La France doit faire confiance à sa société
civile
Notre pays trop centralisé ne fait
pas confiance à sa société civile. La France, par dégoût des hommes politiques,
se tourne vers les extrêmes plutôt que vers des partis citoyens.
Un
sentiment de fatigue et de rejet des partis classiques européens affecte
aujourd’hui toute l’Europe. Scandales à répétition, crises, discrédit des
politiques vus comme une élite isolée… les peuples européens sont demandeurs de
changement et la France n’y échappe pas.
L’une des solutions pourrait provenir du renouvellement
de la classe politique, notamment à travers les « partis citoyens ». Non
composés de professionnels de la politique, ces partis, à l’image de Podemos et Ciudadanos en
Espagne ou Syriza en Grèce, veulent remettre
la société aux commandes et refusent les hommes politiques de carrière.
Mais,
alors que toute l’Europe voit émerger ces nouveaux partis, pourquoi la France
se tourne-t-elle davantage vers les extrêmes que vers sa société civile pour
surmonter une crise que pourtant toute l’Europe partage ?
Une situation bien française :
peu de confiance dans la société civile
La
France est certainement l’un des pays les plus centralisés d’Europe. Son
organisation politique se caractérise en effet par un État omniprésent,
considéré comme devant agir et contrôler tous les domaines : avec 57% de son
PIB consacré aux dépenses publiques, le chiffre est l’un des plus élevés dans
les pays développés. C’est le reflet d’un système politique qui ne fait pas
confiance à sa société civile, cette dernière étant vue comme secondaire face à
la machine étatique.
À cette première explication s’ajoute celle du mode de
scrutin français qui ne laisse pas beaucoup de place aux outsiders politiques.
La centralité de l’élection présidentielle, ultra médiatique, pousse à une
véritable professionnalisation de la politique où seuls des candidats de
carrière appuyés par la machine d’un parti organisé sont armés pour gagner une telle compétition.
Par
ailleurs, l’organisation de l’élection présidentielle en deux tours et avec
deux candidats au second tour ancre le pays dans un bipartisme indépassable.
Organisées dans la foulée de l’élection présidentielle et au scrutin
majoritaire, les élections législatives laissent la part belle aux grands
partis : ceux-ci bénéficient de l’effervescence de la présidentielle et du
choix collectif fait lors de celle-ci.
Une nécessité urgente : profiter
de l’expérience de la société civile
Le résultat de ce manque de diversité de la classe
politique est pourtant dangereux. « Près de 40% des parlementaires sont des fonctionnaires alors
qu’ils ne représentent que 20% de la population » assène Denis Payre, entrepreneur et fondateur de Nous Citoyens, l’un des rares mouvements politiques français se
réclamant de la société civile. Absence de recul,
de connaissance pratique et d’expérience dans les secteurs privés, ce manque de
diversité des responsables politiques se transforme vite en manque d’ouverture.
En France, les tentatives de création de « partis
citoyens » peuvent se compter sur les doigts d’une main. Parmi les plus médiatiques, on recense le Rassemblement citoyen mené par
Corinne Lepage et Nous Citoyens de Denis
Payre. Constatant une volonté des citoyens, désabusés par leurs représentants,
de se réapproprier leur destin, ces partis citoyens se différencient des partis
classiques, sans tomber toutefois dans le populisme.
Les
partis citoyens appellent au remplacement d’hommes et de femmes politiques trop
souvent éloignés du réel, par des acteurs associatifs, responsables économiques
ou universitaires. Ces partis citoyens, vecteurs de changement et
d’innovations, pourraient produire de véritables avancées. Par ailleurs, la
société civile étant caractérisée par sa nature moins partisane, on pourrait
imaginer que son retour aux commandes de la cité permettrait de sortir des
logiques politiciennes de court terme venant empoisonner la vie politique.
Malheureusement,
c’est davantage la fausse solution du populisme qui semble prendre le dessus en
France et dans toute l’Europe aujourd’hui.
Photo Denis Payre, fondateur de « Nous,
citoyens », by Fondapol(CC BY-NC-ND 2.0)
Par Gaël Jeanson.
Source contrepoints.org
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire