Vive la "twittérature" !
Lors de la dernière Foire du livre de
Francfort, la "Twitter fiction" a fait une entrée remarquée. Avec
cette révélation : en matière de chef-d'œuvre, ce n'est pas la taille qui
compte.
Il n'est pas le bienvenu à la Foire du livre de Francfort.
"Repoussé contre une barrière. Dégagé par un gardien. Lui ai proposé 4,6 %
des gains nets sur mon manuscrit. Rien voulu entendre." Voilà ce qu'écrit @bastseller
depuis la Foire du livre de Francfort. Il réessaie plus tard en se faisant
passer pour un Finlandais – "Ils n'oseraient pas refuser un auteur du pays
invité d'honneur" –, mais toutes ses tentatives pour glisser son manuscrit
entre les mains d'un éditeur se soldent par un échec.
Hans
Bastseller nous fait le récit de ses mésaventures sur le réseau de
microblogging Twitter. Sauf que Hans Bastseller n'existe pas. Il s'agit d'un
personnage de fiction, inventé à l'occasion du premier festival de
"twittérature" allemand. En coopération avec Twitter, les
organisateurs de la Foire du livre de Francfort [du 8 au 12 octobre] avaient en
effet décidé cette année de permettre à des auteurs de publier des "romans
courts" sur le réseau avec le hashtag #Twitteratur. Derrière le nom de
Hans Bastseller se cache en réalité l'écrivain Falko Löffler.
Zoë Beck et Anne Wizorek, elles, capturent des choses vues et
entendues qui racontent de petites histoires. "Viens avec moi petite
souris, on parle de livre électronique et tout ça. Tu m'écoutes ?" Il y a
aussi Psaiko.Dino, le DJ du rappeur Cro (sur qui il a écrit un livre), qui nous
donne son point de vue de musicien sur le salon :
"parler.parler.parler".
Du grand art
L'idée que
Twitter représente un nouveau potentiel littéraire n'est pas nouvelle. Reste
encore à déterminer en quoi il consiste. Il est largement admis aujourd'hui que
la contrainte des 140 caractères peut faire naître de superbes fulgurances
linguistiques, et que Twitter est le royaume des aphorismes.
Force est
pourtant de constater que les auteurs de tweets de la Foire du livre se
contentent essentiellement de gentils petits messages. Le caractère novateur de
la twittérature ne tient pas à la brièveté du format (qui caractérisent
également le haïku [court poème japonais], l'épigramme ou l'aphorisme) mais aux
fonctionnalités du réseau qui regroupe presque toutes les possibilités offertes
par l'écriture en ligne.
On parle
ici de récit en temps réel, des hyperliens, de la coécriture, de l'insertion
d'images et de vidéos, de l'utilisation des caractères "@" et
"#", du "RT" (re-tweet) et des histoires non linéaires.
Les personnages fictifs se rapprochent de la performance
artistique lorsqu'ils interagissent à travers leurs propres comptes et font
oublier la présence de l'auteur. Les lecteurs entrent en contact avec ces
personnages et mettent un pied dans le récit lui-même. Le réseau ne fait pas de
différence et crée une fiction qui entretient un rapport différent avec la
réalité. Le site Internet
du #TwitterFiction Festival met en avant une
série d'exemples les plus réussis. On en retient une expérience de narration
nouvelle et profondément immersive qui interpelle moins par son contenu que par
sa remise en question de notre idée de l'art. Domaine de l'aphorisme poétique en
temps réel, la twittérature peut aussi être du grand art.
Dessin de Cost, Belgique.
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