dimanche 27 avril 2014

Billets-La stratégie mafieuse du coucou


La stratégie mafieuse du coucou

Coucou, c'est la mafia ! Non seulement l'oiseau parasite pond dans le nid d'autres espèces, mais en plus il sème la terreur parmi les oiseaux récalcitrants à adopter sa progéniture. Une stratégie payante.

On connaissait la fâcheuse habitude du coucou de laisser ses œufs dans des nids étrangers, aux bons soins d'autres espèces d'oiseaux qui couvent le rejeton puis s'épuisent ensuite à le nourrir. Ce que l'on sait moins, c'est que si les "parents adoptifs" ne sont pas assez coopératifs, s'ils éjectent par exemple le nouvel arrivant, l'espèce parasite use de représailles. Il fond sur le nid, et détruit tous les autres œufs.
En gros, en laissant son oeuf dans le nid, le coucou fait aux autres oiseaux une offre qu'ils ne peuvent pas refuser, explique le magazine américain Popular Science. 
Cette stratégie mafieuse n'était jusqu'à présent qu'une hypothèse scientifique, émise en 1979 par le biologiste Amotz Zahavi, de l'université de Tel Aviv. Mais des chercheurs en mathématiques viennent de modéliser ce comportement afin de voir s'ils pouvaient valider "l'hypothèse mafieuse". Pour cela, il faut que deux conditions soient remplies, expliquent-ils : que le coucou visite plusieurs fois le même nid et que les "parents adoptifs" soient capables d'apprendre. Résultat ? "Nous avons testé et confirmé l'hypothèse mafieuse", affirme dans un communiqué Maria Abou Chakra, du Max Planck Institut pour la biologie de l'Evolution, et premier auteur de l'article consacré à ces recherches, publié dans Nature.


  • Le cycle de la violence
Mais le coucou n'agit pas toujours comme un gros bras de la mafia, tempèrent les chercheurs, son comportement est cyclique. Plus il use de représailles, en détruisant toute la couvée, plus il devient vital pour les "hôtes" d'accepter sans réticence les oeufs étrangers, en misant sur le fait qu'ils pourront peut-être élever l'un de leurs petits aux côtés de l'oisillon déposé. Un statu quo s'installe alors, pendant lequel le coucou dépose sa progéniture sans plus user de menace... Jusqu'au prochain cycle, quand la famille d'accueil se rebelle.
Il n'y a pas que la menace qui soit efficace. Une étude publiée dans la revue scientifique Science suggère, elle, une autre raison qui pousse les hôtes à accepter les œufs de coucou : les jeunes imposteurs secrèteraient une substance odorante qui protègent leurs hôtes des prédateurs. C'est encore une offre à laquelle il est difficile de dire non.


 Le coucou contraint d'autres oiseaux à couver ses propres œufs, et n'hésite pas à utiliser des méthodes contraignantes si les parents adoptifs s'avèrent récalcitrants - Harry R/FlickR/CC

Source Courrier International

mardi 22 avril 2014

Billets-Thomas Piketty-Le capital au XXI° siècle


Le capitalisme se mord la queue

Les travaux de l'économiste Thomas Piketty aboutissent à un sombre constat : les inégalités entre les riches et les pauvres, qui n'en finissent pas de se creuser, compromettent l'avenir du capitalisme et finiront par détruire nos sociétés.
  
Un nouvel économiste crée aujourd'hui la polémique et il n'est pas de droite. Début avril, à la conférence de l'Institute of New Economic Thinking, à Toronto, l'ouvrage de Thomas Piketty, Le Capital au XXIe siècle, a été mentionné au moins une fois à chacune des séances auxquelles j'ai assisté. Il faut remonter aux années 1970, avec Milton Friedman, pour trouver un économiste ayant suscité un tel débat.
Comme Friedman, Piketty est un homme de son temps. Si durant les années 1970, les inquiétudes portaient sur l'inflation, aujourd'hui elles sont liées à l'émergence de ploutocrates et à leur impact sur l'économie et la société.
Piketty est convaincu que le niveau actuel des inégalités de richesse, qui est vouée à augmenter, compromet l'avenir du capitalisme. Et il le démontre. Cette thèse étonnante est très mal accueillie par ceux qui considèrent que le capitalisme et les inégalités sont interdépendants. Selon cette idée, soutenue par le centre droit, le capitalisme a besoin des inégalités de richesse pour stimuler la prise de risques et les initiatives. C'est pourquoi David Cameron et George Osborne plaident pour une diminution des droits de succession et se flattent du faible niveau d'imposition des plus-values et des sociétés, un système favorable aux entreprises.

  • Des "superpatrons", royalement rémunérés
Piketty déploie deux siècles de données pour prouver qu'ils ont tort. Le capital, dit-il, est aveugle. Quand son rendement – par l'investissement dans des secteurs allant de l'immobilier à la construction automobile – dépasse la croissance réelle des salaires et de la production, comme il l'a toujours fait, à l'exception de quelques périodes comme les années 1910-1950, le stock de capitaux augmente beaucoup plus rapidement que l'ensemble de la production. Et les inégalités de richesse explosent.
Ce processus est exacerbé par les héritages et, aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, par l'augmentation du nombre de "superpatrons", royalement rémunérés. Les inégalités de richesse en Europe et aux Etats-Unis ont déjà atteint les niveaux d'avant la Première Guerre mondiale et s'orientent vers ceux de la fin du XIXe siècle, quand la chance de pouvoir compter sur un héritage jouait un rôle crucial dans la vie économique et sociale.
Les dépenses excessives et les terribles tensions sociales qui ont marqué l'Angleterre édouardienne [1901-1910], la France de la Belle Epoque et les Etats-Unis des magnats de l'industrie semblent à jamais derrière nous, mais Piketty montre que la période comprise entre 1910 et 1950, durant laquelle ces inégalités ont été réduites, était anormale. Il a fallu une guerre et une récession pour mettre un coup d'arrêt à la dynamique des inégalités et pour mettre en place des impôts élevés sur les hauts revenus, en particulier ceux du capital, pour préserver la paix sociale. Aujourd'hui, le processus inéluctable de multiplication du capital aveugle au bénéfice de quelques privilégiés est à nouveau à l'œuvre, et qui plus est à une échelle mondiale.

  • L'explosion des investissements immobiliers
Il n'existe pratiquement pas de nouveaux entrepreneurs, hormis une ou deux start-up de la Silicon Valley, qui puissent gagner suffisamment d'argent pour concurrencer les concentrations de richesses incroyablement puissantes qui existent déjà. En ce sens, on peut dire que "le passé dévore l'avenir". Le fait que le duc de Westminster et le comte de Cadogan soient deux des hommes les plus riches de Grande-Bretagne est révélateur. Ce phénomène s'explique par les terrains que leurs familles possèdent depuis des siècles à Mayfair et à Chelsea et par les réticences à éliminer les possibilités d'évasion fiscale qui permettent à ces familles de faire prospérer leur patrimoine.
Aujourd'hui, on est davantage encouragé à devenir rentier qu'à prendre des risques. Il suffit de voir l'explosion des investissements immobiliers. Nos sociétés et nos riches n'ont pas besoin de soutenir des innovations audacieuses ni même d'investir dans la production.
D'autres forces se conjuguent contre le capitalisme. Piketty note que les riches savent très bien protéger leurs richesses de l'impôt et que la proportion du fardeau fiscal supporté par les ménages à revenus moyens a progressivement augmenté. En Grande-Bretagne, 1 % des ménages les plus riches paient effectivement un tiers de la totalité de l'impôt sur les revenus, mais ce dernier ne représente que 25 % des revenus du Trésor public : 45 % viennent de la TVA, de droits d'accises et de diverses contributions sociales payées par l'ensemble de la population.

  • Les sociétés s'efforcent de se protéger
De ce fait, la charge de dépenses publiques comme l'éducation, la santé et le logement incombe de plus en plus aux contribuables moyens, qui n'ont pas les ressources financières nécessaires pour les payer. Et c'est ainsi que les inégalités de richesse deviennent un facteur de dégradation des services publics et des conditions de travail.

L'enseignement que l'on peut tirer du passé est que les sociétés s'efforcent de se protéger en fermant leurs frontières ou en menant des révolutions, voire des guerres. Les solutions – un taux d'imposition sur les revenus allant jusqu'à 80 %, des droits de succession réels, un impôt sur la propriété adéquat et une taxe mondiale sur les richesses – sont actuellement inconcevables. Mais comme l'écrit Piketty, la tâche des économistes est de les rendre plus concevables. Et c'est ce que fait Le Capital au XXIe siècle.

Billets-Libérons-nous


Libérons-nous 

Stéphane Hessel préconisait naguère aux autres de s’indigner, qui est le verbe de l’impuissance par excellence et qui va de pair avec revendiquer des « droits à » et tendre la main pour recevoir. Dans un court essai, Pascal Salin propose aux Français un autre impératif, qui est une invite à l’action libre et à la responsabilité respectueuse des autres, auxquelles il s’associe : « Libérons-nous! », et sans lesquelles il n’est pas de dignité humaine.

Se libérer de quoi ? De l’État, qui maintient les femmes et les hommes en esclavage, puisqu’il prend les décisions à leur place en matière de santé, d’éducation, de logement ou, même, de culture, alors qu’ils savent pourtant mieux que lui ce qui convient à leurs besoins. En intervenant dans le domaine de la santé, notamment en limitant la libre rémunération des médecins, l’État raréfie pour eux l’offre de soins médicaux. En intervenant dans le domaine de l’éducation, l’État leur enlève une responsabilité qu’ils ont pourtant exercée pour faire naître leurs enfants. En intervenant dans le domaine du logement pour limiter les loyers, l’État raréfie les logements disponibles pour eux et provoque l’augmentation de leurs loyers. Sans les prélèvements obligatoires, impôts, taxes, cotisations diverses et variées, qui donnent du pouvoir aux hommes de l’État, qui dépensent cet argent sans compter, ils jouiraient d’un pouvoir d’achat qu’ils ne peuvent même plus imaginer. Or tout cet argent qui leur est confisqué est le fruit de leurs efforts et ils devraient pouvoir en disposer eux-mêmes à leur guise.

Comme le rappelle Pascal Salin : « Les êtres humains sont des êtres sociaux, c’est-à-dire que leur vie nécessite l’existence de liens avec d’autres humains ; ce qui n’empêche pas chacun d’avoir sa personnalité. » La civilisation est faite de ces liens tissés entre eux sous forme d’accords aux multiples modalités, que l’on peut appeler contrats même s’ils ne sont pas écrits : « Le contrat met en relation deux personnes (ou deux ensembles de personnes, par exemple des entreprises) et si un contrat existe, c’est évidemment parce qu’il est satisfaisant pour les deux co-contractants. Si le contrat est librement décidé et signé, il rend impossible toute domination des uns par les autres : les contractants partagent la même liberté et la même dignité. »

Parmi ces contrats il en est un, le contrat de travail, sur lequel Pascal Salin rappelle quelques vérités oubliées : « Dans une société d’hommes et de femmes libres, chacun entre librement dans un contrat et en sort librement sans que l’un des deux partenaires puisse imposer sa volonté à l’autre. Si un salarié n’est pas satisfait de son employeur, il peut le quitter et en trouver un autre ; symétriquement, si un employeur n’est pas satisfait de son salarié, il devrait pouvoir en chercher un autre. » La société française n’est justement pas une société d’hommes et de femmes libres. En effet un des co-contractants, l’employeur, est présenté comme un exploiteur, dont il faut protéger l’autre co-contractant, l’employé, rompant ainsi la symétrie entre eux. Comment protéger l’employé contre son employeur ? En rendant son licenciement plus difficile. Seulement, « les employeurs potentiels hésitent davantage à embaucher des salariés s’ils savent qu’ils auront du mal à les licencier s’ils ne donnent pas satisfaction ou si les circonstances nécessitent une réduction des effectifs. » C’est pourquoi, « la vraie politique d’emploi ne consiste pas à rendre les licenciements difficiles, mais à supprimer les obstacles à l’emploi [...], tous ces obstacles qui rendent difficile pour les salariés de trouver un emploi ou d’en retrouver un lorsqu’ils ont perdu celui qu’ils avaient. »


Comment retrouver la croissance et le faible chômage que la France a connus au cours des années 1950 à 1970 ? En tournant le dos à tout ce qui la paralyse depuis le début des années 1980. Comment ?

  • En permettant à l’innovation de jouer son rôle dans la création de richesses, c’est-à-dire en ne décourageant pas l’entrepreneur-innovateur : « Pour qu’un entrepreneur mette en œuvre une innovation et accepte de prendre en charge les risques correspondants, il faut qu’il puisse espérer une rémunération satisfaisante dans le cas où ses projets réussissent. » Autrement dit, en ne confisquant pas totalement, ou presque, son profit s’il en dégage un, et en permettant la constitution d’épargne pour la financer.

  • En renonçant à croire que « l’économie [est] une vaste machine dont un gouvernement pourrait manipuler les leviers à sa guise » : « [L'activité économique] est le résultat d’une quantité innombrable de décisions – grandes ou petites – prises par un grand nombre d’individus qui exercent leur raison pour s’adapter au mieux à leur environnement et pour améliorer leur sort. La croissance est donc le résultat non intentionnel, et largement imprévisible, de toutes ces décisions humaines, en particulier celles qui sont prises par les entrepreneurs-innovateurs. » Autrement dit, en réduisant massivement et rapidement prélèvements obligatoires et réglementations (telles que le salaire minimum, qui conduit à ne pas embaucher du tout des employés à la productivité trop faible, et qui donc « n’est rien d’autre qu’une machine à exclure »).

  • En réduisant rapidement et profondément la fiscalité qui détruit emploi et production : « Le recours à l’impôt pour financer des dépenses publiques conduit à une double destruction de richesses par rapport à ce qui se passerait si l’on avait plutôt recours au contrat libre et à la liberté d’entreprendre. En effet, ceux qui paient l’impôt sont incités à faire moins d’efforts – de travail, d’innovation, d’épargne ou d’investissement. Mais, par ailleurs, ceux qui bénéficient des largesses étatiques sont aussi moins incités à faire des efforts puisqu’ils peuvent obtenir gratuitement – ou presque gratuitement – ce qu’ils désirent et qu’ils ne pourraient normalement obtenir que par le travail et l’effort. » Autrement dit, en ne démotivant pas, par la confiscation de leurs richesses matérielles, ceux qui pourraient exercer librement leurs talents, et en ne portant pas atteinte par là même à leurs objectifs immatériels (de nature spirituelle, artistique, affective ou purement intellectuelle).

Pour vaincre le chômage on n’a pas tout essayé, comme le prétendent hommes politiques de droite ou de gauche, qui voudraient que l’on aille plus loin dans l’interventionnisme étatique, les réglementations et les dépenses publiques : « On n’a pas essayé la seule recette qui conduirait au succès, celle qui consiste à dire aux hommes de l’État: « libérez-nous! Libérez-nous de vos réglementations étouffantes! Libérez-nous de vos impôts écrasants! Laissez-nous faire et vous verrez ce que nous sommes capables de faire ». »


lundi 21 avril 2014

Billets-Les 20 sites les plus consultés par les Français au travail


Les 20 sites les plus consultés par les Français au travail

D’après une étude d’Olfeo, un employé français passe en moyenne 1h48 par jour à surfer sur Internet sur son lieu de travail, soit 11 minutes de plus qu’en 2012. Sur cette durée, un peu plus de la moitié y est consacrée à titre personnel.

Olfeo a calculé que ce temps représente 14% de productivité en moins pour les entreprises françaises, et elle en impute la responsabilité au Wifi dont le libre accès a été multiplié par deux dans les entreprises françaises. C’est ainsi que la plupart des employés français se laissent facilement tenter par un coup d’œil rapide sur les réseaux sociaux ou sur les sites de shopping en ligne avec leur smartphone et cela plusieurs fois par jour, tandis que la fréquentation des sites d’information a en revanche chuté de 6%.

Les 20 sites les plus visités par les employés français :
  1. Facebook
  2. Youtube
  3. Wikipédia
  4. Le Bon Coin
  5. Yahoo actu
  6. Windows live MSN
  7. Comment ça marche
  8. Amazon
  9. Blogger
  10. L’internaute
  11. Dailymotion
  12. Overblog
  13. LinkedIn
  14. Au Féminin
  15. Pages Jaunes
  16. France Télévision
  17. Le Figaro
  18. Programme
  19. Allo Ciné
  20. Française des jeux

Combien de temps faudrait-il pour atteindre Kepler 186f ?


Combien de temps faudrait-il pour atteindre Kepler 186f ? 

Kepler 186-F est située en "zone habitable", mais à quelle distance se trouve son système solaire ?

Une équipe internationale d'astronomes vient de découvrir Kepler 186-F, une exoplanète située en zone habitable. La découverte est de taille, la distance nous séparant d'elle l'est tout autant : 500 années-lumière, soit 9.640 milliards de km. Avec les technologies actuelles, combien faudrait-il de temps pour rejoindre cette cousine de la Terre ? Réponse en infographie.

dimanche 20 avril 2014

Billets-Hollande et le PS


Hollande et le PS

Encore un petit effort François … et ton quinquennat sera un succès !
Oui, François, tu es sur la bonne voie ! Encore un petit effort ! L’œuvre de ta vie est sur le point de s’accomplir …

Tu vas détruire le parti socialiste, ton quinquennat aura au moins servi à ça !
Déjà, quand tu étais à la tête du PS, et cela dura 11 ans, de 1997 à 2008, tu portais déjà ce projet fou de le détruire. Sinon, comment comprendre ton inaction à la tête de ce parti. Après la défaite de Lionel Jospin à la présidentielle de 2002, où le PS avait été privé de second tour, une refondation du parti socialiste et plus généralement du « socialisme à la française » s’imposait. Et, toi, conscient de ton destin de fossoyeur de ton propre parti, tu n’as absolument rien fait. Tu as endormi ce parti. Tu t’es contenté de gagner les élections en regardant la droite décevoir les Français.


Ton destin reçut un coup de pouce décisif, avec l’intempérance sexuelle de DSK qui t’offrit la présidence de la République sur un plateau. Avec les compétences que tu as montrées en pilotant le cabinet noir de l’Elysée qui tente, par tous les moyens, de rendre Nicolas Sarkozy inéligible, on pourrait aujourd’hui se demander si ce cabinet n’était déjà pas à l’œuvre en mai 2011 dans les couloirs de l’hôtel Sofitel de New York …
Mais aujourd’hui, ton destin s’accomplit au grand jour. Tu as atteint ton bâton de maréchal et tu es passé de l’immobilisme à l’action offensive contre le parti socialiste. Tu tiens ta vengeance contre tes « amis » du PS qui ne t’ont jamais apprécié :
  • C’est Fabius qui avait déclaré : « Vous imaginez François Hollande président ? On rêve ! ».
  • Martine Aubry ne te ménageait pas non plus : « Arrêtez de dire qu’il travaille. François n’a jamais travaillé. Il ne fout rien».
  • Jusqu’à ta compagne de 20 ans qui disait de toi : « Le point faible de FH, c’est l’inaction. Les français peuvent-ils citer une seule chose qu’il aurait réalisée en 30 ans de vie politique ? »
  • Montebourg t’avait donné le coup de grâce : « Je n’ai pas oublié que François Hollande a immobilisé le Parti pendant 10 ans. Comment peut-il aspirer à diriger la France ? »
Ce qui est beau dans ta démarche, c’est cet effacement de ta personne, je dirais même ce sacrifice, que tu t’es imposé pour arriver à tes fins. Car pour tuer le PS, tu as décidé de te saborder !
C’est ainsi que tu as décidé :
  • de jouer au président normal,
  • de faire semblant, au début, de faire de l’anti-Sarkozy pour finir deux ans plus tard par le copier,
  • de compléter, à la tête de l’état, ton inexpérience de « jamais ministre », par le manque de charisme de ton premier ministre,
  • de nommer une équipe de branquignols et de bras cassés en guise de gouvernement,
  • de glisser aussi quelques personnalités bien sectaires pour pimenter la chose et provoquer les Français …

Et tout cela dans un seul but : échouer et entraîner le PS dans ta chute ! Trop fort !
Ta première victoire dans ton dessein caché fut la raclée du PS aux municipales qui a dépassé tes espoirs les plus fous. Pour occuper les médias, tu as jeté le « citron-Ayrault » déjà pressé, voire essoré pour le remplacer par Manuel Valls. Ce fut un coup de maître. Un coup double : non seulement tu allais désormais pouvoir te cacher derrière Valls pour préparer tranquillement la suite mais en plus tu allais tuer l’avenir de Valls de façon à ce que le PS n’ait plus de bouée de sauvetage en 2017. Trop génial !

Car tu as toujours un coup d’avance ! Les médias et le PS se concentrent sur Valls, les premiers pour l’adorer les seconds pour déjà le haïr et toi tu es déjà en train de préparer le désastre des européennes. Pour ce faire, tu as commencé à abattre l’un de tes atouts majeurs : ta république exemplaire, attrape-nigauds sur laquelle tu as été élu et dont tu viens de décider l’implosion. En à peine 3 semaines, tu viens de planter pas moins de 5 banderilles dans ton concept vide de république exemplaire :
  • Alors que « Toi candidat, tu » promettais que « Toi président » ne serait pas le chef de la majorité, tu as exfiltré toi-même Harlem désir de la tête du PS,
  • Alors que  »Toi candidat, tu » promettais de ne pas t’entourer de personnes condamnées par la justice, tu as gardé tes deux compères condamnés (Désir et Cambadélis) à des postes importants dont un ou gouvernement,
  • Alors que tu promettais que tu serais, à chaque instant, exemplaire, tu viens d’organiser un magistral et inédit chassé-croisé entre Jean-Pierre Jouyet et Pierre-René Lemas entre le secrétariat de l’Elysée et la Caisse des dépôts. Jouyet va t-il manquer à la Caisse des Dépôts, Lemas y fera t-il l’affaire … Ça n’est pas ton problème !
  • Tu as même recasé Dominique Voynet à l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) rendant même furieux Claude Bartolone !.
Mais ton coup de génie fut de sacrifier ton principal conseiller, Aquilino Morelle, sur l’autel de ton funeste projet. Christiane Taubira t’avait précédemment transmis un dossier sur lui, sur un possible conflit d’intérêt dont il se serait  rendu coupable. Aquilino Morelle est ton conseiller mais aussi un ami personnel de Manuel Valls, d’origine espagnol comme lui.  C’est ce dernier point qui a fait germer, dans ton cerveau retors,  l’idée de savonner la planche de ton premier ministre en jetant Morelle à la vindicte publique. Il t’a suffi de transmettre le dossier Morelle à … ton bon ami Edwy Plenel de Mediapart!

Mais tu as dû juger que le conflit d’intérêt était une notion trop complexe pour que le « petit peuple » de France s’émeuve, et tu as ajouté au dossier Taubira, quelques renseignements sulfureux et croustillants qui feraient, à coup sûr, le succès médiatique du sacrifice de Morelle. Tu as glissé dans l’oreille d’Edwy que ton conseiller privatisait régulièrement un salon de l’hôtel Marigny pour y faire cirer ses chaussures de luxe à plusieurs SMICs par paire, qu’il avait un faible pour les grands crus de la cave de l’Elysée et que ses deux voitures de fonction avec chauffeurs servaient souvent à aller chercher ses enfants à l’école.


Et que dire du merveilleux timing de l’opération ? Deux jours après que Manuel Valls ait annoncé le gel des retraites de 13 millions de Français, dire à ces même Français que sous les ors de la république, un copain de Valls déguste du château Petrus en regardant ses « Berluti » ou ses « Weston » se faire reluire, c’était du grand art !
Avec la réussite médiatique que l’on connait …
Le feuilleton va se poursuivre jusqu’à l’explosion en vol du parti socialiste.

mardi 15 avril 2014

Billets-Obésité législative


Obésité législative

La France dispose d’un nombre d’atouts extraordinaires : une géographie bénie des dieux, une démographie dynamique, un réseau de transports exceptionnels, un tissu de petites entreprises innovantes et de multinationales rayonnantes, des ingénieurs que le monde nous envie… Notre pays aurait tout aujourd’hui pour être un mastodonte de l’économie mondiale, un concentré fulgurant d’innovation, le chef de file de la nouvelle révolution industrielle, une terre d’accueil pour tous les entrepreneurs du monde, une Silicon Valley géante, « the place to be ». Pourtant, la France attire de moins en moins les investisseurs. Les nouveaux Investissements Directs Etrangers (IDE) en France ont par exemple chuté de 77% en 2013, pour tomber à 5,7 milliards de dollars. C’est beaucoup moins, bien sûr, que les États-Unis (159 milliards) ou la Chine (127 milliards). Mais c’est surtout moins que le Royaume-Uni (53 milliards), l’Allemagne (32,2 milliards) et même l’Espagne (37,1 milliards) ! Qu’est-ce qui fait donc cruellement défaut ?
Parmi les raisons qui sont communément évoquées, il y a la complexité de notre système administratif et fiscal. Le Journal officiel est ainsi passé de quinze mille à vingt-trois mille pages annuelles en vingt ans, et le recueil des lois de l’Assemblée de 433 pages en 1973 à près de 4 000 pages en 2004. Le code général des impôts, lui, fait 3 450 pages… Quant au code du travail, il pèse un kilo et demi et s’alourdit de l’équivalent d’une page tous les 3 jours !

Montesquieu écrivait dans De l’esprit des Lois que « les lois inutiles affaiblissent les nécessaires ». Notre littérature juridique est devenue obèse. Nous devons aujourd’hui avoir le courage de clarifier ces textes, et même, pour certains, les repenser en profondeur. En particulier, le temps est venu de réécrire un nouveau code du travail et un nouveau code général des impôts parce que ces deux pavés indigestes font obstacle à l’esprit d’entreprise. Oui, réécrire. Car toute modification à la marge les rend à chaque fois plus illisibles et incompréhensibles. Et pour entreprendre, innover, accepter de prendre des risques, il nous faut des règles du jeu claires et limpides.
D’ailleurs, s’agissant du code du travail, il nous faudra en finir avec ces effets de seuil qui brident la croissance et l’emploi.


En France, un grand nombre d’obligations légales (sociales, fiscales ou réglementaires) viennent s’ajouter lorsque l’entreprise atteint certains seuils (le plus souvent 10, 20, 50 ou 250 salariés). Un exemple : à partir de 50 salariés, une entreprise est tenue de créer un comité d’entreprise. Une contrainte coûteuse, qui fait que de nombreuses entreprises demeurent cantonnées durablement à un effectif de 49 salariés, alors que leur développement aurait dû les conduire à recruter davantage. Les chiffres de l’Insee parlent d’eux-mêmes : il y a en France environ 1 200 entreprises de 47 salariés, 1400 entreprises de 48 salariés, 1600 entreprises de 49 salariés, et… 600 entreprises de 50 salariés.

Il y aurait pourtant une façon simple d’éliminer de tels effets de seuil : il s’agirait de conditionner les contraintes sociales, fiscales et administratives non pas à l’effectif de l’entreprise, mais à sa marge brute (c’est-à-dire à la différence entre le chiffre d’affaires et le coût de revient des biens ou des services) ! Contrairement à la démarche légitime qui consiste à refuser de recruter pour ne pas atteindre certains seuils, aucun chef d’entreprise ne limitera son chiffre d’affaires pour éviter certaines obligations ! Les contraintes seront ainsi intimement liées aux performances de l’entreprise, et seront donc de ce fait plus acceptables !

L’heure est grave. Notre pays traverse une crise extra-ordinaire. L’opinion publique est en émois. Des ferments révolutionnaires sont à l’œuvre. Pourtant, le sursaut tient à peu de choses. C’est la raison pour laquelle le temps est venu d’en finir avec tous ces verrous qui nous brident et empêchent notre pays de rayonner. Il est encore possible de reprendre notre destin en main et de faire de la France un paradis pour vivre et entreprendre. Mais nous devons faire vite : le temps joue contre nous.

lundi 14 avril 2014

Billets-L’absurdité des nominations ministérielles


L’absurdité des nominations ministérielles

Avec la nomination des ministres du gouvernement Valls, nous avons une fois de plus assisté à l’absurdité des nominations à la française, absurdité qui explique en grande partie pourquoi les gouvernements sont incapables de redresser le pays dans presque tous les domaines.
Les ministres ou secrétaires d’État n’ont pas été nommés en fonction de leur compétence ou de leur connaissance des dossiers mais d’« équilibres » politiques dont les composants sont seulement connus du président de la République et de son Premier ministre. Comme Harlem Désir, nommé au secrétariat des Affaires Européennes.
C’est généralement la valse, en se servant des députés de l’Assemblée nationale et parfois du Sénat comme d’une réserve d’où l’on tire un lapin en dernière minute pour le grand bonheur de l’intéressé.
Ces ministres ou secrétaires d’État nommés dans ces conditions ont-ils un programme ? Savent-ils ce qu’il faut faire dans l’intérêt du pays pour prendre des décisions mûrement réfléchies ? Quelle probabilité a-t-on que ce ne soient pas seulement les décisions qui sont préparées par l’administration qui vont prévaloir ?
Jusqu’il y a quelques années, on pouvait croire que ces décisions préparées par l’Administration étaient dictées par l’intérêt général. Mais l’on sait depuis plus d’une trentaine d’années, notamment par des travaux de prix Nobel, que l’Administration est un acteur comme les autres qui a ses propres intérêts et les fait passer devant ce fameux intérêt général dont on la gratifie.
Dans ce contexte volatil, les chances de la Société dite Civile de faire passer des mesures sont à peu près nulles.

Il est d’ailleurs connu dans les ministères que dès qu’un ministre arrive, il faut le noyer par un emploi du temps qui l’empêche de réfléchir et que ceci permet de lui faire signer les mesures que les précédents ministres ont laissé dans les tiroirs et auxquelles tient l’Administration.
Ce processus d’auto promotion est renforcé par le fait que les chargés de mission placés auprès du ministre sont presque tous des fonctionnaires qui sont peu susceptibles de contrer leurs collègues. En effet, dans le budget d’un ministre, un fonctionnaire, pris comme chargé de mission, ne pèse que par sa prime de cabinet ; il reste à la charge, pour traitement et retraite, de son administration qui le met à disposition. Alors que pour un chargé de mission issu du privé, le ministre doit payer l’entièreté des salaires, charges sociales, et, bien sûr, prime de cabinet.
Quel contraste avec le système britannique du « shadow cabinet » où les futurs ministres non seulement sont plongés des années à l’avance dans les dossiers de leur futur ministère mais sont tenus au courant de ces dossiers au fur et à mesure.
Ceci permet entre autres aux acteurs de la société civile de convaincre à l’avance ces futurs ministres de leurs thèses, d’apporter des preuves, de préparer des textes.  Il ne faut donc pas être surpris de constater qu’il y a au Royaume-Uni entre deux et trois fois moins de fonctionnaires dans les services du Treasury que dans les services équivalents de la DGFIP de Bercy, pour ne pas parler des plus de 10.000 fonctionnaires de la Banque de France à comparer aux moins de 3.000 de la Banque d’Angleterre pour à peu près les mêmes fonctions.


Infographies-Le travail des enfants



Le travail des enfants

Le nombre de travailleurs mineurs recule depuis quinze ans. Mais ils restent nombreux dans les usines.

Mónica Serrano. Cette graphiste espagnole, diplômée de l’Institut d’arts visuels de Jerez, a travaillé pour plusieurs quotidiens espagnols et pour le Corriere della Sera, en Italie. Elle enseigne depuis 2012 à l’Institut européen du design à Madrid.
Cette infographie, publiée le 12 janvier dans le quotidien italien, dresse un état des lieux du travail des enfants. Selon le dernier rapport de l’Unicef, c’est la Somalie qui détient le record : la moitié des enfants y travaillent ; les filles plus que les garçons.


Source Courrier International

samedi 12 avril 2014

Billets-Le Père Ubu à l’Élysée


Le Père Ubu à l’Élysée

Je m’apprêtais à écrire un article vengeur contre le mépris qu’affiche Hollande pour les Français. Et je tombe sur dernier édito de Philippe Tesson paru dans le Point. Ne pouvant lutter avec lui, je dépose les armes et reproduis ici son texte savoureux :

  • Le Père Ubu à l’Élysée
Pour se débarrasser des gêneurs, le Père Ubu les envoyait à la trappe.
Lui, Hollande, il en fait des ministres, selon le principe d’incompétence.
Il y a longtemps que le crédit politique du président de la République est entamé. Le peuple vient de le lui faire savoir par son vote récent. C’est son crédit moral qui vient aujourd’hui de prendre un coup sérieux. L’entrée de Harlem Désir au gouvernement est en effet, outre une maladresse politique, un geste d’une incroyable muflerie. Vis-à-vis de la République, du peuple, du Parti socialiste et de l’Europe. C’est beaucoup.

Il promettait une République exemplaire. Nous n’avons cessé de dire que son grand air de la vertu n’était qu’un leurre. Il nous donne spectaculairement raison. Il fait mieux que tous ses prédécesseurs, en tête desquels son contre-modèle favori, Nicolas Sarkozy, qu’il a abreuvé d’insultes pour conquérir le pouvoir et qui fait désormais figure d’enfant de chœur. Avec un splendide cynisme, il commet un abus de pouvoir digne des tyranneaux d’opérette.

  • « Bouffres »
À la Ubu. Pire que Ubu. Pour se débarrasser des gêneurs, le Père Ubu les envoyait à la trappe. Lui, Hollande, il en fait des ministres, selon le principe d’incompétence. C’est dire la considération qu’il porte à ceux qu’il vient de nommer. Comment se débarrasser de Harlem Désir ? Mettons-le à l’Europe, cornegidouille. Le troisième en deux ans ! L’Europe, ma poubelle, elle n’est bonne qu’à ça !
Moi, président de la République? Non, moi, Hollande. Moi seul. « De par ma chandelle verte, me voici roi dans ce pays. » Roi de droit divin, monarque absolu d’un peuple de « bouffres ». « Bouffres », les militants cocus de mon parti majoritaire, « bouffres », mes électeurs, « bouffre », la démocratie.
Et « merdre ».

PS : les citations entre guillemets sont d’Alfred Jarry.



mercredi 9 avril 2014

Billets-Le photoreporter face à la douleur des autres


Le photoreporter face à la douleur des autres

Photographes, reporters vidéo, comment font-ils leur métier lorsqu’ils reçoivent en pleine figure la douleur des autres ? Comment réagissent-ils face aux cris insoutenables d’un gamin entouré de cadavres après un séisme, un accident, un bombardement ? Restent-ils de marbre devant la rage d’un père qui serre dans ses bras sa fillette morte ? Ou face au désespoir de ces hommes, de ces femmes qui ont perdu un proche dans l’avion de Malaysia Airlines, et qui hurlent leur douleur dans un hall d’aéroport ? Se retiennent-ils parfois de prendre la photo ? Et que pensent-ils des accusations, régulièrement proférées, qui font d’eux des « vautours » qui vivent de la misère du monde ?
  

Les proches des passagers du vol MH370 laissent éclater leur douleur, le 24 mars 2014 dans un hôtel de Pékin, en apprenant que l'avion s'est abîmé dans l'océan Indien (AFP / Goh Chai Hin)

« J’essaie de faire preuve de compassion, d’une certaine retenue, et de ne pas shooter de trop près, en utilisant un objectif un peu plus long que ce qui est nécessaire », explique Mark Ralston, photographe de l’AFP à Pékin, qui a couvert l’attente désespérée des parents des passagers du mystérieux vol de Malaysia Airlines.
La douleur des proches des victimes du vol MH370 se mue parfois en agressivité contre les journalistes. Si vous ne parvenez pas à visualiser correctement cette vidéo, cliquez ici.

« Mais parfois c’est difficile, ici en Chine, parce que de nombreux photographes utilisent le grand angle et vous bloquent l’accès… Les catastrophes donnent toujours des images fortes et le sujet ne perdra rien de son intensité, qu’on soit à un mètre ou à vingt, alors en ce qui me concerne, je préfère rester un peu en arrière ».

« Les photographes débutants ont tendance à se précipiter sur la scène qui les intéresse, par manque de sang-froid, et ça incite les autres à faire pareil… Tout ça n’est pas bon, et donne une mauvaise image des médias, qui sont perçus comme des gens qui n’ont pas de sensibilité, qui sont indifférents à la douleur des victimes… »

« L’émotion, oui bien sûr qu’elle est là ! », explique Nicolas Asfouri, photographe de l’AFP à Bangkok. « Mais ça dépend beaucoup de quel type de reportage on parle. Entre une femme qui pleure la perte d’un proche dans un accident d’avion et une guerre, le ressenti est différent, pour nous photographes.


Le père d'une fillette de 8 ans tuée dans un bombardement de l'armée syrienne pleure dans un hôpital d'Alep, où est également soigné son fils (à l'arrière-plan), le 31 octobre 2012 (AFP / Javier Manzano)

« En situation de guerre, en tant que photographe, tu sais que tu risques gros, que tu risques ta vie, et si tu tombes sur un moment fort, exceptionnel, tu as la responsabilité de témoigner, de montrer en quoi la guerre est mauvaise. Et tu te concentres pour capter le moment le plus juste, le plus pertinent. Tu es concentré, et pour ce qui est de l’émotion, elle vient plus tard. Si je me laisse aller à l’émotion, je ne prends pas la photo… »

  • L'émotion vient après
Le reporter vidéo Djilali Belaïd a tourné en juillet 2012 un reportage exclusif avec les rebelles syriens qui tenaient alors le Krak des Chevaliers. Et pour lui aussi, et fort heureusement pour sa sécurité et le bon déroulement de son expédition, l’émotion est venue après…
« La forteresse était tenue par la rébellion mais assiégée par les forces pro-régime. En bas, il y a l’autoroute stratégique Damas-Homs. Les pro-régime devaient absolument prendre cette position. Ils bombardaient toutes les nuits, et avaient pris Azzara, une ville près du château.

« Vers 4 heures du matin, on a été réveillés par une tentative d’infiltration des combattants pro-régime. Je suis parti avec les rebelles. Ça tirait partout. On a été canardés par des snipers. J’étais derrière ma caméra, je filmais tout. On nous tirait dessus. Et là, j’ai vu les premiers morts, tués par les snipers. »
« Trois hommes transportaient un corps. Un de ces hommes était le frère de celui qui venait d’être tué. Il était comme fou de douleur et de rage. Il a crié vers moi : "Qui tu es ? Qu’est-ce que tu filmes ?" Il était dingue de douleur, de la douleur de voir son frère étendu, mort sur la route. Il a pointé son fusil d’assaut sur moi et a tiré. Son chargeur était vide. Alors il s’est mis à chercher fébrilement partout autour de lui un nouveau chargeur… »

  • Travailler en "pilotage automatique"
« Les autres ont fini par le maîtriser et l’ont emmené… Un peu plus tard, ils se sont excusés auprès de moi ».
« En quelques minutes, j’avais échappé deux fois à la mort. Avec les snipers, et face à ce rebelle dont l’arme n’avait plus de balles… »
« J’ai tout filmé, je n’ai pensé à rien, sur le moment. J’étais en pilotage automatique. La caméra a agi sur moi comme un écran de protection. »


Funérailles à Port-au-Prince de l'archevêque Joseph Serge Miot, tué dans le séisme en Haïti en 2010 (AFP / Roberto Schmidt)

« C’est plus tard, lorsqu’on se refait le film, qu’on commence à se poser des questions sur ce qu’on vient de faire, de se demander par exemple : "Avais-tu le droit de le filmer ce rebelle, alors qu’il était dans cette douleur, dans cette situation de vulnérabilité ?" »
« Plus tard, avec mes collègues, on a pensé qu’il fallait montrer ça : que la guerre civile, c’était ça. J’insiste sur le mot guerre civile, car là-bas, ce sont bien des voisins qui s’entretuent. »
« Sans cette distance créée par la caméra, on serait submergé par la peur et la panique. La caméra est super importante. C’est comme si elle avait remplacé mon cerveau. Il y a, derrière la caméra, un mécanisme qui se met en marche, qui t’empêche de paniquer. Et de réfléchir à des questions telles que : "Doit-on filmer ou ne doit-on pas filmer ?" »
« Sur le coup, on ne se pose pas ces questions éthiques ou morales… Et en même temps, la caméra nous évite aussi la peur physique, la panique », ajoute Djilali.


Jennifer Pulga maintient en vie son mari grièvement blessé lors du passage du typhon Haiyan en lui insufflant manuellement de l'air dans les poumons dans un hôpital de Tacloban, aux Philippines, le 15 novembre 2013 (AFP / Philippe Lopez)

La caméra, ou l’appareil photo, qui mettent de la distance entre le journaliste et la scène qu’il est en train de couvrir, telle est également l’expérience du photographe Philippe Lopez (AFP Hong Kong), auteur de poignants reportages sur les victimes de Haiyan, le puissant typhon qui a ravagé les Philippines en novembre 2013.
« On a tous un ressenti différent, mais je crois qu’il y a une constante, chez les photographes : entre le sujet et lui, il y a l’appareil photo qui produit un effet de tampon, de buffer, ça rajoute de la distance entre le photographe et son sujet. »

  • L'appareil: un écran de protection
Philippe Lopez a ému les réseaux sociaux avec un reportage sur une jeune femme qui a tenté, en vain, de sauver son mari grièvement blessé par la chute d’un arbre, lors du cyclone, en lui insufflant de l’air, des heures durant, à l’aide d’une pompe en plastique souple.
« Quand je suis arrivé sur place, je m’y suis pris à deux fois. Je suis entré dans la salle une première fois avec un collègue et on a essayé de bien comprendre ce qui se passait. Il n’y avait pas d’électricité. J’ai dû me débrouiller avec le contre-jour, me concentrer, et en faisant ce travail, du fait de cette concentration, je n’ai pas pensé à autre chose qu’à ce que je faisais, techniquement. »
« Voilà, c’est l’effet que produit l’appareil, l’effet d’écran qu’il provoque entre le sujet et le photographe, et qui empêche celui-ci de réfléchir, de se poser d’autres questions. »
« La jeune femme pleurait, elle était pleine de douleur, surtout quand elle a soulevé le pansement sur le visage de son mari. Mais j’étais concentré sur la nécessité de faire une image lisible. »


Une femme montre la carte d'identité de sa fille tuée dans un séisme à Beichan, au Sichuan, en mai 2008 (AFP / Mark Ralston)

« Généralement, dans ce genre de situation, on demande l’autorisation de travailler, par un geste, ou en portant l’appareil sur son visage. »
« Les questions, morales, déontologiques, on se les pose après. Avait-on le droit de prendre cette photo ? Je me suis souvent posé ce genre de questions… »
« Et il y a des photos que je n’ai pas faites, dans certaines situations… mais après, on regrette. »

  • "C’est plus tard qu’on déguste"
« Cette jeune femme qui actionnait cette pompe, c’était une photo de désespoir, et ça aussi, il fallait le montrer, il fallait témoigner… »
« Les reporters qui ont du métier ont chacun leur manière bien à eux de composer avec l’émotion, avec la douleur des victimes. Et on apprend petit à petit à continuer à travailler, dans les situations les plus difficiles, mais c’est plus tard qu’on déguste : quand on édite les photos, qu’on en découvre les détails, et l’horreur de certaines images qui sont dans la boîte », ajoute Mak Ralston.

« C’est pour moi le moment le plus difficile, et j’ai pour habitude de ne pas trop regarder mes photos de catastrophes, une fois qu’elles sont diffusées. Ça implique aussi de ne pas les proposer pour tenter de décrocher un prix… mais certains photographes n’ont pas ces états d’âme, et les présentent aux jurys, parce que ce sont précisément ces photos qui scorent ! »


Une femme pleure au milieu des ruines de Rikuzentakata,dévastée par le tsunami au Japon en mars 2011 (AFP / Nicholas Kamm)

Alors, les journalistes sont-ils des « rapaces » des « charognards », comme on l’entend parfois ?
Sans doute pas, mais tous se posent la question, à un moment ou un autre de leur carrière, et particulièrement dans ces situations où éclate la douleur des victimes.
Mark Ralston: « J’ai vu des personnes dans la souffrance et la douleur qui me remerciaient que je les prenne en photo parce qu’elles savaient que ça pourrait contribuer à ce qu’on leur vienne en aide. Au contraire, j’ai vu des victimes réagir très mal, parce qu’elles pensaient qu’on était des paparazzi et des vautours, et qu’elles ne voyaient pas le rôle positif que pouvaient jouer les médias… »

  • Agressés un jour, remerciés le lendemain
« Cette semaine, on a été attaqués physiquement par des parents des disparus du vol Malaysia MH370, mais le lendemain, les mêmes personnes nous ont demandé de photographier leur manifestation de protestation contre le gouvernement malaisien ! »

Nicolas Asfouri : « Il y a des moments ou les photographes ne sont pas les bienvenus, mais dans les événements de guerre ou de catastrophe naturelle, les gens sont tellement pris par ce qu’ils endurent qu’ils ne nous voient même pas, ils ne savent même pas qu’on est là. »


Un homme porte le corps d'une fillette tuée dans un bombardement israélien à Qana, dans le sud du Liban, le 30 juillet 2006 (AFP / Nicolas Asfouri)

« L’impact des photos, ça peut aussi participer de la solidarité, des élans d’aide humanitaire ».
Ainsi des photos de Nicolas sur les bombardements israéliens de Qana, au sud Liban, en 2006, qui avaient fait 52 morts, dont 30 enfants. Son reportage avait suscité une immense émotion internationale, et contribué à obtenir un cessez-le feu.

« L’expression, l’exposition de la douleur de ce père portant sa fillette dans ses bras, avaient servi à quelque chose », plaide Eric Baradat, adjoint photo à la rédaction en chef centrale de l’AFP à Paris.
Pour Eric, au-delà de l’émotion du moment, la question prioritaire reste la suivante : « Quel est l’intérêt journalistique, quel est l’intérêt informatif de telle ou telle photo ? »
« Je fais partie des gens qui pensent qu’on est là pour montrer, rapporter, même si c’est atroce à voir. »
« Mais il y a parfois des images gratuites. Des corps déchiquetés par un accident de la route, quel est l’intérêt ? Est-ce bien nécessaire de montrer cela ? Des corps déchiquetés, des images atroces de la guerre en Syrie, c’est différent : cela peut aider à remuer l’opinion, à provoquer des décisions. C’est ce qui s’est passé avec ce reportage de Nicolas Asfouri au Liban. »


Arrivée à Tegucigalpa des corps de 16 Honduriens figurant parmi les 72 victimes d'un massacre d'émigrants à Tamaulipas, au Mexique, en 2010 (AFP / Orlando Sierra)

Source blogs.afp Par Michel SAILHAN