On va dans le mur… Agnès Verdier-Molinié
« Ce livre optimiste est dédié à tous ceux
qui croient encore que la France peut bouger et faire mentir les plus
pessimistes. » (Agnès Verdier-Molinié)
Un mur se dresse
devant soi. On fonce dedans. Cela ne peut que faire mal…
Dans On va dans le mur, on, c’est la France. Si
elle ne change pas de cap, elle court à la catastrophe, parce qu’un mur est
bien là, sur sa route, contre lequel elle risque bien de se fracasser. Comme
d’autres pays avant elle, tels que la Grèce…
Agnès
Verdier-Molinié pense qu’il est encore possible d’éviter le mur : « Ce livre optimiste est dédié à tous ceux qui croient
encore que la France peut bouger et faire mentir les plus pessimistes. »
Pourtant le constat
chiffré qu’elle dresse n’est guère encourageant. Elle le décline en trois
points.
L’empilement
La fiscalité française
est un véritable maquis dans lequel il est bien difficile de se retrouver. Il
n’existe pas moins de 360 taxes. Ce n’est pas un chiffre sorti de nulle part.
L’auteur en fait l’inventaire à la Prévert dans l’annexe 2 du livre. Elle est
raisonnable puisqu’elle ne cherche à n’en réduire le nombre qu’à une centaine…
en éliminant toutes celles qui ne sont pas rentables.
Les agents de la
fonction publique sont aujourd’hui au nombre de 5,3 millions. Il faut remarquer
au passage que c’est la fonction publique territoriale qui a le plus augmenté
au cours des trois dernières décennies, augmentation ne se justifiant qu’en partie
par la décentralisation. L’auteur propose de geler l’embauche des agents
pendant 5 ans et de ne remplacer qu’un départ à la retraite sur deux pendant 3
ans.
Le mille-feuille
administratif comprend 36.769 communes, 15.903 syndicats inter-communaux, 27
régions, 101 départements. L’auteur propose la fusion des communes en 5000
super-communes, la suppression de l’échelon départemental et la fusion des
régions de telle sorte qu’il n’y ait plus que 13 grosses régions aux
compétences élargies.
Aujourd’hui il y a
plus d’ambassadeurs que d’ambassades… Elles sont au nombre de 163, ils sont
191. La différence ? Les 28 ambassadeurs « thématiques »
(sic), comme par exemple « la coopération
décentralisée avec l’Asie« … Est-ce bien raisonnable ? L’auteur
propose de réduire de toute façon le nombre d’ambassades inutiles, notamment en
Europe, et de vendre le patrimoine immobilier correspondant.
En contrepartie des
taxes, qui représentent le bâton dont il se sert pour exister, l’État agite la
carotte, soit 103 aides sociales, ce qui représente un montant de 700 milliards
d’euros de dépenses sociales. L’auteur propose, pour résorber les déficits et
réduire la dette correspondante, de fusionner un certain nombre de ces aides et
réduire le nombre d’interlocuteurs.
Le nombre des mandats
paritaires est un sujet tabou auquel s’attaque Agnès Verdier-Molinié. Ils
seraient 100.000 à se partager ce fromage, juteux aussi bien pour le patronat
que pour les syndicats de salariés. L’auteur propose que l’État gère désormais
l’assurance chômage, l’assurance santé et les caisses d’allocations familiales.
Bref qu’il soit mis fin au parasitisme du paritarisme par de l’étatisme…
Les dérives
Le mille-feuille
institutionnel se traduit par des élus, financés entre autres par les 360
taxes. Ils sont 618.384. Un record mondial. Soit un mandat électif pour 104
habitants… L’auteur propose de réduire le nombre des parlementaires et,
conséquence de la réorganisation territoriale, le nombre des élus locaux pour
faire passer le nombre total d’élus à seulement 55.000.
Qui sait qu’aux
salaires bruts des agents de la fonction publique de l’État s’ajoutent quelque
1.851 primes et indemnités ? Cela représente pourtant 28% de leur rémunération
globale… Qui sait que la fonction publique est divisée en 327 corps de
fonctionnaires « qui correspondent à des
statuts avec attributions, systèmes de primes et grilles de paies précises »
? L’auteur propose de réduire le nombre de ces primes, de lier leur versement à
la performance et de réduire le nombre des corps.
Il y a 5 millions de
chômeurs en France toutes catégories confondues. Parmi eux, un grand nombre ne
cherchent pas d’emploi, 20%, voire 30% suivant les régions. Il faut reconnaître
que « parfois l’emploi n’est que très
marginalement plus rémunérateur »…
Alors, pour « préserver justement le cœur
de notre État-providence« , l’auteur propose d’être plus sévère sur
les indemnisations et sur les refus d’emplois proposés…
Si l’on n’omet pas de
compter les jours de grève dans la fonction publique, il y a environ 2 millions
de jours de grève en France par an. Ce qui a un coût économique considérable.
L’auteur propose « de limiter le droit de
grève pour les agents en charge d’une mission de service public« ,
car leur statut garantit leur emploi et que les conséquences économiques sont
reportées sur le contribuable, et d’encadrer le droit de grève dans le secteur
privé en n’autorisant une grève que si 50% des effectifs l’approuvent.
Il y aurait en fait
915.138 enseignants en France, soit un enseignant pour 14 élèves, qui assument
un service allégé… Si à ce nombre on ajoute les 70.000 enseignants du supérieur
et tous les personnels non enseignants, l’Éducation compterait 1.281.638 agents
pour 12,6 millions d’élèves… Tout ce monde pour aboutir à une instruction
défaillante. À la faveur de la réorganisation territoriale l’auteur propose que
les enseignants soient recrutés localement et qu’au lieu d’assurer 18 heures
par semaine, ils en assurent 800 par an.
Les opérateurs de
l’État ou agences publiques sont au nombre de 1.244 pour 442.830 agents. Quand
l’État réduit ses effectifs, ceux des agences augmentent. Elles servent en fait
de vases communicants, où sont recasés les agents de l’État… L’auteur propose
de réduire leur nombre à 800 en fusionnant celles qui sont proches et
complémentaires.
La complexité
Nul n’est censé
ignorer la loi. Sauf qu’en France il y a 400.000 normes, 10.500 lois et 127.000
décrets. Le tiercé gagnant ? Le droit de l’environnement, le code général des
impôts et le code du travail. Remède contre cette inflation législative ? La
création d’un organisme indépendant pour analyser l’impact de chaque mesure
impactant les entreprises et la suppression d’une loi à la création d’une autre
loi.
Le code du travail
comprend, dans l’édition Dalloz de 2014, 3500 pages, 10.628 articles, et pèse
1,5 kilo… contre 500 grammes 30 ans plus tôt. Code extrêmement précis sur
certains points et complètement flou sur d’autres… Toujours est-il que les
seuils sociaux qui y sont définis sont des freins à l’embauche, de même que les
licenciements, parce que périlleux…
S’il y a eu 549.975
entreprises créées en 2012, seules 27.500 ont créé des emplois à leur
démarrage. Il existe pourtant 1175 dispositifs d’aides aux entreprises… et un
nombre impressionnant de structures pour obtenir cette manne. L’auteur propose
d’abandonner l’idée d’aider les entreprises, d’agir uniquement sur leur
environnement, de « faire en sorte qu’il soit
simple, stable et favorable à leur compétitivité », de supprimer l’ISF
et l’imposition sur les plus-values de cession.
L’État français
contrôle un grand nombre d’entreprises (1383 en 2012) et le total de ses
participations s’élève à 110 milliards d’euros. Une fois définies les
entreprises qui sont réellement stratégiques pour le pays, l’État devrait se
désengager des autres.
Aujourd’hui il existe
37 régimes de retraite, ce qui ne facilite pas la mobilité professionnelle et
est à l’origine d’injustices : par exemple, 60 milliards d’euros sur 282
milliards de prestations sont distribués sans cotisations… L’auteur propose
donc la convergence de « tous les régimes vers
un système unique sous forme d’une retraite par points par répartition,
complétée par une part de retraite en capitalisation ».
Les Français ne
travaillent pas 10,3 semaines par an. Cela correpond à 6,6 semaines de congés
payés, à 0,9 semaine de jours fériés et… à un absentéisme moyen de 2,8
semaines, plus particulièrement important dans la fonction publique. La durée
de travail est de ce fait bien moindre en France qu’en Grande-Bretagne, qu’en
Allemagne et même qu’en Italie. L’auteur propose donc l’allongement de la durée
du travail, « ce qui ne se résume pas à la
durée hedomadaire de 35 heures, qui doit être rendue flexible en plus ou en
moins, mais inclut la durée sur l’année, et aussi sur toute la vie ».
Conclusion
Selon l’auteur, si ces
réformes sont accomplies, la France évitera le mur. Agnès Verdier-Molinié se
projette en 2022 et conclut : « C’est une
nouvelle France qui démarre et l’on ressent beaucoup d’enthousiasme, comme une
fierté retrouvée à l’aune des désespoirs d’antan d’être sorti d’un système
favorisant corporatisme et connivence qui ne profitait qu’à quelques-uns en
bloquant tous les autres. »
Pourquoi cet
enthousiasme prédit par l’auteur à l’horizon de sept ans laisse-t-il sceptique
?
– D’abord parce que,
de son propre aveu, le résultat escompté de tant d’efforts est, somme toute,
modeste : si tous les objectifs qu’elle détaille dans l’annexe 1 de son livre
sont atteints – ce qui n’est pas gagné -, les dépenses publiques seront limitées
à un maximum de 52% en 2022 et de 50% en 2025…
– Ensuite parce que
l’intervention de l’État reste prépondérante dans des domaines qui ne sont pas
régaliens et, par exemple, même renforcée dans le domaine de l’assurance privée
tels que la santé ou le chômage.
– Enfin parce que
l’auteur veut préserver l’État-providence, qui n’est justement pas la solution
mais le problème principal dont souffrent nos pays car redistribuer plus
rationnellement, c’est toujours redistribuer.
L’inventaire à la Prévert du mal français
Il y a en France :
360 taxes
5,3 millions Agents de
la fonction publique
36.769 communes
15.903 syndicats
inter-communaux
27 régions
101 départements
163 Ambassades
191 Ambassadeurs
103 aides sociales
100.000 mandats
paritaires
618.384 élus
1.851 primes et
indemnités fonction publique de l’État
327 corps de
fonctionnaires
2 millions de jours de
grève par an
915.138 enseignants
70.000 enseignants du
supérieur
1.281.638 agents à
l’Éducation
1.244 Agences
publiques
442.830 agents pour
les Agences publiques
400.000 normes
10.500 lois
127.000 décrets
Un code du travail
3500 pages, 10.628 articles, et pèse 1,5 kilo…
549.975 entreprises
créées en 2012
1175 dispositifs
d’aides aux entreprises…
37 régimes de retraite
10,3 semaines par an
non travaillées :
6,6 semaines de congés
payés
0,9 semaine de jours
fériés
2,8 semaines
d'absentéisme
Source contrepoints.org
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