jeudi 31 janvier 2019

Lectures Chuck PALAHNIUK-Peste


Chuck PALAHNIUK
Peste
Traduit de l’américain par Alain Defossé

(4ème de couverture)
Mais qui est donc Buster Casey, alias Rant ? Dans un futur où une partie de la population est « diurne » et l’autre « nocturne » selon un couvre feu très strict, « Peste » prend la forme d’une biographie orale faite de rapports contradictoires émanant de témoins qui ont connu le mystérieux Buster de près ou de loin. Garçon aux mœurs étranges, friand de morsures animales en tous genres pour certains, génial tueur en série ou répugnant individu pour d’autres, le véritable Buster Casey semble, au fil des récits, de plus en plus insaisissable et protéiforme. De quoi alimenter le mythe…

Dans ce roman, sorte d’éloge funèbre chanté par un chœur constitué d’amis, de voisins, de policiers, de médecins, de détracteurs et d’admirateurs, Chuck Palahniuk explore les tréfonds de la vie moderne et dresse le portrait en creux d’une Amérique en mal de repères. Evangile subversif et grotesque où le rire donne la réplique à l’horreur, « Peste » décrit un monde qui marche sur la tête, où la vie est à mourir d’ennui et la mort positive et créatrice.

Chuck Palahniuk est une des figures majeures de la littérature américaine contemporaine : l’univers noir et extrême de ses romans, parfois portés avec succès à l’écran comme « Fight Club » ont fait de lui un auteur culte. Il vit dans l’Etat de Washington et se consacre à l’écriture. Après « Choke », « Le Festival de couille », et « A l’estomac », « Peste » et le quatrième ouvrage de Palahniuk publié chez Denoël.

(1ere phrase :)
Wallace Boyer(Vendeur de voitures) : Comme la plupart des gens, je n’ai pas rencontré ni parlé à Rant Casey avant sa mort.

(Dernière phrase :)
Toni Wiedlin (chauffarde) continue de participer aux Nuits de Crashing, mais nie toutes les rumeurs selon lesquelles elle en serait devenue l’organisatrice.

438 pages – Editions Denoël & d’Ailleur 2007 pour la traduction française

(Aide mémoire perso :)
« Peste » est la biographie documentaire de Buster Casey, dit Rant, soit le plus grand serial killer de tous les temps, à moins qu’il ne soit qu’un sombre crétin dégénéré de Middletown, à moins qu’il ne soit qu'un génial voyageur spatio-temporel aux pouvoirs divins, à moins qu’il ne soit le seul mec capable de déterminer le détail du dernier repas d’une femme après un cuninlingus, à moins qu’il n’ait jamais existé.

Les documentaires télévisés américains sont friands de ce genre de biographie "orale" : une longue succession d’interviews croisées vient dresser le portrait en creux d’une rock star décédée ou d’un homme politique ou d’un criminel important. Quelques photos par-dessus en zoom avant, et voilà de quoi remplir une heure de TV à peu de frais. Une heure, sans compter la pub.

Chuck Palahniuk adopte ce format, ou son équivalent écrit, pour raconter Buster Casey. Ou plutôt pour établir sa légende.

Disons le immédiatement : le parti pris à ses limites. Page après page, un foutoir décousu de propos contradictoires esquissent l’évangile d’un type dont on ne saura jamais s’il était une divinité ou un paumé crado. Drôle, serré.

Palahniuk n’a pas que des amis.

Depuis « Fight Club », il écrit souvent où on l’attend : bourré d’idées publicitaires, simple et efficace, toujours semé d’un doigt de porno ou de violence, méchant pour l’Amérique - on pourrait appeler ça de la trash-réalité. Forcément, on aime.

Depuis « Fight Club », ses ficelles sont bien identifiées : débusquer le ridicule de nos petites misères de citoyens noyés dans la masse et le consumérisme, avec ici et là des éléments de vérité souvent tirés de la presse ou de son boulot de journaliste ou de recherches documentaires. Voilà pour la réalité. Et puis aller dans la chair pour jouer sur les contrastes entre l’anonymat de nos corps et la violence des fluides vitaux [sueur, sperme, sang]. Voilà pour le trash.

A côté de ça, faut reconnaitre, Palahniuk frappe rarement à côté : il a beau cabotiner, sa prose percute particulièrement bien les esprits. On est pas obligé d’aimer, mais on ne peut pas cracher dessus.

« Peste » ne déroge pas à ces quelques principes, le format de la "biographie orale" est intéressant.

Buster Casey est un jeune américain dont les amis d’enfance, les parents, les rencontres amoureuses, le shériff, les voisins, les ennemis, un Historien, bref une bonne trentaine de personnes, nous brosse l’histoire, sa mort étant donné pour acquise d’entrée de jeu.
L’amusant est dans les contradictions de ces "témoignages". Le mythe naît du doute, de la répétition et de l’inexplicable. Chaque chapitre tresse anecdotes, on-dits, mensonges et calomnies.

Buster Casey enfant transforme la fête d’Halloween en vraie exposition d’abats animaux. Buster Casey adolescent joue à plonger son bras dans les terriers du désert, parce qu’il aime se faire piquer/mordre/griffer par tout ce qui passe, avec une préférence pour les araignées. Buster Casey jeune homme séduit tout ce qui passe, homme ou femme, et lègue à chacun un échantillon de maladie rare et de virus dangereux.

C’est drôle, documenté [méthode Palahniuk : s’ancrer dans le réel] et ça se lit tout seul. Buster Casey a des érections si gênantes en classe qu’il en fait un prétexte d’exemption. Buster Casey trouve des trésors dans de vieux pots de peintures. Buster Casey disparait sans laisser de trace dans un spectaculaire et télévisé accident de la route.

« Peste » est truffé de bonnes idées [de quoi écrire trois bouquins pour d’autres]. Lorsque des théories de voyage dans le temps s’immiscent dans l’intrigue, ça dérape total. La partition entre les diurnes et les nocturnes imaginée par Palahniuk semble collée par-dessus. Les Nuits de rentre-dedans collectif en bagnole envahissent les pages.

J’ai aimé les conseils du marchand de voitures pour capter l’attention du client [ça sent le vécu à plein nez, méthode Palahniuk]. J’ai aimé le basculement de l’économie locale aux mains des enfants soudains richissimes [très drôle].

J’ai aimé ce livre.

Lectures Chuck PALAHNIUK-Le Festival de la couille et autres histoires vraies


Chuck PALAHNIUK 

Le Festival de la couille et autres histoires vraies


Traduit de l’américain par Bernard Blanc


(4ème de couverture) 

On connaît Chuck Palahniuk : ses héros illuminés, ses intrigues surréalistes, son exploration d’un monde à la marge. Ses livres sont le reflet d’une réalité peu ragoûtante qu’il étudie cliniquement. Un univers à la fois burlesque et macabre qui renvoie à son histoire personnelle, aux épreuves qu’il a traversées et à son goût pour les expériences incongrues.
Une partouze géante au fin fond de l’Ouest américain, un combat de moissonneuses-batteuses, une expédition en sous-marin nucléaire, un face-à-face improbable avec Marilyn Manson : autant d’évocations d’une Amérique déjantée dont Chuck Palahniuk s’est fait le chroniqueur.


Dans ce recueil d’histoires vraies où se mêlent subversion, tendresse, humour décapant et exhibitionnisme, il démontre combien la réalité peut dépasser l’imagination et dévoile ainsi l’envers du décor de ses romans. Car c’est aussi de littérature et du travail de l’écrivain qu’il s’agit. On ne ressort pas indemne de ce voyage au bout du bizarre et de tragique.
Chuck Palahniuk, quarante-deux ans vit à Portland dans l’Oregon. Il est notamment l’auteur de « Fight Club » 1999, roman culte adapté au cinéma par David Fincher, et de « Choke » (Denoël 2002).


(1ere phrase :)
Une jolie blonde repousse sur l’arrière son chapeau de cowboy.


(Dernière phrase :)
Dale Shackleford a fait appel de sa condamnation à mort.
298 pages – Editions Denoël & d’Ailleur 2005 pour la traduction française


(Aide mémoire perso :)Premier recueil non-fiction de Palahniuk paru en français, "Le festival de la couille et autres histoires vraies" fait partie de ces livres qui hantent longtemps le lecteur.
Enfin débarrassé de la médiocre prestation de Freddy Michalsky aux manettes traductantes, le texte se distille comme un alcool délicieusement fruité sous la houlette de Bernard Blanc. Un changement bienvenue qui permettra aux nouveaux venus de découvrir un Palahniuk au meilleur de sa forme, là où les connaisseurs se contenteront d’apprécier ces tranches de vies douces amères, racontées tranquillement par un auteur décidément majeur.


Si le Festival de la couille ne concerne finalement qu’un seul texte [Testy Festy en anglais], le recueil lui-même s’intitule assez explicitement Stranger than fiction. traduit littéralement par "Plus étrange que la fiction", le titre a le mérite d’être clair : les histoires compilées ici sont des oeuvres journalistiques. Elles concernent donc des personnages, des situations et des contextes bien réels. Et si cette vérité si chère à l’objectivité est quelque peu malmenée par l’absurde, le tragique ou même l’héroïque, qui s’en plaindrait ?


A mi-chemin entre le récit autobiographique et le compte rendu d’actualité, "Le festival de la couille" n’a rien d’un brûlot nihiliste engagé, mais allie au contraire pudeur et sobriété, pour un résultat étonnamment tendre à l’égard du genre humain.
Terrible constat pour ceux qui pensaient tout connaître de leur ami Chuck. Le monsieur aime son prochain. Et il le prouve magistralement en évoquant quelques spécimen aussi barrés que lumineux, sans jugement ni catégorisation, sans moquerie ni exagération, avec intelligence et parfois même une sincère dose d’admiration.


De l’admiration, i
l faut pourtant gratter loin pour en trouver face à ce concours de stock-car-moissonneuse-batteuses, où des machines agricoles relookées façon Mad Max s’affrontent dans la boue, dans un immense hurlement de ferraille torturée, pilotées par des allumés fidèles à un idéal sportif parfaitement inaccessible au commun des mortels.

Du respect, il faut chercher longtemps pour en concevoir face aux tarés fracassés par la vie qui se foutent des peignées dans le cadre très structuré de la lutte gréco-romaine. Sport méconnu et méprisé, peu médiatique et donc pauvre, pratiqué pourtant dans les règles de l’art par des hommes et des femmes dont le courage et l’abnégation laissent pantois un lecteur incrédule.

Quant aux bâtisseurs de châteaux médiévaux, ils pourraient faire sourire. Mais pour peu qu’on découvre l’hallucinante somme d’efforts que leur construction représente, quand on comprend peu à peu que leurs propriétaires les ont bâtis de leurs mains, pierres après pierres, sacrifiant parfois leur vie de famille au profit d’une passion aussi payante que destructrice, on a bien du mal à ne pas avoir envie de leur offrir un verre en leur tapant sur l’épaule.


Ils sont tous comme ça, les personnages de Palahniuk. Allumés, grands-brûlés de l’existence, dingues et attachants. Tous avec leurs délires, leurs passions, leurs soucis. Tous à des milliers d’années lumières de nos vies, et pourtant si proches. Ce sont nos voisins, nos banquiers, nos facteurs, nos agents d’assurance, ils tournent dans leur monde en orbite désynchronisée, et nous ne pourrons jamais en voir les deux faces. C’est comme ça et c’est tant mieux. Palahniuk leur donne la parole, du plus humble au plus célèbre, avant de la prendre lui-même pour s’auto-ridiculiser et rendre à l’obsessionnel ce qui appartient à l’obsessionnel.


Notre monde est peut-être bien malade, mais on y trouve encore une sacré humanité.
Merci, Monsieur, de nous la rendre si lisible.

Lectures Chuck PALAHNIUK-A l’estomac


Chuck PALAHNIUK
A l’estomac
Traduit de l’américain par Bernard Blanc

(4ème de couverture)
En répondant à cette mystérieuse annonce, les vingt-trois protagonistes d’A l’estomac s’imaginaient couler des jours tranquilles dans un endroit de rêve.

Oui mais voilà, l’endroit en question, un théâtre délabré, est… terrifiant.
Isolés du monde, maltraités, privés petit à petit de toute ressource – chauffage, lumière et surtout nourriture -, nos écrivaillons s’affolent.

Convaincus qu’ils sont l’objet d’une mise en scène propre à nourrir le best-seller de l’année ou le scénario d’un réality-show à succès, tous se lancent dans une compétition acharnée pour survivre. A mesure que se dégradent les conditions de vie, leurs manigances pour sortir indemnes de ce lieu infernal se font plus cruelles, et leurs écrits, qui composent le livre, plus déviants.

Chuck Palahniuk est une des figures majeures de la littérature américaine contemporaine : l’univers noir et extrême de ses romans a fait de lui un auteur culte. Il vit dans l’Etat de Washington et se consacre à l’écriture. Après Choke et Le Festival de la couille, A l’estomac est le troisième ouvrage de Palahniuk publié chez Denoël.

(1ere phrase :)
Lorsque l’autobus s’arrête au coin de la rue où Camarade Maussade a accepté d’attendre, elle est là, avec des fringues achetées dans un surplus de l’armée, un gilet pare-balles - vert olive foncé – et un pantalon de camouflage trop grand pour elle, dont les revers laissent voir ses bottes d’infanterie.

(Dernière phrase :)
Et dès lors, en ce magnifique jour ensoleillé, le monde entier vous aimera.
536 pages – Editions Denoël & d’Ailleur 2005 (2006 pour la traduction française)

(Aide mémoire perso :)
Après le mémorable « Choke », ou comment gagner sa vie en vomissant dans les grands restaurants, et le déroutant « Fight Club », on pouvait croire que Chuck Palahniuk avait épuisé son stock de drôles d'atteintes au bon goût et à l'esthétiquement correct. Grave erreur, «À l'estomac », son livre le plus long et le plus ambitieux. À la fois recueil de nouvelles, de poésie et roman, ce texte met en scène un bataillon d'aspirants écrivains coincés dans un ancien théâtre par un mystérieux démiurge au visage de vieillard et aux moeurs d'enfant. Au programme : leçon sur les dangers des méthodes alternatives de masturbation, descentes d'organes, mutilations, cannibalisme, traité des joies de la clochardisation. Nos littérateurs trash peuvent trembler, non seulement Palahniuk va infiniment plus loin qu'eux, mais en plus il place toujours ses outrances du côté du rire. Mieux, leur somme forme une réflexion complexe sur la transformation de l'information en dramaturgie. Un livre où tout est permis mais où rien n'est gratuit.

Si la structure est curieuse, le contenu l'est encore plus. La trame générale atteint très vite des sommets d'horreur absurde. Comme chez Bret Easton Ellis, les personnages sont des icônes désincarnées dont les sentiments et les motivations sont soigneusement mises de côté – en attendant la nouvelle qui les mettra en scène. Chacun, à tour de rôle, un peu comme dans un groupe de parole, s'avance et raconte un épisode significatif de sa vie. Chaque nouvelle est une sorte de feu d'artifice horrifique permettant à Palahniuk d'explorer et de critiquer un aspect de la société américaine. Celle-ci est comme un cadavre maquillé et parfumé, dont l'auteur nous montre la réalité : les fluides qui suintent, les tissus qui pourrissent, les vers qui grouillent. Le corps est profané de toutes les façons possibles et imaginables : sexe sordide, mutilation, corruption, torture, cannibalisme : rien n'est épargné, et la crudité des détails, associés à leur précision maniaque (Palahniuk ferait un grand contributeur à Wikipedia), rend les scènes quasiment insoutenables.

Composé de 23 histoires d'horreur racontées par une bonne douzaine de personnages, A l'estomac (salement traduit de l'anglais Haunted) est un roman à part entière de Chuck Palahniuk , avec son lot de surprises (terrifiantes et écoeurantes ici), de coups de génie et de roublardise. Après « Fight Club », « Choke » et « Survivor », on sait ce que le label Palahniuk recouvre : une plongée dans un monde déjanté amusant et inquiétant, une approche ultradétaillée d'une pathologie souterraine à résonnance sociétale, une analyse au marteau de la société américaine, un style direct exposé à la 1ère personne en compte à rebours où le début rattrape la fin.


Les bizarreries, originalités, faits divers, anecdotes, et autres travers qui peuplent les nouvelles peuvent être directement transposées dans les scénarios. Assassins masseurs de pied, Boîtes à cauchemars, Clochards richissimes, ne sont que quelques-uns des éléments à extraire du livre. Au pire, vous aurez une vision au vitriol de la société américaine, et des cauchemars pour trois mois.

Lectures Chuck PALAHNIUK-Journal intime


Chuck PALAHNIUK
Journal intime
Traduit de l’américain par Freddy Michalski
(4ème de couverture)
Misty Wilmot est une femme frustrée : coincée sur une île défigurée par l’invasion touristique, elle travaille comme une esclave dans le grand hôtel du coin pour faire vivre sa famille. Son mari, Peter, un architecte qu’elle a rencontré des années plus tôt dans une école d’art, a tenté de se suicider et se retrouve dans le coma.


Plus rien ne tourne rond dans la vie de Misty : pourquoi Peter, avant de vouloir en finir, s’est-il amusé à sceller certaines pièces des villas touristiques sur lesquelles il travaillait ? Comment expliquer les messages haineux qu’il a bombés sur les murs, annonçant la vengeance des habitants de l’île contre les envahisseurs extérieurs ? Pourquoi les autochtones se mettent-ils à la regarder bizarrement ?


Misty décide de mettre ses peurs noir sur blanc et d’écrire un journal intime. Mais attention, la folie guette…


Au fils du temps et de ses livres, les interrogations de Palahnuik se font plus complexes, plus intimes et plus profondes : ses récits deviennent de plus en plus inclassables ; ils louchent vers le fantastique, l’irréel et le paranormal. Mélange de Jung, Borges, Levine – l’auteur de Rosemary’s Baby – passé à la centrifugeuse Palahnuik, ce Journal intime est un cocktail détonant.


Chuck Palahnuik est diplômé de l’université de l’Orégon. Il vit aux environ de Portland entouré de ses chiens. Il est l’auteur de « Fight Club », roman culte récompensé en 1999 par « La Pacific Northwest Booksellers Association » et adapté au cinéma. Journal intime est son sixième roman. Il est également l’auteur d’un recueil d’articles, Le festival de la couille et autres histoires vraies, publié chez Denoël.


(1ere phrase :)
Aujourd’hui, un homme a appelé de Long Beach.
(Dernière phrase :)
Je fonde l’espoir que cette histoire la sauvera – cette petite – quel que puisse être son nom la prochaine fois.


335 pages – Editions Gallimard – La Noire 2005 pour la traduction française


(Aide mémoire perso :)Misty vit dans l’île de Waytansea. Peintre, elle rencontre Peter à l’école des beaux arts. Tous deux rêvent de pouvoir vivre de leur art à New York lorsque le père de Peter meurt. Ils vont alors sur Waytansea pour assister à la crémation, régler les papiers et s’occuper de la mère de Peter, Grace. Quelques années plus tard Misty est serveuse dans le restaurant de l’hôtel de l’île, Peter est dans le coma après avoir tenté de se suicider, la famille à perdue gloire et fortune et l’île est devenue une gêole d’amertume et de rancœur.

Evidemment Misty ne peint plus. Elle travaille pour nourrir sa fille et sa belle-mère. Depuis quelques semaines les estivants reviennent dans leurs maisons pour les vacances. Maisons où Peter, chargé de quelques réparations, a cloisonné des parties des maisons et y a graffé des textes plein de haine envers sa femme, les vacanciers, les gens de l’île. Des messages d’apocalypse.


La trame de ce roman est incroyable (avec des airs de Rosemary’s Baby). Ecrit sous forme de journal intime que Misty écrirait à l’adresse de Peter pour le jour ou il se réveillerait, on suit avec elle jour après jour, les mutations de l’île, ses propres changements, le comportement étrangement manipulateur de sa belle-mère.
Chuck Palahniuk décrit l’enfermement, la dépression, l’alcoolisme, les questions de l’inspiration artistique dans la souffrance avec violence, mélancolie, sadisme. Une telle noirceur et tel défaitisme émane de ce livre qu’il faut être bien accroché avant de le lire. Lorsque je parle de ce livre, de son histoire, des personnages, du message qu’il véhicule, je ne peux qu’être positive et je suis un peu frustrée de constater que « journal intime » ne m’a pas transcendée comme il aurait du. Peut-être est-ce dû à l’écriture toujours un poil distancié, comme cherchant à se protéger de ses propres mots, à la nébuleuse fantasmagorique autour de Misty. On retrouve des thèmes très forts, présent dans « Fight Club », des thèmes qui ne peuvent laisser indifférent : la fatalité, la manipulation, la domination de la société de consommation, notre vie en plage publicitaire, la rébellion, l’adolescence désespérée, la violence des hommes entre eux.

lundi 28 janvier 2019

Photos-Diane Arbus



Diane Arbus

Des corps et des visages étranges, des visions qui dérangent. Chaque photo de Diane Arbus semble happée par ses personnages.


Sans titre (6) 197071. © The Estate of Diane Arbus

Allez savoir comment elle s'y est prise. Cette fois encore, Diane Arbus a réussi à convaincre un homme de la laisser entrer dans sa chambre d'hôtel, à New York, pour un portrait. A première vue, ce cliché de 1961 n'a pas grand intérêt. A y regarder de plus près, c'est un monstre qui apparaît sous les traits de cet inconnu : ses pieds sont à l'envers, tournés vers le dos. L'image provoque le malaise. Comme toutes celles que la photographe réalise sur les phénomènes de foire – homme percé d'épingles, femme « sans tête », musclors tatoués – et les exclus de toutes sortes – drag-queens, travestis ou fou errant torse nu. Diane Arbus a le don pour jeter le trouble sur l'identité d'un modèle.


Enfant avec une grenade en plastique dans Central Park, New York 1962.  © The Estate of Diane Arbus

« Je suis née en haut de l'échelle sociale, dans la bourgeoisie respectable, mais, depuis, j'ai fait tout ce que j'ai pu pour dégringoler », confiait-elle. Elle voit en effet le jour, en mars 1923, sous le nom de Nemerov, dans une riche famille juive, propriétaire du grand magasin de mode Russeks, sur la Cinquième Avenue, à New York. Son frère Howard (futur écrivain et poète), sa petite sœur et elle gran­dissent dans le quartier huppé de Central Park ouest, entourés de ­domestiques. A 14 ans, Diane tombe amoureuse d'Allan Arbus ; elle se marie avec lui quatre ans plus tard, malgré l'hostilité de ses parents pour cette union avec un petit photographe sans fortune.

Le jeune couple mange de la vache enragée, crée un studio de photos de pub et de mode, et réussit à se faire un nom en signant des couvertures pour les magazines Glamour ou Vogue. Mais la seule véritable préoccupation de Diane Arbus reste son époux, devant lequel elle est pétrie d'admiration, et ses deux filles, Doon et Amy.


Couple d’adolescents à Hudson Street, New York 1963. © The Estate of Diane Arbus

C'est à 38 ans seulement, après qu'Allan l'a quittée pour une actrice, qu'elle décide de se consacrer entièrement à son œuvre. Six ans plus tard, en 1967, trente de ses tirages sont présentés au musée d'Art moderne de New York (MoMA) à côté des autoportraits de Lee Friedlander et des scènes de rue de Garry Winogrand, dans une exposition devenue mythique, « New Documents ». Les trois artistes changent la conception de l'image documentaire : « Leurs prédécesseurs se mettaient au service d'une cause sociale. Ils voulaient montrer ce qui n'allait pas et persuader les autres d'agir pour y remédier. Le but de ces jeunes photographes n'est pas de réformer la réalité, mais de la connaître », écrit alors avec justesse John Szarkowski, conservateur au MoMA.

Ils sont trois, mais c'est Diane Arbus qui fait l'événement et devient aussitôt célèbre, grâce à ses images de freaks, mais également pour sa ­façon très particulière de photo­graphier de petites jumelles. Les gamines sont la copie conforme l'une de l'autre. Debout bien droites, soudées comme des siamoises, apprêtées à l'identique, même expression neutre des visages, elles deviennent devant l'objectif du Rolleiflex aussi différentes que peuvent l'être l'eau et le feu. L'effet est magique. Car l'obsession de Diane Arbus est de révéler la singularité de chaque être au-delà de son apparence. Tout en brouillant, avec une certaine perversité, la frontière entre l'équilibre mental et la folie, le féminin et le masculin, la normalité et l'anormalité. Sa technique et ses choix esthétiques sont cohérents avec son projet : le format carré de ses images en noir et blanc semble emprisonner ses modèles. Aucune échappatoire n'est possible. D'autant qu'elle les saisit au flash, parfois à bout portant, les foudroyant en un instantané, comme saisis en plein vol. Expressions stupéfaites, gestes, grimaces trahissent des drames enfouis, des désirs cachés.


Jeune homme en bigoudis chez lui, 20e Rue, N.Y.C. 1966. © The Estate of Diane Arbus

A ses débuts, sujette à la dépression, doutant de tout, Diane Arbus s'était inscrite à la New School, au cours de Lisette Model, photographe réputée pour ses portraits grotesques de pauvres, de vieillards ou de cette femme énorme, en mail­lot de bain, échouée comme une baleine sur la plage de Coney Island. Model la pousse à s'approcher au plus près de l'inconnu, de l'étrange. Du tabou, de l'interdit. De tout ce qui lui fait peur. A casser la distance avec ses modèles.

Diane Arbus a retenu la leçon. Sa proximité devient telle, avec ses sujets, qu'elle semble s'identifier corps et âme à ce jeune homme en bigoudis au regard égaré. Ou à cette vieille dame à la peau flétrie, au « chapeau rose », comme l'indique la légende. En de très rares occasions, elle prend le bus pour un camp de nudistes du New Jersey ou pour photographier un hermaphrodite dans le Maryland. Mais son terrain de chasse favori – son ami Walker Evans l'appelait à juste titre « Diane, la chasseresse » – reste New York, de Central Park aux bas-fonds. Quand un visage l'arrête, elle s'exclame : « Oh, comme vous êtes magnifique ! Puis-je vous photographier ? » et s'invite immanquablement chez son modèle. En 1968, elle raconte en quatre clichés une histoire incroyable : la métamorphose de Catherine Bruce en Bruce Catherine. On voit d'abord une femme ­coquette, assise sur un banc. On la retrouve ensuite chez elle, en sous-vêtements. Perruque enlevée, on découvre sur la troisième image que c'est un homme. Qui finit par poser en costume et cheveux courts, totalement méconnaissable.


Jumelles identiques, Roselle, N.J. 1967. © The Estate of Diane Arbus

En 1971, Diane Arbus réussit à convaincre Germaine Greer de se laisser photographier dans sa chambre d'hôtel. La féministe, auteur du best-seller La Femme eunuque, tombe aussitôt sous le charme de celle qui lui apparaît « en petite fille délicate, douce comme un pétale de rose. Je n'ai pas pu lui donner d'âge, mais elle m'a charmée avec sa saharienne et sa coupe à la garçonne. Elle trimballait un sac de matériel tellement énorme que j'ai failli lui proposer de l'aider. » Diane Arbus a alors 48 ans, et il ne lui reste que quelques semaines à vivre. Elle demande à son modèle de s'allonger et, « brusquement, se souvient Greer, elle s'est agenouillée sur le lit en plaçant son objectif juste au-dessus de mon visage et a commencé à prendre en gros plan mes pores et mes rides ! Elle me posait des questions très personnelles et là, j'ai compris qu'elle ne déclenchait que lorsqu'elle voyait sur mon visage des signes de tension, d'inquiétude ou d’agacement. »


Arbre de Noël dans un living-room à Levittown, Long Island, N.Y. 1963. © The Estate of Diane Arbus

Diane Arbus s'est souvent dite prête à tout, « à perdre [sa] réputation ou [sa] vertu, ou tout au moins ce qu'il en reste, pour une bonne photo ». Quitte à prendre des risques insensés. Elle racontait qu'elle couchait fréquemment avec ses modèles – un marin rencontré dans un bus, un Portoricain croisé dans une rue, un nain, un couple de nudistes. Longtemps, ce comportement, qui éclaire la forte intimité qu'on ressent face à certaines images, a été tenu secret par sa fille Doon. En 2003, cette dernière dévoile la personnalité complexe de sa mère lors d'une rétrospective, « Diane Arbus Revelations », présentée dans le monde entier sauf en France. Sur une planche-contact, on découvre ainsi un couple – un Noir et une Blanche – s'embrassant et se caressant sur un canapé. Sur l'une des douze images, Diane ­Arbus prend la place de la femme, et s'allonge, nue, sur les genoux de l'homme. Ainsi, bien avant Nan Goldin, elle photographia des couples, parfois deux femmes, faisant l'amour, et fut une véritable pionnière dans l'exploration de l'intime, un thème majeur de la photographie contemporaine. 


Jeune homme au canotier attendant de défiler en faveur de la guerre, N.Y.C. 1967. © The Estate of Diane Arbus

Rarement exposée en France, Diane Arbus, portraitiste exceptionnelle s’est suicidée, le 26 juillet 1971. Diane avait traversé le miroir, et plus aucun retour n'était possible.
  

 
Autoportrait-enceinte-NYC-1945

Autoprtrait

Source Luc Desbenoit (Télérama)

vendredi 25 janvier 2019

jeudi 24 janvier 2019

Recettes Crêpes Blinis Pancakes-Pancakes au café et chocolat


Pancakes au café et chocolat

Préparation : 10 mn
Repos de la pâte : 30 mn
Cuisson : 30 mn
Pour 12 pancakes
Pour la garniture
25 cl de lait
250 g de chocolat noir dessert
Poivre
Pour la pâte
2 œufs
15 cl de lait
1 cuillerée à café d’extrait de café
2 cuillerées à soupe de sucre
120 g de farine
1 cuillerée à café de levure
2 cuillerées à soupe de sucre
20 g de beurre fondu pour la cuisson
1 pincée de sel
Préparation des pancakes
1. Cassez les œufs et séparez les blancs des jaunes. Versez les jaunes d’œufs dans un bol puis fouettez-les avec le lait, l’extrait de café, la farine, le sel et la levure. Ajoutez le sucre et fouettez à nouveau pour obtenir une pâte homogène.
2. Dans un bol, montez les blancs en neige, puis ajoutez-les au mélange précédent. Laissez reposer 30 minutes.
3. Graissez une poêle à pancakes avec un peu de beurre et mettez-la à chauffer. Versez une petite louche de pâte, tournez la poêle pour bien répartir la pâte sur toute sa surface. Quand le pâte est sèche sur le dessus (au bout de 2 minutes environ), retournez le pancake et laissez cuire 1 minute sur l’autre face.
4. Gardez les pancakes au chaud sous une feuille de papier d’aluminium.
Préparation de la garniture
5. Pour le coulis, mettez le lait à chauffer dans une casserole. Juste avant l’ébullition, sortez la casserole du feu et ajoutez le chocolat cassé en morceaux. Mélangez avec une cuillère en bois jusqu’à obtenir une sauce lisse. Poivrez (1 cuillerée à café rase). Mélangez.
6. Servez vos pancakes avec ce coulis de chocolat au poivre.

Une variante
Ajoutez selon vos envies des noisettes concassées, des éclats de noisettes caramélisées, de la pistache concassée…

Pour des pancakes à l’accent irlandais, préparez un coulis avec 20 cl de liqueur de Bailey’s, 5 cl de lait et 250 g de chocolat noir dessert. Et éventuellement, une petite touche de chantilly pour la déco !

Vous pouvez accompagner ces pancakes d’une boule de glace à la vanille ou au café.

mercredi 23 janvier 2019

Recettes Crêpes Blinis Pancakes-Crêpes pêche et lait de coco


Crêpes pêche et lait de coco

Préparation : 15 mn
Repos de la pâte : 30 mn
Marinade : 1 heure
Pour 8 crêpes
Pour la garniture 
1 citron vert
5 pêches jaunes
30 g de sucre en poudre
15 cl de lait de coco
2 cuillerées à soupe de noix de coco râpée
Pour la pâte
125 g de farine
2 œufs
25 cl de lait de coco
20 g de beurre fondu
20 g de beurre pour la cuisson
1 pincée de sel
Préparation des crêpes
1. Versez la farine et le sel dans un saladier et creusez un puits.
2. Dans un autre bol, fouettez les œufs, le lait de coco et le beurre fondu, puis versez dans le puits de farine. Fouettez à nouveau pour obtenir une pâte fluide.
3. Laissez reposer 30 minutes.
4. Mettez le beurre à fondre dans la poêle et versez l’excédent dans un petit bol. Essuyez le surplus avec un papier absorbant.
5. Quand la poêle est bien chaude, versez rapidement une petite louche de pâte et tournez la poêle en tous sens pour bien répartir la pâte sur toute la surface de la poêle. Dosez bien la quantité de pâte dans votre louche : si vous avez trop de pâte votre crêpe sera trop épaisse, mais si vous n’en avez pas assez, elle sera pleine de trous !
6. Quand la surface de la crêpe devient sèche et qu’elle a doré en dessous, au bout de 2 minutes environ, il est temps de la retourner. Faites-la sauter si vous êtes habile ou bien retournez-la à la spatule. Laissez cuire 1 minute sur l’autre face.
7. Déposez vos crêpes au fur et à mesure sur une assiette pour former une pile. Si vous voulez les garder au chaud, recouvrez l’assiette de papier d’aluminium et déposez l’assiette sur une casserole avec un peu d’eau à ébullition.
Préparation de la garniture
8. Récupérez un beau zeste sur le citron et coupez-le très finement avec un couteau coupant. Pressez la moitié du citron. Pelez les pêches et coupez la chair en cubes. Versez dans un saladier, ajoutez le jus et les zestes de citron vert. Saupoudrez de sucre, arrosez de lait de coco et mélangez. Couvrez et laissez au réfrigérateur pendant 1 heure.
9. Pliez vos crêpes en quatre et disposez-les dans des assiettes. Répartissez les pêches et leur sauce sur les crêpes. Saupoudrez de noix de coco râpée. C’est prêt !

Variante
Vous pouvez remplacer les pêches jaunes par 3 mangues, pour un dessert plus exotique.
Pour un dessert plus délicat, remplacez les pêches jaunes par 4 pêches blanches agrémentées de 100 g de framboises.

Un truc
Attention il s’agit bien ici de lait de coco et non de crème de coco ; la crème de coco est très sucrée et ne conviendrait pas ici.

mardi 22 janvier 2019

Recettes Crêpes Blinis Pancakes-Crêpes au Nutella


Crêpes au Nutella

Préparation : 15 mn
Repos de la pâte : 30 mn
Pour 8 crêpes
Pour la garniture 
1 petit pot de Nutella
16 crêpes dentelle
Pour la pâte
125 g de farine
2 œufs
25 cl de lait
20 g de beurre fondu
20 g de beurre pour la cuisson
1 pincée de sel
Préparation des crêpes
1. Versez la farine et le sel dans un saladier et creusez un puits.
2. Dans un autre bol, fouettez les œufs, le lait et le beurre fondu, puis versez dans le puits de farine. Fouettez à nouveau pour obtenir une pâte fluide.
3. Laissez reposer 30 minutes.
4. Mettez le beurre à fondre dans la poêle et versez l’excédent dans un petit bol. Essuyez le surplus avec un papier absorbant.
5. Quand la poêle est bien chaude, versez rapidement une petite louche de pâte et tournez la poêle en tous sens pour bien répartir la pâte sur toute la surface de la poêle. Dosez bien la quantité de pâte dans votre louche : si vous avez trop de pâte votre crêpe sera trop épaisse, mais si vous n’en avez pas assez, elle sera pleine de trous !
6. Quand la surface de la crêpe devient sèche et qu’elle a doré en dessous, au bout de 2 minutes environ, il est temps de la retourner. Faites-la sauter si vous êtes habile ou bien retournez-la à la spatule. Laissez cuire 1 minute sur l’autre face.
7. Déposez vos crêpes au fur et à mesure sur une assiette pour former une pile. Si vous voulez les garder au chaud, recouvrez l’assiette de papier d’aluminium et déposez l’assiette sur une casserole avec un peu d’eau à ébullition.
Préparation de la garniture
8. Placez le pot de Nutella 5 minutes au bain-marie ou 2 minutes dans le micro-ondes pour qu’il soit plus facile à étaler.
9. Etalez vos crêpes et tartinez-les généreusement de Nutella. Ecrasez grossièrement 2 crêpes dentelle, puis pliez les crêpes et déposez-les dans le plat de service. Dégustez sans trop tarder afin que les crêpes dentelle du centre restent bien croustillantes.

Variante
Vous pouvez remplacer les crêpes dentelle par des cigarettes russes, elles sont aussi bien croustillantes.

Un truc
Pourquoi ne pas accompagner ces crêpes d’une boule de glace vanille saupoudrée d’un peu de praliné.

dimanche 20 janvier 2019

Infos santé : Sport et Santé-Douleur et sport


Douleur et sport

Faut-il toujours écouter votre douleur ? Pouvez-vous faire du sport en ayant mal ? L’absence de douleur est-elle suffisante pour vous inviter à continuer ? Faisons le point !

 Par le docteur Stéphane CASCUA, médecin du sport.

La douleur apparaît comme un mécanisme protecteur. Elle informe votre cerveau que votre corps est en danger. Elle semble avoir été sélectionnée par l’évolution. Pourtant, l’homme préhistorique, qui n’a pas résisté à la souffrance des coups de griffes de l’ours des cavernes, a été dévoré et n’a pas pu transmettre ses gènes ! Ainsi, face à la pression évolutive, la douleur a tenu un rôle ambivalent. Dans certaines circonstances, il fallait la respecter ; dans d’autres cas, il était préférable de la négliger ! Et s’il en était de même en traumatologie du sport…



  • Attention douleur !
En jouant au foot, vous vous tordez la cheville. Vous tentez de reprendre votre entraînement. Vous avez mal ! Votre cerveau vous informe que vous aggravez vos lésions… écoutez-le, rejoignez les vestiaires ! Lors de ce match de tennis acharné, votre vieux genou vous fait souffrir et gonfle. Vous le savez, vous rabotez votre cartilage, vous accentuez votre arthrose ! Soyez raisonnable, arrêtez ! Pendant votre footing, votre douleur du tendon d’Achille ne cesse d’augmenter. Vous boitez laborieusement. Ralentissez, rentrez en marchant, c’est plus prudent ! Après plusieurs jours de randonnée, vous souffrez du pied, juste derrière les orteils. Il s’agit probablement d’une fracture de fatigue. Demain, il faudra rester au gîte ! Très souvent, il est préférable de respecter la douleur. C’est notamment le cas dans les suites immédiates d’un traumatisme, si elle s’accroît au cours de l’activité ou si elle concerne un tissu qui ne cicatrice pas, tout particulièrement le cartilage.

  • Douleur… plus d’avantages que d’inconvénients !
Vous grimpez une côte à vélo, vos cuisses chauffent. Vous poussez sur votre barre de développé-couché, vos pectoraux brûlent. Vous le savez, ce sont des douleurs d’entraînement. Elles sont souvent nécessaires à votre progression. Vous n’avez pas peur, vous continuez… un peu. Vous avez raison ! Vous pratiquez de la danse classique, vous faites des assouplissements. Souvent, ça tire et c’est douloureux dans les adducteurs… mais c’est nécessaire ! Les tissus qui tentent de s’adapter aux sollicitations vous indiquent souvent qu’ils font des efforts… De la même façon, lors de la rééducation, la douleur est fréquente… et utile. Le kinésithérapeute vous fait mal quand il frotte et étire votre tendon enraidi. STANISH, auteur d’une étude de référence sur le traitement des tendinites, conclut son article de façon provocatrice et pédagogique : « No pain, no gain » (pas de douleur, pas de bénéfice). Lorsque votre rééducateur tente de redonner de la mobilité au genou récemment opéré, il vous fait mal. Il faut absolument décoller les membranes articulaires collées sur l’os à cause du saignement de l’intervention et de l’immobilisation qui a suivi. Plus tard, lors du retour sur le terrain après blessure, un raisonnement comparable s’impose ; en reprenant les gestes spécifiques les tissus peaufinent leurs dernières adaptations et sont parfois un peu douloureux. Votre tendinite est sensible pendant l’échauffement. Qu’importe, les adhérences, les cicatrices excessives et anarchiques avec les tissus voisins, sont en train de lâcher ! Votre tendon coulisse mieux et gagne en élasticité. Si votre gêne disparaît après 5 à 10 minutes, si elle ne réapparaît pas, vous n’abîmez pas les fibres saines. Continuez ! Votre articulation de cheville, victime d’une entorse, a été immobilisée 3 semaines. Dix jours plus tard, quand vous reprenez la course, votre articulation tiraille à l’échauffement. Ne vous inquiétez pas, sous l’effet des contraintes, elle récupère la mobilité nécessaire à son bon fonctionnement. Si vous avez mal au dos de façon chronique et que votre colonne est toute raide, il faut l’assouplir et la renforcer. C’est douloureux ! MAYER l’a démontré avec des manutentionnaires en arrêt de travail depuis plus de 4 mois. Là encore, son article anglo-saxon se termine de façon accrocheuse : « Use it or Loose it » (utilisez-le ou perdez-le). À 3 mois de votre fracture du tibia, vous renouez avec la course. Votre cal osseux est sensible… cette fois patientez un peu ! Votre os n’est pas suffisamment solide… et il n’a pas besoin de s’assouplir !


  • Pas de douleur… mais danger !
Vous venez d’être opéré du genou après rupture de votre ligament croisé antérieur. Votre chirurgien l’a remplacé par un tendon prélevé sur la cuisse. Ce tissu ne reçoit ni nerf, ni vaisseau. Pourtant, il doit s’adapter à des contraintes mécaniques pour lesquelles il n’est pas conçu. Ce processus s’appelle la « ligamentisation », il se prolonge de 7 mois à 3 ans. Vous commencez à récupérer de la force vers 3 à 4 mois. S’il vous prend l’envie de courir, de pivoter, de jouer au foot ou au tennis, vous risquez fort de distendre votre nouveau ligament encore fragile. Vous abîmerez votre genou sans souffrir ! Vous avez fissuré votre ménisque externe. Votre chirurgien a enlevé le fragment cassé. Le morceau restant va progressivement se mouler sur le cartilage. Dans ce compartiment du genou, tibia et fémur sont tous les deux convexes, l’emboîtement est difficile. Il faut attendre au moins 8 semaines pour que le morceau de ménisque restant parvienne à se mouler. Là encore, si vous reprenez trop précocement le footing et les changements de direction, les cartilages frottent et s’usent rapidement. On parle de « chondrolyse rapide ». En quelques semaines vous détruisez votre genou… et le plus souvent, vous n’avez même pas mal car le cartilage n’est pas innervé !

  • Douleur ! Demandez au docteur !
En cas de blessure, même si vous ne souffrez pas, respectez les délais de reprise recommandés par votre médecin du sport ! Il connaît les spécificités de votre lésion. Si vous avez mal, l’interprétation des douleurs est délicate. Les suites à leur donner dépendent du diagnostic… notamment du tissu atteint puis du stade de traitement. Alors, quand vous avez mal, ne faites pas l’autruche ! Arrêtez-vous un moment, le temps de consulter votre médecin du sport. Vous aurez souvent la bonne surprise d’apprendre que vous pouvez continuer à faire du sport ! Cet expert vous précisera les modalités de votre pratique… vous aurez peut-être à moduler un peu vos activités mais vous pourrez continuer à bouger ! Vous ne vous blesserez pas, voire vous participerez avec plus de finesse au traitement de votre lésion !


Source SantéSportMag