La loi « Sapin 2 »
: le cercueil de votre assurance vie ?
La nouvelle loi « Sapin
2 » est un piège. Elle vise à transférer à l’Etat encore plus de pouvoir,
au mépris du droit de propriété privé des épargnants.
Un peu plus de trois mois après le vote de la loi
« Sapin 2 » en première lecture à l’Assemblée nationale (le 14 juin),
la presse grand public commence enfin à s’emparer du sujet et mesurer l’ampleur
des dégâts. Mais d’autres développements peu réjouissants, et vis-à-vis
desquels les médias ont été moins bavards, se sont fait jour. En voici une
synthèse.
Après l’adoption en première
lecture à l’Assemblée nationale, le Sénat et la Commission des finances
aggravent la situation
L’amendement à l’article 21 bis déposé par le député
socialiste Romain Colas met votre épargne entre les mains d’un “Haut Conseil”
en en renforçant les pouvoirs contraignants sur l’assurance. Les pouvoirs du
Haut conseil de stabilité financière ou HCSF étaient déjà élevés, comme je
l’expliquais dans un précédent article.
La
modification du Code monétaire et financier permettra au Haut Comité de
déterminer le rendement de votre fonds euros et de bloquer vos demandes de
rachat, d’arbitrage et d’avances sur votre contrat d’assurance-vie (voire sur
l’ensemble des contrats d’assurance-vie de droit français), si la situation
financière l’exige. Adieu rendement, liquidité et sécurité !
Suite au
vote du Sénat, la Commission des finances de l’Assemblée Nationale a voté le 21
septembre l’article 34 bis A lequel, outre les contraintes prévues par la loi
vis-à-vis du fonds euros, élargit le dispositif de plafonnement des rachats « aux SICAV, aux fonds communs de placement, aux
sociétés de placement à prépondérance immobilière à capital variable et aux
fonds de placement immobilier ». Merci au sénateur socialiste
Richard Yung à l’origine de cette initiative.
Par
ailleurs, la même Commission a modifié l’article 21 bis de la loi pour élargir
le champ d’application du dispositif de surveillance macro-prudentiel, qui
était jusque-là limité aux « seules
activités dont l’exécution dépend de la durée de la vie humaine » (amendement
N°CF3). En clair, le dispositif n’est plus limité à l’assurance-vie… Les
détenteurs d’autres types de contrats apprécieront la vision d’ensemble de nos
députés !
Côté rendement, ça s’effrite…
Standard
& Poor’s déclarait début septembre que d’ici 2020, la rentabilité moyenne
des fonds propres des assureurs se monterait entre 1% et 1,5% par an, pour
atteindre son seuil de rentabilité. Trois mois plus tôt, Olivier Mariée,
directeur des activités épargne et wealth management chez Axa France, était
moins optimiste puisqu’il déclarait que « le
fonds en euros va baisser de façon certaine de 20 à 30 points de base par an
pendant au moins les trois prochaines années. Le rendement net va donc
progressivement tendre vers… 1% ». Ces propos tenus par un insider ont le mérite d’être clairs.
1%, c’est
d’ailleurs le taux moyen des 700 milliards d’euros d’épargne réglementée que
détiennent les ménages français (sur un patrimoine financier total de 4 460
milliards d’euros à fin 2015), comme le précise l’Observatoire de
l’épargne réglementée dans son rapport annuel pour 2015. 1,09%, pour être
exact. Un niveau certes faible (quoique Michel Sapin a estimé en juillet que
0,75% pour le Livret A et 1% pour le PEL, c’est « satisfaisant »)
mais supérieur à ce qui se pratique ailleurs en Europe (0,39% en
Allemagne !).
De son côté, l’ACPR, l’Autorité de contrôle prudentiel et
de résolution a indiqué dans son étude annuelle publiée en juillet que le taux
de revalorisation moyen des fonds euros pour 2015 s’élève à 2,27%, alors que
la Fédération française de l’assurance (FFA) l’estimait à 2,30% en début
d’année. Je ne mentionne pas cette étude pour ce menu écart, mais parce qu’on y
apprend que « près de
76% des provisions mathématiques présentent un taux technique à 0%, contre 75%
en 2014 et 65% en 2012″, comme le relève L’Argus
de l’Assurance. Et oui, que voulez-vous, il faut bien s’adapter aux politiques
de manipulations des taux à la baisse !
Pour 2016, Fitch indiquait au mois d’août tabler sur un
rendement moyen de 2,1%.
On casse le rétroviseur pour voir
l’avenir en rose
Au niveau
de l’Union européenne, la mise en place prévue dès le 1er janvier 2017 de
PRIIPs (Packaged Retail and Insurance-based
Investment Products), un nouveau règlement européen sur les produits
d’investissements, a fait grand bruit. Au prétexte que « les performances passées ne préjugent en rien des performances
futures » (blague de régulateur), il s’agit de mettre un terme à la
diffusion par les sociétés de gestion d’actifs des performances historiques de
leurs fonds d’investissement pour la remplacer par celle de trois scénarios
d’estimation des performances futures de chaque unité de compte. La Commission
européenne, ou comment complexifier et rendre plus opaque une situation qu’on
voulait à l’origine simplifier !
Côté compagnies d’assurance…
Certains
assureurs ont commencé à restreindre l’accès à leurs fonds euros. Cela a
d’abord été le cas de Spirica, puis d’Apicil qui a imposé le principe d’un
minimum 30% de versement en unités de compte pour accéder à l’ensemble de ses
fonds euros à compter du 15 septembre.
Le mois
d’août enregistrait d’ailleurs la plus faible collecte mensuelle de l’année sur
les contrats d’assurance-vie, avec en particulier une décollecte de 600
millions d’euros sur les fonds euros.
Deux
autres nouvelles intervenues depuis mon dernier article sur le sujet attestent
de la mort programmée du fonds euros.
En mai,
Generali Vie annonçait que la garantie en capital pour ses nouveaux
souscripteurs serait dorénavant non plus nette de frais de gestion mais brute
de ces derniers. Inutile de préciser que d’autres assureurs s’apprêtent à
emboiter le pas au premier assureur-vie européen. La porte est ouverte à des
taux de rendements nets de frais de gestion négatifs… La mesure ne concerne
bien sûr que les nouveaux souscripteurs mais, comme le dit le sage, à part
changer un homme en femme, il n’est rien que l’État ne puisse faire !
Dans la même logique, non contents des probables
développements juridiques de la loi “Sapin 2”, certains assureurs profitent de
l’occasion pour lancer quelques ballons d’essai en direction de notre cher
personnel politique étatiste. Fin juin, c’est Thomas Buberl, le nouveau patron
d’AXA, qui a déclaré à propos du fonds euros : « La garantie totale du capital doit notamment être
repensée au profit d’une garantie partielle à laquelle on associerait un
surplus de rendement pour l’épargnant ». No comment.
Voilà pour les nouvelles du secteur de l’assurance-vie
depuis le mois de juin. Je partage avec vous une jolie définition des
interventionnistes étatiques selon Hayek :
« Personne qui n’apprend rien de la nature
humaine, de l’économie, de l’expérience, et qui répète les même erreurs encore
et encore sans se soucier du sort de ceux et celles qu’elle écrase de ses
bonnes intentions ».
Photo By: Ambient Damage – CC BY 2.0
Par Nicolas Perrin.
Source contrepoints.org
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