dimanche 20 novembre 2016

Billets-Pas de duel Hollande/Sarkozy en 2017


Pas de duel Hollande/Sarkozy en 2017

 Alors comme ça, pour la première fois depuis 2012, l’ancien président de la République a accepté une invitation de son successeur, afin d’être présent dans une cérémonie officielle ? Il parait que Hollande et Sarkozy ont besoin l’un de l’autre. L’un, en dépit des sondages qui le donnent perdant dans tous les cas, pense que le rejet que suscite Sarkozy, y compris à droite, y compris chez les patrons, lui permettra quand même de s’assurer une victoire au deuxième tour, et l’autre imagine que rappeler son ancien rôle de président de la République (ce que Hollande, obsédé par son ancien adversaire, ne cesse de faire, au lieu de travailler et d’appliquer son programme de 2012) lui permettra de gagner la primaire des Républicains, et donc d’être en situation d’être l’adversaire de la droite face au PS.

Pourtant, dans leur petit jeu, tous les deux, aussi bien François Sarkozy que Nicolas Hollande, ont juste oublié un « petit » détail, les Français ne veulent plus d’eux, ni maintenant, ni en 2017, et ce pour plusieurs raisons.

Échec de l’un
Si Sarkozy a perdu en 2012, c’est parce qu’il a été au pouvoir entre 2007 et 2012, et que les Français ont donc eu cinq ans pour juger. Et qu’ont-ils vu ? De la social-démocratie de droite : hausse de la dépense publique, création ou relèvement de 51 taxes et impôts, des milliers de lois votées, parfois contradictoires, certaines liberticides. En outre, en cinq ans, la diplomatie a été brouillonne, et en dépit de la gestion unanimement reconnue de la crise géorgienne ou de la présidence française de l’UE, les Français n’ont pas compris où Sarkozy voulait emmener la France. Il faut dire que quand on essaie de trouver un point d’équilibre entre Henri Guaino et Christine Lagarde, c’est mission impossible. Même dans les domaines dans lesquels Sarkozy se présentait comme un champion, la sécurité par exemple, l’échec était patent.

On peut donc clairement parler d’échec de Sarkozy. Et qu’il ne vienne pas nous dire que la crise de 2009 explique pourquoi la France a vu sa dette publique exploser et ses dépenses progresser. D’autres pays voisins, comme l’Allemagne, le Royaume Uni, la Pologne, les Pays Bas, la Suisse ou même l’Espagne ont su faire des efforts et s’abstenir de se demander ce qu’auraient fait Keynes, Jaurès ou Marx.

Mensonges de l’autre
Hollande, le maire de Tulle, le secrétaire général du Parti Socialiste, n’était pas le candidat préféré du PS. Ses camarades et « amis » Fabius, Royal, Valls ou Aubry le tenaient en piètre estime (« il ne fout rien », « c’est flou, il y a un loup », « qu’a t-il fait en 30 ans »). Mais à la faveur des événements, il est quand même devenu le candidat de la gauche. Et qu’a-t-il fait, pendant sa campagne ? Il a menti. Il a d’abord menti à la gauche, en affirmant que la finance était son ennemie, pendant que le trésorier de campagne gérait ses investissements aux Caïmans.

Il a ensuite menti aux français, leur promettant un pays apaisé, alors qu’il rendait hommage aux communistes, préparait le mariage pour tous ou avait en tête des lois liberticides (Loi Renseignement). Il a aussi menti en affirmant qu’il allait tourner la page du bling bling et du sarkozysme. Trois ans plus tard, on sait ce qu’il en est. Une actrice se sert de l’Élysée pour ses rendez-vous professionnels, la Lanterne a bien été annexée par le locataire de l’Élysée, qui se sert de Air Sarko One pour voyager, quand il ne se rend pas dans des restaurants hors de prix à coté desquels le Fouquet’s est un kebab de quartier. Quant au changement, on repassera : non seulement la France est toujours dans l’OTAN, mais le chef de l’État est tout simplement celui qui aura lancé les armées françaises dans un nombre record de pays. Du coté de l’économie, nul besoin de commenter, entre la courbe du chômage qui ne veut jamais s’inverser, ou la croissance atone en dépit du fameux « alignement des planètes ».

Incompétence des deux
Il apparaît clairement que tant Hollande que Sarkozy se montrent donc incapables d’affronter le réel : la France dépense trop d’argent, il faut réduire la dépense publique. Ils se montrent également peu désireux de répondre à l’idéal de liberté des Français, qui veulent de plus en plus que l’État leur fiche la paix, tout simplement. Enfin, dans le cadre de l’exécution de leur politique, pour peu qu’on admette qu’ils croient à leurs promesses, les deux ont souffert d’un problème de cohérence de majorité.

Division de leurs camps
Comment peut-on trouver dans le même parti Nadine Morano et Philippe Douste-Blazy ? Benoit Hamon et Malek Boutih ? Henri Guaino et Hervé Novelli ? Martine Aubry et Christophe Caresche ? Tant que, pour des raisons d’allégeance tactique à une écurie présidentielle, conséquence directe de la prééminence du chef de l’État en France, des politiciens choisiront de travailler pour les partis politiques dont ils ne partagent pas les valeurs, comment voulez-vous que des Présidents de la République, qui doivent bien s’appuyer sur une majorité, puissent gouverner de manière cohérente ? Notons que cette absence de clarification ne concerne pas que Les Républicains ou le Parti Socialiste. On a aussi du mal à voir le rapport entre Marine Le Pen et Marion Maréchal le Pen, ou entre les différentes factions de l’extrême-gauche.

Mais alors, puisque Hollande et Sarkozy sont nuls, du fait de leurs qualités propres ou du système politique, qui pour 2017 ?

Peut-on éviter ce mauvais film, Hollande vs Sarkozy, remake de 2012 ?
Soit on considère pertinent de renouveler de tels duels, soit on les rejette.
Dans le premier cas, les candidats ne manquent pas. À droite, tout n’est pas à rejeter. Malgré son lourd passif en tant que Premier ministre pendant cinq ans (création de l’exit tax, par exemple ?), François Fillon a enfin pris conscience de la nécessité d’un choc thatchérien pour la France. Quant à Hervé Mariton, russophone mais pas Poutinolâtre, polytechnicien mais pas pédant, fidèle dans ses valeurs (plutôt libéral en économie, conservateur au plan sociétal), il mérite tout simplement de représenter les Républicains, de par sa parfaite adhésion aux valeurs conservatrices. N’oublions pas, également, Christine Lagarde, ou même Valérie Pécresse (adoubée par les élites mondiales). Au PS aussi, il y a des personnalités dignes d’intérêt et qui méritent de porter les couleurs de leur parti : Bertrand Delanoë, l’ancien maire de Paris, en fait partie, ainsi que Malek Boutih, lui qui tient un discours parfois intéressant, notamment sur la jeunesse et l’entrepreneuriat. Et quid de Daniel Cohn-Bendit, s’il arrive à faire oublier les taches de son parcours, ce qui n’est pas gagné.

Dans le deuxième cas, la France réalise que le poison présidentiel dénature tout le processus politique, comme l’a si bien analysé la journaliste Ghislaine Ottenheimer. Une des limites de la Vème République, c’est le fait qu’un seul homme concentre entre ses mains trop de pouvoirs, de la gestion des affaires internes de son parti à celle de la diplomatie du pays, ce qui relève plus de la monarchie absolue que d’autre chose. L’exception culturelle française, c’est que le chef de l’État est aussi de facto le chef du gouvernement (tendance accélérée avec le quinquennat), alors que chez nos voisins, par ailleurs très souvent des monarchies constitutionnelles (Belgique, Luxembourg, Pays Bas, Royaume Uni, Suède, Espagne), le souverain n’a que peu de pouvoirs, et le Premier ministre gouverne après avoir mené un parti à la victoire aux législatives.

Dans ce deuxième cas, il y a plusieurs options. La plus radicale serait que nous devenions à nouveau une monarchie. Les modalités pratiques d’un tel changement (approbation de la modification de la Constitution), sans parler de la querelle dynastique entre les Orléanistes et les Légitimistes, rendent l’idée non réaliste. L’autre option serait que les Français cessent d’adhérer à l’idée d’un ou d’une président(e) de la République omnipotent(e) pour qui l’élection au suffrage universel direct équivaut au Sacre de Reims. Dès lors, les Français pourraient se tourner vers des personnalités modérées et rassembleuses pour qui l’objectif n’est pas l’accaparement de tous les pouvoirs mais au contraire le respect du principe de subsidiarité, la recherche de la proportionnelle au parlement et la quête d’un équilibre entre des régions fortes et une Europe fédéralisée. Des personnalités comme Hervé Morin, François Bayrou ou Sylvie Goulard pourraient-elles être en mesure de porter un tel projet ?
On dit souvent que les peuples ont les politiciens qu’ils méritent. Dans un cadre malgré tout démocratique, comme celui de la France, c’est d’autant plus vrai. En effet, ni Hollande ni Sarkozy ne sont tombés du ciel. Il y a bien eu des gens pour voter pour eux, à un moment. La première étape pour éviter un duel Hollande/Sarkozy en 2017 est donc de récupérer le pouvoir que nous avons abandonné au politique.

Source contrepoints.org


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