Le miracle du Thalys, un avertissement ?
L’attaque du Thalys à peine déjouée, la
France s’émouvait à tel point que le gouvernement annonçait immédiatement
des mesures d’urgence. La présence à bord de chaque rame de
trois militaires américains en vacances, qui a ici fait la preuve de son
efficacité, n’a malheureusement pas retenu l’attention. En revanche, un numéro
d’urgence sera mis en place « facilitant le signalement des
situations anormales » dans les gares et les trains.
Espérons que la
prochaine tentative d’attaque sera le fait d’un illuminé déguisé en Napoléon
Bonaparte promenant son bazooka sur un monocycle, situation assez anormale pour
un signalement rapide, et qu’elle aura bien lieu dans un train ou une gare. Si
une attaque frappe un télésiège ou un parking, les numéros d’urgence vont
finir par se multiplier et la situation deviendra rapidement ingérable.
Le numéro d’urgence,
sans doute assez inutile, risque cependant d’être rapidement saturé,
déclenchant à chaque fois une intervention inutile des services d’intervention
et de déminage. Sur certaines lignes, les usagers vivent un enfer
quotidien. Plus rien ne les surprendrait, et si un attentat se tramait, ils
n’en sauraient rien. Ceux-ci mis à part, quel est le nombre de
« situations anormales » auxquelles assistent les usagers de la
S.N.C.F. chaque jour ?
Soyons sérieux. La
mesure du gouvernement ne résout rien, mais il fallait bien pondre quelque
chose. Le plan vigile pirate vigipirate est déjà déployé, la sécurité est
renforcée, les budgets de la défense sont sanctuarisés, les communications sont
surveillées, la coopération judiciaire avec les pays amis est rétablie. Mais
quand un type se pointe armé jusqu’aux dents dans un train, il faut un heureux
hasard pour l’empêcher de faire un carton. Si toutes ces mesures sont
prises mais ne fonctionnent pas, c’est sans doute qu’on rate quelque chose
d’évident. On en a d’ailleurs parfois quelques exemples venus des médias
étrangers, mais on ne le voit pas. On ne voit pas que dans une société frappée
par le terrorisme, la sécurité est l’affaire de tous. On le dit, mais on n’en
comprend pas les implications. La vigilance est une chose, la capacité de
réagir en est une autre. La sécurité est l’affaire de tous, et chacun doit
avoir les moyens d’assurer sa propre sécurité.
Pas uniquement dans le
cas d’attaques terroristes, d’ailleurs. En cas d’agression, chacun doit pouvoir
se défendre sans risque d’être poursuivi en justice par l’agresseur. Mais
surtout, chacun doit en avoir les moyens. Oui, c’est de port d’arme qu’il s’agit.
En janvier, même des policiers ont perdu la vie dans une attaque. Pourtant, ils
ont le droit d’être armés. Quelles chances a le pékin moyen, sans
l’entraînement au combat d’un militaire U.S., face à un terroriste armé ?
Si certains sont
armés, le combat est bien plus équitable. Les attentats seront déjoués
plus tôt, ou déjoués tout court.
Bien sûr, on peut
commencer progressivement. Assouplir les conditions requises pour détenir des
armes – tant qu’on a un casier judiciaire vierge – tout en étant
implacable avec les abus déjà prévus par la loi, à savoir attaquer quelqu’un.
On peut se demander si répondre à une attaque armée avec une arme de catégorie
supérieure est réellement problématique : un honnête homme armé qui ne peut se
défendre contre un couteau ne sera bientôt plus armé, et un malfrat armé d’un
couteau deviendra un malfrat armé d’un pistolet. Mais admettons qu’on
maintienne la loi en l’état : en cas d’attaque terroriste (ou pas) à la
kalashnikov, ça marche. Et sans doute mieux qu’un numéro de téléphone magique.
Dans une société
frappée par le terrorisme, la société est l’affaire de tous, et surtout
l’affaire de chacun. L’individu peut sauver la société bien plus que l’État,
parce que c’est la société qui est attaquée. C’est la nature même du
terrorisme, et elle nous rappelle que nous sommes les acteurs de société. Nous
ne devrions pas être seulement victimes ou spectateurs. Nous devrions
avoir les moyens d’assurer notre sécurité, qui d’ailleurs a beaucoup d’impacts
positifs puisqu’elle améliore aussi celle des autres.
Les terroristes sont
déjà armés. L’État, chargé de notre sécurité, l’est aussi, et ça ne suffit pas.
Mais les citoyens, eux, ne le sont pas, et ce sont eux qui sont frappés. C’est
sans doute, finalement, assez évident : pour lutter efficacement contre le
terrorisme (et la criminalité), il faut rendre aux citoyens leur sécurité.
Source contrepoints.org
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