Insuffisance cardiaque après l'infarctus
Le rôle des cellules souches cardiaques
La longue quête pour réparer
les dégâts causes par un infarctus du myocarde sur le fonctionnement de la
pompe cardiaque vient, peut-être de connaitre un tournant. Et cela grâce aux
propres cellules souches des patients.
Imaginez
qu’un organe soit livré avec un kit de réparation, une sorte de trousse de
secours. C’est ce qui semble se passer au niveau du cœur, où une structure,
l’appendice atrial, situé dans chacune des oreillettes, contient de précieuses
cellules.
Ces
cellules ont toutes les caractéristiques de cellules souches et peuvent se
transformer en divers tissus utiles à la reconstruction du muscle cardiaque et
de ses vaisseaux. Le paradoxe c’est que, jusqu’à présent, on n’avait jamais
étudié sur l’être humain les possibilités de ces cellules souches cardiaques,
ou CSC.
Réparer
le cœur après un infarctus est pour tant un défi que de nombreuses équipes
tentent de relever à travers le monde. On a tenté de le faire à partir de
cellules appelées myoblastes et prélevées sur des muscles de cuisse.
On
a aussi utilisé des cellules extraites de la moelle osseuse et porteuses de
certaines caractéristiques biologiques. On travaille beaucoup en ce moment sur
des modèles faisant appel aux cellules souches embryonnaires.
Cette
frénésie de recherches est liée au fait que les séquelles d’infarctus sont
parfois très sévères. La destruction du tissu myocardique en aval de la lésion
de l’artère coronaire nourricière du tissu provoque, en effet, une destruction
du muscle, un ‘infarcissement’. Peu à peu le tissu actif va être remplacé par
un tissu fibreux dénué de toute faculté de se contracter.
Le
résultat c’est un cœur affaibli et un ventricule gauche qui va éjecter beaucoup
moins de sang oxygéné vers les divers organes. Ainsi, une insuffisance
cardiaque se met peu à peu en place qui va s’aggraver avec le temps, provoquer
notamment des œdèmes aigus du poumon, des hospitalisations, un essoufflement,
bref une altération très importante de la qualité de vie
Même
si on a aujourd’hui des moyens médicamenteux et des stimulateurs capables de
prendre plus ou moins en charge l’insuffisance cardiaque, l’idéal c’est donc
d’essayer de réparer les dégâts de l’infarctus le plus largement possible.
Des
équipes américaines de Louisville et de Boston sont donc allées à la pèche de
ces CSC. Les patients chez lesquels les cellules ont été récoltées avaient fait
un infarctus du myocarde (IDM) avaient eu un pontage coronarien pour remplacer
le segment d’artère malade et avaient moins de 75 ans.
Mais,
surtout, ils avaient un ventricule gauche défaillant. Normalement, la capacité
du cœur à se contracter est mesurée par la fraction d’éjection ventriculaire ou
FEV. C’est surtout celle du ventricule gauche qu’on utilise.
Elle
varie de 55 % à 75 % environ.
Dans
l’insuffisance cardiaque ce n’est pas la même chose ! Ainsi les patients inclus
dans l’étude avaient une FEV gauche inférieure ou égale à 40 %.
L’étude,
baptisée SCIPIO, qui est toujours en cours, a inclus 23 patients. Seize ont
reçu les CSC et sept le traitement habituel.
Pour
les 16 patients, on a injecté un million de CSC dans leurs artères coronaires
en montant un cathéter par l’artère fémorale. L’intervention s’est déroulée 113
jours après l’IDM.
Rappelons
qu’il s’agissait d’une étude dite de ‘phase 1’, c’est-à-dire sans but
thérapeutique a priori mais destinée à mesurer la tolérance et la faisabilité
de la méthode.
Mais
les médecins ont eu la bonne surprise de découvrir que les cellules injectées
avaient bien joué leur rôle.
Maçonnerie et électricité
On
a constaté tout d’abord au bout de quelques mois une amélioration de la
fonction du ventricule gauche, avec une FEV qui est passée de 30,3 % à 38,5 %
chez 14 des 16 patients traités par CSC.
Chez
sept de ces patients, l’examen IRM a même permis de voir une diminution de la
taille de la zone détruite de près de 30 % en un an.
Les
cellules souches ont donc acquis une double potentialité : repeupler une partie
de la zone détruite et posséder les bons’ branchements’ qui ont permis une
activité de contraction correcte.
Ce
qu’on peut résumer en un double succès de réparation en ‘maçonnerie et
électricité’ !
A-t-on
trouvé les cellules souches enfin magiques ? Certainement pas. L’étude est de
bien trop petite taille, 23 patients seulement, pour en tirer des conclusions
définitives.
Il
va falloir conduire des études à beaucoup plus grande échelle et mesurer sur
plus d’un an le devenir de ces cellules transplantées.
Mais
la piste semble séduisante. Elle est assez peu agressive, se fait 6 mois après
l’accident initial, avec des cellules souches autologues, c’est-à-dire venues
du patient, donc sans rejet envisageable et sans transformation par des
facteurs de croissance potentiellement dangereux.
L’étude
SCIPIO rappelle le nom de Scipion Africanus, Scipion l’Africain, l’homme qui
vainquit Hannibal et finit par donner raison à Caton qui voulait qu’on
détruisit Carthage. ‘Carthago delenda est’ se rappeleront les amoureux du
Gaffiot)
On
peut imaginer que SCIPIO permette de vaincre à son tour les dégâts de l’IDM,
pas complètement certes, mais suffisamment pour permettre aux patients de
recouvrer une certaine qualité de vie.
La
réponse dans quelques années.
Référence de l’étude et de l’éditorial :
Roberto Bolli et al.
Cardiac stem cells in patients
with ischaemic cardiomyopathy (SCIPIO): initial results of a randomised phase 1
trial
The Lancet – 14 November 2011
DOI: 10.1016/S0140-6736(11)61590-0
Gerd Heusch
SCIPIO brings new momentum to
cardiac cell therapy
The Lancet – 14 November 2011
DOI: 10.1016/S0140-6736(11)61648-6
Source docteurjd.com (blog santé de jd flaysakier)
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