mercredi 31 août 2016

samedi 27 août 2016

Billets-Le bilan caché de François Hollande


Le bilan caché de François Hollande

Ces 5 points du bilan de François Hollande qui sont passés sous silence pour ne pas le gêner aux élections présidentielles prochaines.

On le sait, le bilan économique et sécuritaire de F. Hollande est particulièrement sombre. La comparaison de l’évolution du taux de chômage, du taux de croissance et du niveau de la dette publique avec le reste de l’Europe montre un décrochage exclusivement français.

Parce qu’il est unique et régulier depuis plus de deux  ans, et qu’il s’est donc produit malgré l’environnement immédiat, ce décrochage constitue la signature incontestable des mauvais choix et des entêtements idéologiques du gouvernement socialiste). Quant au domaine sécuritaire, le résultat est effroyable, avec un nombre de victimes du terrorisme sur le territoire national tout simplement inimaginable.

Pour autant, les conséquences néfastes de cette parenthèse socialiste ne s’arrêtent pas aux seuls constats chiffrés. C’est même probablement dans le domaine symbolique et moral que les dégâts seront les plus dramatiques, avec rien moins que :
  • la décrédibilisation de la fonction présidentielle
  • la déconsidération de l’action politique
  • la dévalorisation de la justice, de la police et de l’éducation nationale
  • le discrédit du libéralisme et la consolidation du mythe étatique
  • l’essor du populisme

Décrédibilisation de la fonction présidentielle 
Outre cette incapacité à agir et à prendre des risques (l’un ne va pas sans l’autre), F. Hollande aura saccagé le statut de la fonction présidentielle sans doute encore plus violemment que ne l’aura fait son prédécesseur. Contrairement à ce que l’on peut supposer de prime abord, l’épisode des rendez-vous galants chez l’actrice Julie Gayet n’a rien d’anodin.

Comment justifier en effet qu’un Président qui, à l’Élysée, passe ses journées à ne pas prendre de décisions efficaces, voire à ne pas prendre de décisions tout court, puisse s’en aller discrètement le soir se délasser à quelques pas de là avec une jeune et jolie actrice ? Passe encore d’un Président efficace et consciencieux. Mais d’un Président qui accumule les contre-performances ? Ne devrait-il pas travailler jour et nuit jusqu’à ce qu’il soit digne de sa position ? Existe-t-il quelque chose de plus important, lorsque l’on dirige un pays en recul, que de s’atteler à son redressement ? Comment le Président trouve-t-il le temps de s’amuser ?

Pendant cet épisode affriolant, sur CNN (chaîne à l’audience mondiale), F. Hollande a été tristement comparé à un « Berlusconi sans les compétences ». Bien évidemment, la vie privée ne nous regarde pas. Sauf lorsque celle-ci se trouve en incompatibilité avec la fonction et les circonstances publiques. Et dans ce cas, c’est le bashing assuré !

Pourtant, certains agissements ayant trait à son métier même de Président ont créé des torts encore plus gravissimes. Lorsque par exemple à des journalistes qui lui demandaient si la mesure qu’il présentait n’allait pas s’avérer ruineuse, il avait benoîtement répondu : « cela ne coûte rien , c’est l’État qui paie ». Tout d’un coup, une partie de la population s’est ainsi rendu compte que notre pays avait à son sommet un personnage inconséquent. Une prise de conscience encore plus terrible s’est alors imposée, douloureuse et même déprimante : la France est une démocratie d’opérette puisque n’importe qui peut en devenir le Président.

Le fait que F. Hollande court derrière les faits divers et en devienne le porte-parole presque officiel (accident de la Germanwings, sinistres en France ou à l’étranger, funérailles de personnages célèbres, attentats, Coupe d’Europe de foot, Jeux Olympiques…), comme s’il recherchait coûte que coûte des occasions pour se mettre en avant, n’aura fait qu’accentuer cette étrange impression d’avoir au sommet de l’État une espèce de pantin sans aptitude ni conviction. Forcément, l’effet est désastreux sur le statut même de la fonction présidentielle.

Déconsidération de l’action politique
Sans doute F. Hollande n’imaginait pas à quel point son mensonge, lorsqu’il avait affirmé sur la chaîne télévisée d’État : « nous avons bien redressé le pays en quatre ans », pouvait être dramatique sur les consciences. Chez les Français en difficulté, cela a naturellement tourné à l’écœurement.

Les pressions visant à montrer des policiers sur les photos post attentats de Nice sont du même genre, et trahissent un immense mépris du peuple par nos élites actuelles. Pire encore, elles dissimulent très mal leur souci de masquer leur impuissance. Alors, comment attribuer le moindre crédit à l’action politique ? Faut-il s’étonner que de plus en plus d’électeurs soient persuadés de l’inutilité du gouvernement, et pire encore, des élections ? La classe politique est endogame. Elle s’est installée au pouvoir. Elle est inopérante, mais indélogeable. Telles sont les croyances qui se sont calcifiées dans l’esprit de bon nombre de Français. Du point de vue de la vie de la cité, tout cela s’annonce délétère.

Dévalorisation de la Justice, de la Police et de l’Éducation Nationale
Un gouvernement dont le premier réflexe, la première obsession semble être de ne surtout pas stigmatiser les coupables, de masquer les fautifs afin d’éviter tout amalgame, d’accuser les victimes (pour peu qu’elles ressemblent à des blancs chrétiens français de souche de droite) plutôt que les bourreaux (pour peu qu’ils appartiennent au clan opposé, celui du Bien) décrédibilise totalement les institutions telles que la Justice et la Police.

D’ailleurs, en dépit d’un État d’Urgence décrété de façon tonitruante, tout le monde s’est rendu à l’évidence : non seulement la sécurité n’est pas assurée sur notre territoire, mais l’État n’a plus aucune autorité. Les extrémistes de Nuit debout  n’ont-ils pas saccagé la  place de la République à Paris pendant des semaines, en toute impunité ? La CGT (qui ne représente que 3% des travailleurs, majoritairement protégés) n’a-t-elle pas bloqué le pays plusieurs jours ? Les manifestants contre l’aéroport de Notre Dame des Landes n’ont-ils pas bravé les lois et les décisions politiques ? À l’inverse, la police n’a-t-elle pas blessé des parents d’élèves pour stopper net une manifestation pacifique (en présence des enfants) dans une école primaire ?

Il en est de même lorsque l’Éducation Nationale, au nom pourtant de l’égalitarisme, dilue les filières les plus élitistes. Ou pire encore, lorsque notre Ministre de l’Éducation et notre Premier Ministre, dans un élan commun de bigoterie gauchiste, érigent en exemple culturel un certain Jamel Debouze… Avec de telles saillies, force est de constater que l’institution se saborde de manière parfaitement efficace.

À tel point que les Français informés (ceux qui en particulier nourrissent des ambitions pour leurs rejetons) se demandent quel est son véritable objectif. Pourquoi s’acharner sur le latin, l’allemand et amputer les cours les plus structurants pour des activités transverses tout à fait approximatives ? S’agit-il de couler la culture française ? De bêtifier (de concert avec les médias) un peu plus les Français pour les rendre encore plus faciles à manipuler par la novlangue socialiste ?

Discrédit du libéralisme et consolidation du mythe étatique
C’est dans ce domaine toutefois que l’action gouvernementale aura atteint des records d’hypocrisie : dans cette façon de parler de réformes libérales sans les appliquer, tout en soulevant l’ire de la rue et des indignés pour les avoir mises en place !

Le résultat d’une telle mythomanie est tout simplement incroyable : la presse de gauche (très majoritaire en France) et le corps électoral socialiste n’ont pas de mots assez durs contre un gouvernement socialiste qu’ils accusent d’avoir trahi ses engagements pour mener une politique ultra libérale (sic !).

Outre notre pays, qui continue de régresser, le grand perdant, dans cette scandaleuse méprise, se trouve être le libéralisme, qui paradoxalement,  aura été sali auprès des électeurs étatistes alors qu’il n’a même pas été appliqué, et que ce sont encore et toujours des mesures étatistes inefficaces qui nous sont servies ! Les électeurs socialistes fulminent contre une réforme Khomri dont il ne reste quasiment rien de libéral. Ce qui est le comble de la duplicité.

A côté de cela, les indignés, et des postulants plus ou moins illuminés (ou cyniques ?) comme Montebourg, Hamon, Mélenchon, Le Pen, font perdurer des racontars dignes de contes de fées communistes. Ces personnages là entretiennent des lubies frappadingues, qui n’ont fonctionné nulle part ailleurs, mais auxquelles ils s’accrochent avec émotion, du style « nationaliser les entreprises en difficultés », « faire du social sans contrepartie », s’adonner à la « préférence nationale », « recruter toujours plus de fonctionnaires », etc… À croire que l’économie planétaire est fermée, administrée, et non concurrentielle !

À croire que la France est une sorte d’îlot coupé du monde, si ce n’est le nombril de l’univers ! Or, au lieu de décoder ces escroqueries, la presse de gauche surenchérit sur ces lubies démentes et entretient de ce fait la duperie. L’imposture est gigantesque, unique, lamentable. Et durablement toxique.

Essor du populisme
Un Président incompétent, un méli-mélo économico-politique totalement fallacieux, des mesures politiques en trompe l’œil, des institutions liquéfiées, il n’en faut pas plus pour rebuter les citoyens les moins armés intellectuellement.

L’attirance pour les partis populistes, dont les leaders font preuve chaque jour de leur non appartenance à l’élite (gage d’intégrité et d’efficacité), est un réflexe tout à fait logique chez des électeurs qui n’ont pas le savoir nécessaire pour dissocier le vrai du faux en matière d’économie et de société… C’est une réaction parfaitement naturelle mais qui, hélas, constitue l’un des plus gros dangers pour la démocratie.

Car le populisme conduit tout droit vers la dictature. Dictature du Verbe pour commencer, comme ils semble que ce soit déjà le cas en France depuis quelques années. Dictature pure et dure, ensuite, et ceci très progressivement, très subrepticement…

Photo : By: Jean-Marc Ayrault – CC BY 2.0
Source contrepoints.org


vendredi 26 août 2016

mercredi 24 août 2016

lundi 22 août 2016

jeudi 18 août 2016

Dessins de presse


Dessins de presse

mercredi 17 août 2016

Billets-Les burkinis de la discorde


Les burkinis de la discorde

Comme le faisait fort justement remarquer Archimède, tout corps plongé dans un liquide en ressort mouillé. Ce qui est vrai pour un physicien grec l’est tout autant pour des maillots de bains, y compris pour les plus larges d’entre eux, les burkinis. Il n’en fallait pas beaucoup plus pour déclencher une belle polémique humide à la française.
  
Tout indiquait que ce qui n’aurait pas même fait l’objet d’une ligne dans un pays dignement policé allait en France immédiatement enfler hors de proportion : jugeant probablement indispensable de ramener à la mode l’accoutrement de bain amusant du début du vingtième siècle quitte à en augmenter encore la superficie, des femmes ont récemment introduit le burkini, vêtement « de bain » aux formes amples, couvrant à peu près tout leur corps.

Afin de pimenter l’affaire, l’ensemble de la démarche a été posée dans un cadre religieux, alpha et oméga pratique pour déclencher l’urticaire d’un pays confit de son anticléricalisme forcené : pour ces femmes, il semble indispensable de se couvrir ainsi en allant barboter à la mer afin, non pas d’attirer sur soi les regards des moqueurs, mais de respecter leur conception de leur foi. Prétexte amusant qui, au passage, pousse à s’interroger sur l’avis de Mahomet, Abraham ou Jésus sur des pratiques sociales ou des technologies parfaitement anachroniques avec eux, et qui, surtout, permet à l’observateur extérieur de voir les bienpensants s’emberlificoter gravement avec leurs dogmes intellectuels.

Alors qu’un Edwy Plenel, journaliste tendrement pétri de valeurs socialistes, semble tout joyeux de rappeler que la liberté, la vraie, suppose de pouvoir s’habiller comme on le souhaite, Laurence Rossignol, député elle aussi tendrement pétrie de valeurs socialistes, juge « profondément archaïque » un tel accoutrement et entend le combattre, le tout sans ces arrière-pensées qui seraient à la fois nauséabondes et de droite.

Personne ne s’étonnera de la « cohérence » vibrante d’humanisme étalé à gros rouleaux baveux de nos deux phares de la pensée moderne. Pourtant, Plenel sera le premier à fustiger violemment ceux qui viendraient à utiliser leur liberté d’expression pour se moquer des femmes en burkini (la liberté n’est belle que dans le cadre défini par Edwy, n’est-ce pas). Quant à Rossignol, elle n’aura aucun mal à chanter les louanges des vêtements (ou disons, leur absence) de certains individus lors de Gay Pride endiablées, le projet de société qu’ils représentent alors étant sans aucun doute plus souhaitable à ses yeux que tout autre projet, pas estampillé Camp du Bien. Mais peu importe.


Au-delà de ces « intellectuels » bavards, la France se retrouve scindée en deux par le truchement de médias à court de nouvelles intéressantes. Bondissant d’un arrêté municipal interdisant les burkinis à ces rixes tragiques dans une crique corse, la presse a transformé en affaire nationale ce qui ressemble pourtant à un concours du plus ridicule. Le pompon serait probablement l’intervention du Président François, la mine grave et le verbe hésitant, pour calmer les esprits sur cette question ô combien essentielle à la survie de la Nation.

Car c’est bien de survie qu’on va nous faire croire qu’il s’agit : la République est en danger, mes petits amis ! Les burkinis sont à nos portes et seule une main ferme et des lois taillées au cordeau pourront bouter le danger hors de nos frontières, par ailleurs passoires scandaleusement ouvertes par des traités européens scélérats, et gnagnagna souveraineté nationale, et gnagnagna envoyez le Charles De Gaulle en opex et bombardez la Syrie !

Pourtant, ce n’est pas la première révolution vestimentaire que le pays aura dû subir. Ce n’est pas le premier faux-pas en habillage que le peuple français aura commis, et auquel il aura pourtant brillamment survécu. D’autant qu’en fait de peuple, seule une frange est concernée.

On m’objectera, à raison, que la taille de cette frange semble augmenter et que ce serait là le principal problème. Si l’observation est probablement exacte, le problème n’est pas là. De même qu’il n’est pas dans l’augmentation du nombre de femmes en burquas se baladant dans nos rues. Le problème est, malheureusement, bien plus profond puisqu’il se situe dans l’absence de possibilité de réponse sociale à cette dérive.

En effet, sur les quarante dernières années, tout a été construit pour que soit impossible la seule réponse possible du corps social à ce qu’il trouve incongru (peu importe ici que ce soit à tort ou à raison) : en quatre décennies, on a progressivement rendu tabou voire éventuellement illégal de se moquer de certaines pratiques, de certaines pensées, de certaines religions. À force de subventions et d’orientations politiques délétères, on a donné un pouvoir quasi-illimité à des fourmillements d’associations lucratives sans autre but que celui de policer la pensée des gens.

Il est devenu de facto impossible de ridiculiser ce qu’on trouve ridicule : des ligues de vertu, du CRAN à la LICRA en passant par tant d’autres acronymes grotesques, se sont érigées en pourfendeurs d’oppressions fantasmées et sont toujours sur la brèche pour lutter contre les mauvaises paroles ou les mauvaises pensées (pour les coups et blessures effectives, elles se font plus timides, et deviennent totalement inexistantes lorsque la victime n’est ni de la bonne religion, ni de la bonne couleur).


Les individus, finalement assez rationnels lorsqu’il s’agit de leurs propres intérêts, ont vite compris qu’à ce petit jeu, se moquer ouvertement de ce qu’ils trouvaient ridicule pouvait leur coûter cher. La pression sociale, celle qui fit (heureusement) disparaître les habitudes vestimentaires les plus abominables (depuis les coiffures à queue de rat jusqu’aux chemises pelle-à-tarte en passant par les sous-pulls en tergal) et, plus important encore, cette pression sociale qui permit à la société d’évoluer en relâchant justement les contraintes qui existaient sur les habitudes et les ségrégations de tous ordres, cette pression sociale n’est plus possible puisqu’elle est maintenant juridiquement encadrée.

C’est par exemple cette pression sociale qui faisait que, jadis, un petit con surpris à faire des bêtises se prenait les rodomontades de la maréchaussée suivie d’une déculottée de ses parents. Le petit con grandissait et devenait moins con. À présent, la pression sociale ne joue plus, les parents, confits de l’idéologie collectiviste, ayant abdiqué leurs prérogatives aux forces de l’ordre (on paye l’État pour ça, après tout) qui n’ont plus le temps de les utiliser. Les petits cons deviennent grands mais restent cons.

Maintenant, si on a encore le droit de faire des blagues sur les blondes (pour combien de temps encore ?), il est en pratique très risqué d’en faire sur d’autres catégories de personnes. Or, s’il est impossible de se moquer, de ridiculiser ou de simplement exprimer son opinion, la norme sociale n’est plus définie et la frustration s’installe. Elle se traduit mécaniquement par une montée des tensions entre les individus qui font alors tout pour marquer leurs différences. Et là où la pression sociale aurait utilisé la moquerie pour juguler les envies des uns et des autres de trop se différencier, la perte de liberté d’expression entraîne une montée des comportements radicaux, destinés à marquer la capacité des uns et des autres à bien se rebeller contre le pouvoir en place.

Mieux encore : les burkinis n’auraient pas été un problème si la République avait pu garantir à ses citoyens le pouvoir de s’en moquer sans craindre ni les ires des associations mouche-du-coche, ni, plus incroyable encore, celles des coreligionnaires armés de harpons qu’un état d’urgence devrait pourtant rendre fort improbable. S’il y a un problème avec ces vêtements, ce n’est pas dans leur existence ou dans la volonté farouche et ridicule de certaines de s’en accoutrer, mais dans le fait qu’on ne puisse plus librement critiquer ces choix (ou tout autre, du reste) sans risquer l’incident juridique ou la rixe punitive : une société saine peut fort bien prôner la tolérance sans s’imposer l’approbation.

En France, on en est maintenant très loin, et à chaque consternante poussée d’hystérie médiatique sur ce genre de sujet, on s’en éloigne encore en polarisant les foules en deux groupes diamétralement opposés, irréconciliables : celui de l’approbation niaiseuse et universelle au prétexte de valeurs républicaines indéfinies, et celui de l’interdiction impraticable sous les mêmes prétextes grandioses.

De burquas en burkinis, de débats médiatiques idiots en prises de position politique consternante, que croyez-vous donc qu’il va bien pouvoir se passer ?



Source contrepoints.org

lundi 15 août 2016

samedi 13 août 2016

mercredi 10 août 2016

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samedi 6 août 2016

vendredi 5 août 2016

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jeudi 4 août 2016

mardi 2 août 2016

lundi 1 août 2016

Billets-La censure chinoise, comment ça marche ?


La censure chinoise, comment ça marche ?

Un professeur américain d'Harvard a ouvert un réseau social en Chine pour tester les mécanismes de la censure. Il a découvert que les entreprises privées ne manquent pas d'idées pour aider les autorités et s'octroyer un marché juteux.

Neuf ans après Mark Zuckerberg, qui a quitté Harvard pour fonder Facebook, un professeur de sciences politiques de la même université, Gary King, a décidé qu'il était temps de lancer son propre réseau social.

Il ne l'a pas fait pour gagner de l'argent, mais pour voir le système de censure chinois de l'intérieur, un système où les fournisseurs d'accès à Internet acceptent de s'autocensurer conformément aux directives gouvernementales. Pour ne pas mettre en danger les personnes impliquées dans son projet, Gary King ne divulguera pas l'URL de son site.

Les études antérieures ont surtout observé les réseaux sociaux chinois pour déterminer quelles informations y étaient censurées. Certaines reposaient sur des interviews de personnes impliquées dans le système de censure, qui acceptaient de parler du rôle qu'ils y jouaient. Mais en s'adressant à un important fournisseur chinois de logiciel en ligne pour l'aider à gérer son site, Gary King s'est trouvé aux premières loges pour étudier les outils de censure et il a pu demander à l'entreprise tout ce qu'il souhaitait savoir sur le mode d'utilisation de ces outils. "Quand nous avions des questions, il nous suffisait d'appeler le service clientèle", dit-il. "Ils étaient payés pour nous aider."

Comme d'autres expériences menées parallèlement sur des réseaux sociaux connus, l'incursion de ce professeur dans le monde des entreprises en ligne a montré que la censure chinoise repose beaucoup plus qu'on ne le pensait sur un filtrage automatique qui bloque des posts et les soumet au contrôle de censeurs avant leur publication en ligne. L'équipe de Harvard a également découvert que le système de censure chinois repose sur un marché capitaliste étonnamment dynamique, où des entreprises se font concurrence pour offrir de meilleurs services et technologies de censure.

La censure des sites chinois est irrégulière et on sait qu'elle recourt souvent à un simple contrôle manuel. Mais, selon Gary King, le logiciel chinois qui lui a été fourni pour gérer son site disposait d'une panoplie d'outils de censure automatique assez complexes et son fournisseur lui a même prodigué des conseils d'utilisation. "Les options étaient vraiment stupéfiantes", observe-t-il.

Trois censeurs pour 50 000 utilisateurs
Non seulement les posts pouvaient être automatiquement bloqués pour être contrôlés manuellement par un censeur en fonction de certains mots-clés, mais ils pouvaient être traités différemment en fonction de leur longueur, de l'endroit où ils apparaissaient sur le site et du fait qu'ils entamaient une conversation ou la poursuivaient. Certains internautes pouvaient être la cible d'une censure plus agressive, en fonction de leur adresse IP, de la date de leur dernier message et de leur réputation dans le cyberespace.

Les appels au service clientèle du fournisseur du logiciel ont révélé qu'il était possible d'acquérir une série de modules payants pour obtenir des options de filtrage plus sophistiquées. Ces conversations ont également permis d'éclaircir le vieux mystère du nombre de censeurs chinois contrôlant les posts publiés sur Internet. King a été informé que pour être en mesure de répondre aux exigences du gouvernement, un site doit employer deux ou trois censeurs pour 50 000 utilisateurs. Le professeur estime donc qu'il y a entre 50 000 et 75 000 censeurs travaillant pour des entreprises du Web en Chine [Selon le journal pékinois Xinjingbao, deux millions de personnes sont employées dans le pays à "analyser l'opinion sur internet" sous la direction du ministère de la Propagande et des sites internet. Ils observent les commentaires sur les informations qui font le buzz du jour et font leurs rapports aux "décideurs", explique le journal].

Dans une expérience menée parallèlement, l'équipe de Harvard a recruté des dizaines d'internautes en Chine pour poster 1 200 messages sur 100 réseaux sociaux afin de voir lesquels étaient censurés. Un peu plus de 40% ont été immédiatement bloqués par des outils de censure automatique ; certains ont été publiés un ou deux jours plus tard, d'autres jamais. A en juger par les sorts différents réservés aux posts, ces sites utilisaient un large éventail de technologies et de méthodes de censure.

Pour Gary King, ces résultats et ceux de son propre site donnent à penser que la Chine a créé une sorte de marché de la censure très compétitif, au sein duquel les entreprises en ligne sont libres de gérer leur système de censure à leur guise tant qu'elles ne laissent pas des opinions sensibles fleurir sur le Web. Ce dispositif incite les entreprises à chercher des méthodes de censure plus efficaces en vue de minimiser leur impact sur la rentabilité. "Il y a une grande diversité et de nombreuses possibilités d'innovations techniques et commerciales dans la censure", souligne le professeur. "Les entreprises peuvent faire des essais et choisir parmi les sociétés qui cherchent à leur vendre des technologies de censure."

Jason Q. Ng, un étudiant de l'Université de Toronto spécialisé dans la censure chinoise, estime que la perspective offerte par Gary King sur les différentes options qui s'ouvrent à la censure est sans précédent. "Les autorités semblent reconnaître que le gouvernement n'est pas le mieux placé pour exercer la censure", dit-il. "Mieux vaut confier cette tâche à des entreprises privées, non seulement pour des raisons d'innovation mais aussi de ressources."

Ce marché fonctionne sous la menace constante d'actions punitives du gouvernement, ajoute l'étudiant. Après l'affaire [du dirigeant déchu de Chongqing] Bo Xilai l'an dernier, Tencent Weibo et Sina Weibo, les Twitter chinois, ont été fermés pendant trois jours et plusieurs entreprises plus modestes, définitivement. "Un compte rendu de [l'agence officielle] Xinhua a expliqué que ces mesures touchaient des entreprises qui ne faisaient pas leur travail correctement."

 Dessin de Stephff Droits réservés
Source Courrier International

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