Catalogue de violations"
Après avoir fait les gros titres en Irlande, cette
polémique a atteint le Royaume-Uni. Dans le New Statesman,
une chroniqueuse s'interroge : "Quand les femmes irlandaises auront-elles
enfin le droit de dire 'non' ? La réponse est 'jamais'." Autre constat :
le cas de la femme citée est "un catalogue de violations. Premièrement,
elle a été violée (violation numéro un), ensuite les médecins lui ont
apparemment refusé le traitement dont elle avait besoin (violation numéro
deux), on lui a imposé une réhydratation artificielle (violation numéro trois)
et enfin on lui a imposé une césarienne (violation numéro quatre)" [...]
voilà la violence que l’Etat irlandais impose aux femmes."
L’autorité
sanitaire irlandaise a ordonné une enquête sur les soins dispensés à cette
femme. Le rapport sera publié fin septembre.
Dessin de Kap Droits réservés
Source Courrier International
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