5 mythes sur la gestation pour autrui
La légalisation de la GPA est un débat hautement
sensible en France, et très souvent caricaturé par ses opposants de tous bords.
Ce sujet mérite mieux que des assertions à l’emporte-pièce non fondées, nous
allons donc étudier cinq mythes régulièrement énoncés à propos de la gestation
pour autrui.
Mythe 1 : la GPA revient à traiter un enfant comme un objet
Il y a deux manières
de répondre à cet argument.
- Tout d’abord, les contrats de GPA ne consistent aucunement à traiter un enfant comme un objet mais consistent à la location du ventre de la gestatrice. À sa naissance, l’enfant n’est pas vendu mais remis à ses parents génétiques. Même si on considère que c’est la remise de l’enfant aux parents commanditaires de la GPA qui déclenche le paiement, cela n’est toujours pas suffisant pour pouvoir la comparer à un achat d’être humain. Acheter une personne n’est plus possible depuis l’abolition de l’esclavage. La transaction porte sur l’achat des droits de garde de l’enfant, avec toutes les limites et responsabilités que comporte le droit des enfants. Lors d’un achat de voiture, le propriétaire peut jouir à loisir de son bien, et peut le détruire, ce qui heureusement est loin d’être le cas pour un enfant, qu’il ait été conçu par GPA ou non.
- De plus, il s’agit ici d’un argument contre la GPA commerciale, où la gestatrice est rémunérée. Mais quid de la GPA altruiste, telle que pratiquée chez nos voisins anglais ou belges ? Par ignorance ou hypocrisie, les opposants refusent de reconnaître son existence.
Mythe 2 : les mères porteuses sont de pauvres femmes
exploitées, qui souffrent d’être séparées de l’enfant
Lorsque l’on s’attarde
sur les études menées sur les gestatrices, on se rend rapidement compte que la
réalité même de la GPA commerciale est loin des fantasmes qu’on veut lui
prêter. Les motivations les plus communes trouvées dans les études psychologiques
des gestatrices sont « une appréciation de
la grossesse, de l’empathie pour les couples infertiles, un désir de gagner de
l’argent en étant mère au foyer, et un désir de faire quelque chose de
« spécial » ». On retrouve ce sentiment d’empathie pour
les couples infertiles dans le témoignage de Mary Bailey qui fut
gestatrice : « j’ai senti que j’étais
dans de bonnes dispositions à présent dans ma vie pour aider un couple à
fonder une famille. »
Bien que les
motivations financières soient présentes, « seul
un petit nombre de femmes mentionnent l’argent comme leur motivation
principale ». Malgré les nombreuses études effectuées en ce sens,
il est impossible de déceler des profils psychologiques anormaux. Étude après
étude, les gestatrices apparaissent des « adultes
stables, intelligentes, et conscientes d’elles-mêmes ». Une étude
de 2002 démontre que les gestatrices sont « sûres
d’elles-mêmes » et « contrôlent
ce qu’elles font ».
Mais quid du moment de
l’accouchement, de la remise de l’enfant aux parents ? Selon les opposants
à la GPA, ce moment est extrêmement difficile pour la gestatrice et laisse des
séquelles. Qu’en est-il de la réalité ? Moins de 1% des gestations pour
autrui finissent par un conflit se réglant au tribunal. De nombreuses études
montrent que la majorité des gestatrices considèrent ces expériences comme très
positives, sans problème psychologique dû à la remise de l’enfant. La plupart
des gestatrices évoque le renoncement au bébé comme un événement heureux et
envisagent de renouveler cette expérience. Des études longitudinales montrent
que ces attitudes restent stables dans le temp. Une étude récente qui analyse
les relations de long terme entre les gestatrices et les familles qui
accueillent l’enfant montre que les gestatrices maintiennent une relation
qu’elles trouvent satisfaisante avec la majorité des familles.
On est donc bien loin
de l’image généralement répandue en France de femmes ignorantes et exploitées
qui regrettent d’avoir procédé à une GPA.
Mythe 3 : les enfants nés de GPA souffrent de troubles
psychologiques
La théorie veut que
lors de chaque grossesse, un lien se forme entre la mère et l’enfant. La
séparation de l’enfant et de la gestatrice serait donc doublement douloureuse à
cause de la rupture de ce lien. Le premier problème avec cet argument est que
ce lien n’a jamais pu être prouvé. Des anthropologistes ont depuis longtemps
contesté cette théorie en expliquant que ce lien est une construction sociale.
À défaut de pouvoir prouver l’existence de ce lien, peut-on constater des
problèmes psychologiques ? On a vu plus tôt que les gestatrices ne
souffrent pas de problèmes mentaux liés à la GPA. Mais si ses opposants
répètent sans cesse que les enfants souffrent de troubles liés à la séparation,
c’est que cela doit être vrai ? Plusieurs études ont montré que ce n’est
pas le cas.
- « La gestation pour autrui n’apparaît pas impacter négativement l’éducation des enfants ou leur développement au sein de familles avec des enfants de 2 ans. » — “Surrogacy families : parental functioning, parent–child relationships and children’s psychological development at age 2” Susan Golombok, Fiona MacCallum, Clare Murray, Emma Lycett, Vasanti Jadva, Journal of Child Psychology and Psychiatry, 47:2 (2006).
- « Les familles ayant procédé à une GPA ont maintenu une bonne relation dans le temps avec la gestatrice. Les enfants considéraient positivement leur mère porteuse et leur naissance par gestation pour autrui. » — “Surrogacy families 10 years on : relationship with the surrogate, decisions over disclosure and children’s understanding of their surrogacy origins” V., Jadva, L., Blake, P., Casey, S., Golombok, Human Reproduction, Vol.27, No.10 (2012).
- « Bien que plusieurs études montrent que les parents de familles qui ont fait appel à des nouvelles technologies de reproduction sont plus engagées émotionnellement dans leur éducation que le sont les parents de familles conçues naturellement, aucune donnée empirique n’a été trouvée qui montrerait que le développement psychologique des enfants issus des nouvelles technologies de reproduction diffère de leurs homologues dans des familles conçues naturellement » — “Children of the new reproductive technologies : Social and genetic parenthood” Henny, Bos, Frank, van Balen, Patient Education and Counseling, 81 (2010).
Sur le sujet des
enfants nés de GPA, on pourra lire avec intérêt l’interview sur Le Figaro de
deux adolescents nés par GPA.
Mythe 4 : il n’existe pas de « droit à l’enfant », dès
lors on ne doit pas légaliser la GPA
La liberté de procéder
à la GPA n’est pas un droit créance, mais une liberté négative : ce que
demandent les opposants à l’interdiction de la GPA, ce n’est pas qu’on leur
garantisse un « droit à la GPA ». Un tel droit signifierait que l’État serait
dans l’obligation de fournir un enfant aux couples infertiles, et serait
illégitime à plus d’un titre. Ce que demandent les opposants à l’interdiction
de la GPA, c’est que l’État français retire son interdiction illégitime d’une
pratique non violente.
Le droit de procéder à
une GPA n’est pas un droit créance supplémentaire mais le droit de procéder à
une transaction volontaire entre adultes consentants qui vise à créer de la
vie. Il n’est pas nécessaire de soutenir un faux « droit à l’enfant » pour soutenir
la légalisation de la GPA.
Mythe 5 : une mère porteuse peut changer d’avis lors d’une
GPA, donc l’interdiction de la GPA est légitime
Comme cela a été
expliqué plus tôt, les conflits dans le cadre d’une GPA sont extrêmement rares.
Ils font le tour des média occidentaux avides de sensationnalisme, mais n’ont
statistiquement presque jamais lieu. Cependant, s’ils peuvent se produire, sont-ils
une justification suffisante pour interdire la GPA ?
La GPA est un contrat
entre des futurs parents et une gestatrice, qui loue son ventre. Comme tout
contrat, un contrat de GPA « est un accord
de volonté en vue de créer une ou des obligations juridiques »
(wikipedia). Signer un contrat pour le futur accomplissement d’un acte ne nie
pas que l’opinion d’un signataire puisse changer entre temps. Un contrat
prévoit autant que possible de tels changements d’avis ou de conditions. En cas
de conflit non résolu, le problème se traitera devant un tribunal.
Dans le cas spécifique
de la GPA, est régulièrement évoquée la crainte que la mère porteuse souhaite
garder l’enfant. Il reste alors au tribunal à arbitrer entre l’application
stricte des termes du contrat ou la reconnaissance de son droit inaliénable à exercer
son droit de garde jusqu’à la remise physique de l’enfant à ses parents
biologiques. Peu importe la décision du tribunal, en aucun cas la possibilité
de conflit ne peut justifier l’interdiction de la GPA.
Femme enceinte – Crédit : Marco G. via Flickr (CC BY-NC 2.0)
Source contrepoints.org
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