La France confirme l'interdiction de la fracturation hydraulique pour exploiter les gaz de schiste
Forage pour extraire des gaz de schiste en Pologne
Crédit : Anita Starzycka / Pixabay - Licence : CC0
L'interdiction de la
fracturation hydraulique pour exploiter notamment les gaz de schiste en France
vient d'être confirmée par le Conseil constitutionnel qui a rejeté la requête
d'une société texane. Un soulagement pour toutes les personnes qui pensent que
l'accès à l'énergie ne doit plus être synonyme de pollution irresponsable.
Face à la raréfaction des
énergies fossiles conventionnelles, les gaz de schiste suscitent les
convoitises. Ainsi, "la Pologne, l'Autriche, l'Allemagne, la Suède et le
Royaume-Uni ont commencé à chercher du gaz de schiste. Si les recherches sont
concluantes, ces pays pourraient commencer à en extraire. D'autres Etats
membres comme la France et la Bulgarie ont choisi de suspendre les
recherches." (Parlement
européen). Si l'exploitation des gaz de schiste reste limitée à quatre pays
(Etats-Unis, Canada, Pologne, Chine[1]), de nombreux pays ont déjà entamé des
recherches afin d'accéder à ce gaz.
En France, la loi
Jacob du 13 juillet 2011 dispose que "En application de la Charte
de l'environnement de 2004 et du principe d'action préventive et de correction
prévu à l'article L. 110-1 du code de l'environnement, l'exploration et
l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par des forages
suivis de fracturation hydraulique de la roche sont interdites sur le
territoire national." La fracturation hydraulique, qui vise à injecter un
liquide sous pression pour fracturer la roche en profondeur et en extraire un
combustible fossile est donc interdite. Cette technique permet d'exploiter des
hydrocarbures non conventionnels (pétrole lourd, sables bitumeux, schiste
bitumineux, huile de schiste, condensats de gaz naturel, gaz de schiste,
hydrates de méthane, charbons de mauvaise qualité...) mais aussi conventionnels
(pétrole, gaz d'accès plus facile).
Le Conseil constitutionnel vient de confirmer sans réserve la validité de cette loi, rejetant ainsi la question prioritaire de constitutionnalité de la société texane Schuepbach qui remettait en cause l'abrogation de ses permis exclusifs de recherche[2] délivrés en 2010, suite à l'arrêté du 12 octobre 2011 : "Les articles 1er et 3 de la loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011 visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique sont conformes à la Constitution."
Pour valider cette
interdiction totale, le Conseil constitutionnel reconnaît que le but poursuivi
par le législateur, qui était bien de prévenir les risques avérés de ce procédé
pour l'environnement, répond à l'intérêt général et justifiait pleinement une
interdiction.
"Le Conseil
constitutionnel fait preuve de sagesse et se montre en adéquation avec la
société française puisque les Français sont majoritairement opposés à la
délivrance d'autorisations pour exploiter les gaz de schiste par le moyen de la
fracturation hydraulique qui est destructrice pour l'environnement. Cette
décision relève aussi du principe de précaution, constitutionnalisé avec la
Charte de l'Environnement voulu par Jacques Chirac." a déclaré le Sénateur
François Grosdidier, Président de Valeur écologie.
Fin février 2016, Ségolène
Royal, ministre de l'environnement a confirmé que, dans le cadre de la réforme
du code minier en cours, une disposition sera intégrée afin de renforcer la
sécurité juridique des interdictions de recherche de gaz de schiste. Cette
disposition s'appliquera à tous les permis de recherche d'hydrocarbures en
cours de validité et aux demandes de permis en cours d'instruction.
Cette annonce fait suite au
jugement du 28 janvier 2016, lorsque le tribunal administratif de
Cergy-Pontoise avait, à la demande des sociétés Total Gas Shale Europe et Total
Exploration et Production France, annulé la décision du 12 octobre 2011 par
laquelle avait été abrogé le permis exclusif de recherches d'hydrocarbures dit
de Montélimar. La ministre de l'Energie a fait appel de la décision du tribunal
de Cergy-Pontoise.
Extraction du gaz de schiste
: comment ça marche ?
En France, dans un contexte
régressif où le débat sur la transition énergétique du gouvernement reste une
farce, c'est une très bonne nouvelle, à la fois pour l'environnement mais aussi
pour l'économie.
Gaz de schiste : les
conséquences sur l'environnement
L'exploitation des gaz de
schiste est une activité risquée, gourmande en eau, destructrice du paysage et
polluante, notamment pour les nappes phréatiques. En effet, la technique
d'extraction employée - la fracturation hydraulique - consomme d'énormes quantités
d'eau (plusieurs milliers de mètres cubes pour un puits). Les nappes
phréatiques peuvent être contaminées par les produits chimiques injectés si les
installations ont été mal construites. Enfin, il peut y avoir des risques de
fuite à la surface.
De plus, l'exploration et
l'exploitation des gaz et huile de roche entraînent le rejet de méthane,
un gaz
à effet de serre dont le pouvoir réchauffant est plus de vingt fois
supérieur au CO2.
Ces conséquences dramatiques
sur les populations riveraines et l'environnement ont notamment été rendues
publiques par le célèbre documentaire gasland qui s'est offert, depuis quelques
mois, une deuxième version, encore plus sombre dont voici le teaser.
Gaz de schiste : un mirage
économique
De nombreuses études
économiques[3] sur l'impact de l'exploitation des gaz de schiste sur l'emploi
aux Etats-Unis démontrent qu'en moyenne 750 000 euros de production de gaz ne
créent que deux emplois. Ainsi, en France, pour créer les 100 000 emplois
avancés par les pro-gaz de schiste il faudrait creuser 90 000 puits, soit 30
par jour jusqu'en 2020.
Contrairement à ce qui est
affirmé, "le coût de l'exploitation [du gaz de schiste] déjà déficitaire
aux Etats-unis serait très élevé en Europe, et ce, sans compter les coûts
immenses de la pollution de l'eau et des conséquences économiques pour les
exploitations agricoles" indiquent Jacques Krabal, député-maire de
Château-Thierry et Corinne Lepage, député européenne.
France Nature Environnement
demande maintenant que la réforme du code minier, entamée il y a presque un an
et dont une version complète est prête depuis trois mois, arrive rapidement
dans l'hémicycle, avant que les lobbies n'aient réussi à « détricoter » les
quelques avancées positives.
Plus que jamais, la sobriété
énergétique (consommer moins d'énergie), l'efficacité énergétique (consommer
mieux) et les énergies
renouvelables représentent les solutions raisonnables de demain.
Notes
Actuellement, les Etats-Unis
et le Canada sont les deux principaux producteurs de gaz naturel provenant de
formations de schistes avec une production qui atteint 39 % de la production
nationale de gaz aux USA et 15 % au Canada (seulement 1% en Chine). Source :
U.S. Energy Information Administration (EIA)
Permis de Villeneuve-de-Berg
(Ardèche et Gard) et permis de Nant (Lozère, Gard, Hérault).
The effects of natural gas boom on employment and income in Colorado, Texas and Wyoming, Energy Economics, n°34, 2012.
Source : https://www.notre-planete.info/actualites/3826-interdiction-gaz-de-schiste-France#
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