Non au parachute doré des élus !
Le fossé se creuse entre les citoyens et leurs représentants. Quand ils pensent à leur avenir, les Français sont pessimistes ; les députés, eux, le préparent, en se votant une sympathique prime de fin de mandat.
66 000 euros pour les députés perdants
Qu’on se rassure : les députés bénéficiaient déjà d’une prime de fin de mandat en cas de défaite électorale. Pendant 6 mois, ils continuent de toucher une petite partie de leur rémunération, 5 500 euros tout de même. ; désormais, ce sera pendant un an. De 33 000 euros, leur prime vient de passer à 66 000 euros.
5 500 euros brut par mois, c’est bien peu en comparaison des 13 000 euros brut mensuels que perçoit chaque député. Mais cela place tout de même les députés perdants dans les 10% de Français les mieux lotis. Un joli petit parachute doré.
En ces temps de crise, il fallait un excellent motif aux députés pour se voter unanimement un cadeau aux frais du contribuable. Celui-ci sera donc heureux d’apprendre que ces 33 000 euros supplémentaires sont une motivation pour les candidats potentiels.
« Il s’agit que les élus n’aient pas moins de moyens que le reste de la population parce que ça peut freiner les ambitions de ceux qui voudraient s’engager. » – Philippe Doucet, député PS rapporteur du texte.
Comme l’explique Le Figaro,
« La loi sur le statut des élus n’a pas pour seul objectif d’atténuer le choc des défaites électorales, mais surtout de diversifier le profil des élus, en facilitant l’engagement des salariés du secteur privé et des femmes notamment. »
On voit mal en quoi cela va motiver les femmes. Et, à bien y regarder, on comprend mal l’intérêt de la mesure.
La plupart des élus retrouvent automatiquement leur situation pré-élection après leur mandat.
Les seuls pour lesquelles cette indemnité pourrait avoir du sens sont les professions libérales et les chefs d’entreprise, qui doivent reconstituer leur clientèle et leurs revenus.
Pour les retraités et les chômeurs, la fin du mandat est simplement un retour à la situation précédente, qui ne justifie pas d’indemnité ; on pourrait considérer qu’un chômeur travaille durant son mandat avec toutes les conséquences sur ses indemnités, c’est tout.
Un fonctionnaire retrouve automatiquement son emploi et son salaire. On voit mal dans ce contexte le sens d’une indemnité de fin de mandat, quelle qu’en soit la durée et le montant, puisque l’élu retrouve sans peine sa situation passée.
Quant aux salariés du privé, le texte prévoit leur réintégration automatique dans leur ancienne entreprise – pas besoin, donc, de prime. Cet autre volet du texte voté pose d’ailleurs lui aussi problème.
La réintégration automatique dans le secteur privé, liberticide et infondée.
La réintégration automatique des salariés du privé après leurs années de mandat revient à priver l’employeur du choix de ses salariés. Parce qu’ils le valent bien, et parce qu’ils le peuvent, les élus ont donc voté un texte qui prévoit l’obligation de les réembaucher s’ils sont battus aux prochaines élections.
On comprend que les avantages dont jouissent les élus issus de la fonction publique soient un facteur explicatif de leur surreprésentation dans la représentation nationale. Mais la solution, ce n’est pas de donner à tous les députés les mêmes privilèges qu’aux fonctionnaires ; c’est de forcer les élus à choisir entre leur poste et leur mandat.
Il faudrait que les élus démissionnent de la fonction publique. En Allemagne, c’est déjà le cas. Au Royaume-Uni, les fonctionnaires doivent démissionner avant la campagne. En France, les parlementaires protègent les privilèges des fonctionnaires – aussi parce qu’ils le sont.
L’engagement politique n’est pas un acte de bravoure donnant automatiquement droit à un statut et des droits élargis. C’est un choix de vie. Les élus français sont loin d’être à plaindre ; alors que les Français vivent des jours difficiles et en attendent de pires, augmenter la dépense publique pour accorder un privilège de plus aux élus s’apparente fort à un bras d’honneur. Comme toujours, ceux qui détiennent le pouvoir en abusent.
Source contrepoints.org
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