Lors d’un échange avec les lecteurs du journal Le Parisien, Emmanuel Macron a déclaré :
« Eh bien, là, les non-vaccinés, j’ai très envie de les emmerder. Et donc on va continuer de le faire, jusqu’au bout. C’est ça, la stratégie. »
Ces propos ont vite été médiatisés et pour cause : ils ne sont pas dignes d’un président.
Un président doit rassembler et non pas diviser
L’une des principales critiques des médias à l’encontre de Donald Trump était sa vulgarité. Force est de constater que sur la forme, Emmanuel Macron n’est ici pas mieux que son homologue. Mais là où le langage excentrique de Trump a toujours fait partie du personnage et dans un contexte américain, les propos de Macron se tiennent dans un pays où est attendue une certaine prestance du comportement présidentiel.
Pire, ces propos interviennent dans une période où les citoyens sont fatigués par la crise sanitaire et économique. Une période où la population est déjà divisée et polarisée. De tels propos ne contribuent qu’à mettre de l’huile sur le feu.
Il est souvent fait comme reproche aux candidats désignés antisystèmes comme Zemmour, Le Pen ou Mélenchon, de ne pas être capables de rassembler les Français. Ces critiques émanent souvent du camp Macron. Mais que dire du comportement de ce dernier ? Insulter une partie de la population n’est pas rassembler. Dans une période de crise, on attend d’un dirigeant qu’il apaise les tensions, pas qu’il les amplifie. Les débats à l’Assemblée nationale sur le pass vaccinal n’ont d’ailleurs guère montré la volonté de débattre de la part de LREM qui préfére classer les opposants aux restrictions d’alliés d’antivax.
Ce type de discours fait bondir, et pas uniquement les non-vaccinés mais aussi les vaccinés, qui sont lassés des restrictions constantes. Précisons qu’avec 76,8 % de la population vaccinée à deux doses, les non-vaccinés représentent 23,2 %, une minorité non négligeable. Et avec la dose de rappel obligatoire (33,2 %) pour conserver le pass sanitaire, la proportion de personnes insuffisamment vaccinées pourrait très fortement augmenter durant les prochains mois.
Une mauvaise stratégie électorale : des « déplorables » de Clinton aux « non-vaccinés » de Macron
Les conséquences se font déjà sentir avec une nouvelle suspension des débats sur le pass vaccinal. À bien des égards, les propos de Macron risquent de se retourner contre lui surtout en période électorale.
Là encore, la comparaison avec les États-Unis est intéressante. En 2016, Hillary Clinton avait traité les électeurs de Trump de « déplorables ». Ce propos avait contribué à sa défaite. Le fait que Macron insulte les citoyens à quelques mois des élections alors que la campagne a officieusement commencé, n’est pas la meilleure idée stratégique.
Cette élection risque d’être marquée par des votes sanctions. De tels propos pourraient soit pousser des indécis à l’abstention (pour ceux qui voulaient faire barrage aux extrêmes), soit amener des abstentionnistes à voter Mélenchon, Zemmour ou Le Pen voire Pécresse par dégagisme.
Certains pourrait arguer que Macron a agi de la sorte par fatigue. Mais si tel est le cas, est-il capable d’effectuer un second mandat ? De même, d’autres y verront son autoritarisme. Ce serait lui faire trop d’honneur que de lui donner ce qualificatif.
À l’heure où débute la présidence française de l’UE, on a vu mieux en termes d’image. Espérons que Macron se comporte mieux avec les autres chefs d’États européens et extra-européens. Il serait problématique qu’il dise à Biden et Poutine qu’il les emmerde.
Source : Contrepoints.org
Par Alexandre Massaux
Alexandre Massaux est docteur en droit spécialisé en relations internationales. Ses principaux centres d’intérêts sont la stratégie politique, les questions de sécurité et défense ainsi que la politique en Europe centrale et orientale. Il est secrétaire de rédaction de Contrepoints.
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