vendredi 27 septembre 2024

Billets-Les plaintes contre les Ehpad font de vieux os


Les plaintes contre les Ehpad font de vieux os


Par Fanny Ruz-Guindos

Un rapport sénatorial à paraître le 25 septembre décrit le naufrage financier des 7 000 établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, qui ne font plus le plein. La défiance des familles après la crise du Covid, et les mauvais traitements infligés aux pensionnaires n’ont rien arrangé.

Il n’y a pas que les vieux qui croupissent en maison de retraite… Les enquêtes aussi ! Les Assises nationales des Ehpad, qui ont eu lieu les 10 et 11 septembre, ainsi qu’un rapport sénatorial à paraître le 25 septembre décrivent le naufrage financier des 7 000 établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, qui ne font plus le plein. En cause ? La défiance des familles après la crise du Covid, qui a emporté plus de 10 000 résidents. Les révélations du livre du journaliste Victor Castanet « Les Fossoyeurs » (Fayard, 2022) sur les mauvais traitements infligés aux pensionnaires n’ont rien arrangé.

Plus de quatre ans après le début de l’épidémie, les familles qui ont saisi la justice n’ont toujours pas de réponses à leurs questions. Selon elles, des morts auraient pu être évitées pendant le confinement. L’exemple de l’Ehpad Korian La Riviera, à Mougins (Alpes-Maritimes), est révélateur. Entre le 15 mars et le 21 avril 2020, 37 de ses 109 locataires sont décédés des suites d’une supposée infection au Covid.

Covid juridique

Durant les quinze premiers jours, les proches n’ont pas été informés de la gravité de la situation. Le directeur de l’Ehpad n’a daigné les prévenir (par courrier) qu’après la publication d’un article de « Nice-Matin », le 30 mars ; 24 patients avaient déjà trépassé. Et c’est par un SMS des pompes funèbres qu’une famille a appris la disparition de son aïeul…

Cinq personnes ont porté plainte contre X pour homicides involontaires, mise en danger de la vie d’autrui et non-assistance à personne en danger. La ville de Mougins s’est constituée partie civile aux côtés des familles endeuillées, une enquête préliminaire a été ouverte, dès le 20 avril 2020, par le parquet de Grasse, et puis… plus rien. Jusqu’au 6 août dernier, où, pour la première fois, les plaignants ont enfin été auditionnés ! Fatigués par ces lenteurs judiciaires, deux d’entre eux avaient entre-temps abandonné les poursuites. « La plupart des plaintes déposées pendant la période Covid n’ont toujours pas été instruites. Il est temps que la justice travaille ! » dénonce Me Fabien Arakelian, avocat des familles.

« La plupart des plaintes déposées pendant la période Covid n’ont toujours pas été instruites. Il est temps que la justice travaille ! »


Ni lui ni la défense de Korian n’ont eu accès aux conclusions de l’enquête menée par l’agence régionale de santé ou à celle de l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique, un service de la gendarmerie. Une lenteur qui arrange le groupe Korian (rebaptisé Clariane en 2023), propriétaire de 270 Ehpad en France. Lequel fait remarquer au « Canard » que « ni la phase d’enquête ni l’information judiciaire n’ont donné lieu à des poursuites ». A croire que la justice est partie en maison de retraite…

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